Alors que l’économie française sort à peine la tête de l’eau après la crise sanitaire liée au Covid-19, de nouveaux nuages s’amoncellent à l’horizon. Selon les dernières prévisions de l’Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE), l’incertitude politique régnant actuellement dans le pays pourrait amputer la croissance de 0,1 point de PIB en 2024 et de 0,2 point en 2025.
L’instabilité politique, frein à la confiance des acteurs économiques
Le climat d’incertitude politique lié à la dissolution de l’Assemblée nationale en juin dernier et à l’absence de majorité claire au Parlement pèse sur la confiance des ménages et des entreprises. Ces derniers, face aux doutes sur la stabilité et la lisibilité de la politique économique à venir, pourraient être tentés de reporter leurs projets d’investissement et de consommation.
En effet, les orientations budgétaires et fiscales des prochaines années restent floues. Les réformes qui seront mises en œuvre pour redresser les comptes publics et stimuler l’activité sont encore inconnues. Dans ce contexte, anticiper l’avenir devient un exercice périlleux pour les agents économiques.
Vers un ralentissement plus marqué que prévu en 2025
Si le gouvernement table encore sur une croissance de 1,1% en 2025, l’OFCE se montre plus pessimiste. Les économistes de l’institut prévoient un ralentissement de la croissance à 0,8%, soit 0,3 point de moins que l’estimation officielle.
Ce tassement de l’activité serait en grande partie imputable aux efforts de redressement des finances publiques. Pour ramener le déficit public de 6,1% du PIB en 2024 à 5% en 2025, le gouvernement devra serrer la vis budgétaire. Selon l’OFCE, ces mesures amputeront la croissance de 0,8 point de PIB l’an prochain.
Les moteurs de la croissance française en pleine mutation
En 2024, la politique budgétaire expansionniste devrait soutenir l’activité, tandis que la politique monétaire restrictive de la BCE pèsera sur la croissance. L’an prochain, la donne sera inversée : l’impact de la remontée des taux d’intérêt s’estompera mais le resserrement budgétaire se fera sentir.
Ainsi, « la nature des moteurs de la croissance française change complètement entre 2024 et 2025, passant d’un effet négatif de la politique monétaire et positif de la politique budgétaire en 2024 à une combinaison inverse en 2025 », souligne l’OFCE.
Le pouvoir d’achat des Français sous pression
Si l’inflation devrait refluer à 1,5% en moyenne annuelle en 2025 après 2% cette année, les Français subiront une légère baisse de leur pouvoir d’achat individuel de 0,2% l’an prochain, après une hausse de 1,1% en 2024.
Malgré tout, la consommation des ménages resterait le principal soutien de la croissance. Elle progresserait de 1,1% en 2025, soit quasiment deux fois plus qu’en 2024 (+0,6%). En parallèle, le taux d’épargne des Français reculerait de 0,7 point à 17,1%, un niveau qui reste toutefois largement supérieur à celui d’avant-crise.
Le marché de l’emploi devrait s’assombrir
Le ralentissement de la croissance économique ne sera pas sans conséquence sur le marché du travail. Après des années fastes en termes de créations de postes, la tendance devrait s’inverser.
L’OFCE anticipe une remontée progressive du taux de chômage. Celui-ci pourrait atteindre 8% de la population active fin 2025, contre 7,1% actuellement. Le coup de frein de l’activité se traduira également par une baisse des intentions d’embauche des entreprises.
Une reprise post-Covid plus difficile qu’ailleurs ?
L’économie française semble avoir plus de mal que ses voisins européens à retrouver son niveau et sa dynamique d’avant-crise. Selon une source proche du dossier, la France affiche un des rythmes de reprise les plus lents du Vieux Continent.
Le modèle économique et social français montre peut-être ses limites face aux défis actuels.
– Un expert économique souhaitant rester anonyme
L’Hexagone paye-t-il le prix de son système de protection sociale généreux et de son marché du travail encore rigide ? C’est en tout cas l’avis de certains observateurs. D’autres mettent en avant la prépondérance de l’incertitude politique dans ce retard relatif.
Une chose est sûre : les prochains mois seront décisifs pour savoir si la France parviendra à renouer durablement avec une croissance dynamique ou si elle restera à la traîne de ses partenaires. Les choix économiques du gouvernement et l’évolution du climat politique seront scrutés de près par les acteurs économiques.