D’après les dernières estimations du Citepa, le rythme de réduction des émissions de gaz à effet de serre (GES) de la France dévie de sa trajectoire sur les trois premiers trimestres 2024. Un coup de frein qui soulève des questions sur notre capacité à tenir nos engagements climatiques. Décryptage des chiffres clés et des points de vigilance.
Un net ralentissement en 2024
Alors que la baisse des émissions françaises atteignait un rythme encourageant de 5,8% en 2023 par rapport à 2022, les neuf premiers mois de 2024 marquent un net ralentissement, avec une réduction limitée à 2,4% en glissement annuel. Un écart préoccupant par rapport à l’objectif moyen de 4,7% par an fixé par la Stratégie Nationale Bas-Carbone pour espérer atteindre la neutralité en 2050.
Ce coup de mou est particulièrement marqué au 3e trimestre 2024, avec une légère hausse de +0,5% des émissions par rapport au T3 2023, après deux trimestres de baisse (-5% et -2,2%). Une tendance qui tempère les progrès enregistrés et appelle à un sursaut pour respecter notre budget carbone.
Des évolutions contrastées selon les secteurs
Si la production d’énergie et l’industrie poursuivent leurs efforts, avec des baisses respectives de 0,9 et 0,2 MtCO2e au T3, deux secteurs clés inquiètent :
- Les bâtiments, dont les émissions bondissent de 11,8% au 3e trimestre, plombées par les besoins de chauffage
- Les transports, qui voient leurs GES repartir à la hausse de 1,1% après un premier semestre en baisse
Des signaux préoccupants qui montrent les limites des politiques actuelles en matière de rénovation énergétique et de décarbonation des mobilités. Des chantiers majeurs pour infléchir durablement la courbe.
Des leviers d’action à actionner d’urgence
Pour rectifier le tir et s’inscrire sur une trajectoire compatible avec la neutralité carbone, plusieurs axes sont à renforcer sans attendre :
- Massifier la rénovation énergétique des bâtiments, avec des aides renforcées et un accompagnement simplifié
- Accélérer le verdissement des modes de transport, en boostant l’offre de trains, de mobilités actives et de véhicules propres
- Mobiliser l’industrie autour de sa décarbonation, en soutenant l’innovation bas-carbone et en renchérissant les énergies fossiles
- Intensifier les économies d’énergie dans tous les secteurs, via des incitations et une sensibilisation accrue des acteurs
Autant de mesures structurelles pour renouer avec une baisse pérenne et ambitieuse de notre empreinte carbone. Un défi crucial à relever collectivement pour tenir notre cap climatique.
La lutte contre le réchauffement n’attendra pas. Chaque trimestre compte pour réduire nos émissions et rester sous la barre des +2°C. Les chiffres 2024 nous rappellent l’urgence d’une action résolue et constante.
Un expert climat
Des signaux qui ne doivent pas faire oublier les progrès déjà réalisés, mais bien nous encourager à redoubler d’efforts. Pour tenir nos objectifs climatiques, la France doit résolument mettre les bouchées doubles et embarquer tous les acteurs dans une dynamique vertueuse. Le chemin est encore long, les moyens doivent suivre. Notre crédibilité et notre avenir en dépendent.