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La France crée-t-elle plus d’usines qu’elle n’en ferme ?

Depuis quelques années, la France serait devenue plus attractive pour l'industrie selon Gabriel Attal. Le pays créerait désormais plus d'usines qu'il n'en ferme. Mais ce constat optimiste reflète-t-il vraiment la réalité du terrain ? Plongée dans les...

Lors d’une récente interview sur France Info, le Premier ministre Gabriel Attal a défendu avec aplomb le bilan industriel du gouvernement. Selon lui, depuis trois à quatre ans, la France serait devenue le pays le plus attractif d’Europe pour les investissements étrangers dans l’industrie. Résultat, « il y a plus d’usines qui ouvrent que d’usines qui ferment » a-t-il déclaré. Une affirmation qui sonne comme une victoire face aux défis de la désindustrialisation. Mais ce satisfecit reflète-t-il vraiment la réalité ?

Un regain d’attractivité industrielle ?

Il est vrai que ces dernières années, la France a su séduire de nombreux investisseurs étrangers, soucieux de délocaliser ou d’étendre leur production. Selon le baromètre EY, notre pays est effectivement devenu en 2022 la destination européenne la plus attractive pour les projets d’investissements industriels étrangers, devant le Royaume-Uni et l’Allemagne. Un classement flatteur que l’exécutif ne manque pas de mettre en avant.

Cette dynamique positive se traduit concrètement par l’implantation de nouvelles usines sur le territoire. Des projets emblématiques comme la « gigafactory » de batteries de Douai portée par Renault et le chinois Envision, ou l’usine du taiwanais ProLogium à Dunkerque, spécialisée dans les batteries pour véhicules électriques, incarnent ce renouveau. Au total, 84 nouvelles usines ont été annoncées en 2021 et 2022 selon Bercy.

Des fermetures toujours nombreuses

Cependant, le bilan n’est pas aussi idyllique qu’il n’y paraît. Car dans le même temps, de nombreux sites industriels continuent de mettre la clé sous la porte. Selon le cabinet Trendeo, spécialiste de la veille économique, 175 usines ont fermé sur la période 2021-2022, soit plus du double des ouvertures. Un chiffre qui tempère sérieusement l’enthousiasme affiché par le gouvernement.

La vérité, c’est que le solde reste négatif entre les ouvertures et les fermetures d’usines. On est loin d’avoir inversé la tendance à la désindustrialisation.

David Cousquer, directeur général de Trendeo

Des créations concentrées sur quelques secteurs

Par ailleurs, les créations d’usines se concentrent principalement sur quelques secteurs porteurs comme la transition énergétique (batteries, hydrogène…), tandis que les fermetures frappent une grande diversité d’activités industrielles. En outre, les nouvelles usines sont souvent moins pourvoyeuses d’emplois que celles qui disparaissent, du fait de process de production de plus en plus automatisés et robotisés.

Une réindustrialisation encore fragile

Enfin, la pérennité des projets industriels récemment annoncés n’est pas toujours garantie. Certaines usines peinent à voir le jour du fait de difficultés techniques, financières ou d’opposition locale. D’autres, à peine inaugurées, font face à des problèmes de rentabilité dans un contexte économique plus difficile, entre flambée des coûts de l’énergie et ralentissement de la demande.

Au final, si la France a indéniablement gagné en attractivité ces dernières années, le chemin vers une véritable réindustrialisation du pays est encore long et semé d’embûches. Le bilan dressé par Gabriel Attal apparaît donc quelque peu prématuré et enjolivé. Pour inverser durablement le déclin industriel hexagonal, il faudra sans doute plus que des effets d’annonce et des coups de com’.

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