Vous avez passé des années à bâtir votre carrière, accumulé une précieuse expérience, pour vous retrouver écarté en raison de votre âge ? Malheureusement, vous n’êtes pas seul. Selon un récent baromètre, près d’un senior sur quatre affirme avoir été victime de discriminations au travail. Un constat glaçant qui en dit long sur la persistance des préjugés liés à l’âge dans le monde professionnel.
L’âgisme, ce fléau qui ne dit pas son nom
Si le sujet des discriminations est souvent abordé sous l’angle du genre ou de l’origine, l’âge reste le grand oublié. Pourtant, les chiffres sont sans appel : 23% des seniors rapportent avoir subi des discriminations dans leur emploi, particulièrement en lien avec leur âge ou leur état de santé. Un phénomène encore plus marqué chez les quinquagénaires perçus comme non-blancs, en mauvaise santé ou en situation économique précaire.
Au-delà des discriminations avérées, c’est tout un climat délétère qui pèse sur les seniors au travail. Un sur deux déclare avoir connu des relations professionnelles dévalorisantes ces 5 dernières années. Et pour cause, les préjugés ont la peau dure. Près d’un actif sur deux considère que les seniors sont dépassés par les nouvelles technologies. Ils seraient également une charge financière pour les entreprises selon un tiers des actifs. Des stéréotypes tenaces qui plombent les perspectives d’emploi et de carrière des plus de 50 ans.
Un frein à l’embauche difficilement surmontable
Les discriminations se manifestent à toutes les étapes de la vie professionnelle, mais c’est au moment de l’embauche qu’elles sont les plus criantes. Un senior au chômage sur quatre s’est déjà vu signifier, lors d’un entretien, qu’il était trop âgé pour le poste. Un obstacle souvent insurmontable dans un marché du travail où la proportion de chômeurs chez les quinquagénaires ne cesse de croître.
On a beau avoir un CV en béton, dès qu’ils voient la date de naissance, c’est terminé. J’enchaîne les entretiens mais au final, c’est toujours le même refrain : « pas assez dynamique », « pas dans l’air du temps »… Ils ne veulent pas de nous.
Témoignage d’un senior en recherche d’emploi
Vers la porte de sortie à coups de pression
Pour les seniors qui ont la chance d’être en poste, le maintien dans l’emploi s’apparente souvent à un parcours semé d’embûches. Mis au placard, poussés vers la sortie, niés dans leurs compétences… Tous les coups semblent permis pour se débarrasser des salariés âgés devenus indésirables.
Une stratégie sournoise dénoncée par de nombreux seniors, qui se voient refuser formations et promotions, tout en subissant une pression croissante pour les pousser vers la porte de sortie. Un management toxique qui n’est pas sans conséquences sur leur santé mentale. Parmi les victimes de discriminations, 71% indiquent une dégradation de leur bien-être psychologique, allant de la démotivation à la dépression.
L’expérience, un atout trop souvent négligé
Dans une société obnubilée par la performance et la rentabilité, les compétences acquises tout au long d’une carrière peinent à trouver leur place. L’expérience et la maturité des seniors, pourtant gages de savoir-faire et de recul, sont vues comme des handicaps par rapport à la fougue et la flexibilité supposées des plus jeunes.
Un gâchis humain et économique quand on sait à quel point la transmission intergénérationnelle est cruciale pour les entreprises. En négligeant ce précieux capital humain au profit de profils plus « dans l’air du temps », c’est toute une somme de connaissances et un regard avisé qui disparaissent au détriment de la performance collective.
Briser le plafond de verre de l’âge, un défi collectif
Face à l’ampleur du phénomène, une prise de conscience s’impose. Le Défenseur des Droits, à l’origine de ce baromètre édifiant, formule plusieurs recommandations pour endiguer ce fléau :
- Mener des campagnes de sensibilisation grand public pour déconstruire les stéréotypes liés à l’âge
- Renforcer les dispositifs de signalement et de traitement des discriminations
- Accompagner les entreprises dans une gestion des âges inclusives
- Anticiper les secondes parties de carrière via la formation et l’évolution professionnelle
Mais au-delà des pouvoirs publics, c’est l’affaire de tous. Managers, collègues, proches… Chacun a un rôle à jouer pour changer le regard porté sur les seniors au travail. Car performants et investis, ils ont encore tant à apporter à notre société. À condition de leur en donner la chance.
