Après plus de cinq ans de fermeture totale en raison de la pandémie de Covid-19, la Corée du Nord vient de faire un premier pas vers une réouverture au tourisme international. Selon plusieurs tour-opérateurs, la ville frontalière de Rason, située dans le nord-est du pays à proximité de la Chine et de la Russie, est à nouveau accessible aux visiteurs étrangers depuis ce jeudi. Une annonce inattendue qui soulève de nombreuses questions sur les intentions du régime nord-coréen et les perspectives d’une ouverture plus large.
Rason, une zone économique spéciale pionnière
Créée en 1991, Rason est la première zone économique spéciale établie en Corée du Nord. Bénéficiant d’un statut particulier, elle sert de laboratoire pour expérimenter des réformes économiques tout en restant sous contrôle de Pyongyang. Son emplacement stratégique, à la frontière chinoise et russe, en fait une porte d’entrée idéale pour les rares touristes autorisés à visiter le pays.
Avant la pandémie, le tourisme en Corée du Nord était très limité. D’après les estimations des professionnels du secteur, le pays accueillait chaque année environ 5000 visiteurs occidentaux et un nombre bien plus important de touristes chinois. La plupart entraient sur le territoire par avion ou train via la Chine.
Covid-19 : fermeture totale des frontières
Début 2020, face à la propagation mondiale du coronavirus, la Corée du Nord a pris des mesures drastiques en coupant totalement ses liaisons avec l’extérieur. Le régime a également renforcé la surveillance de sa frontière avec la Chine pour empêcher l’entrée illégale de ses propres citoyens.
Isolé pendant plus de deux ans, le pays a timidement recommencé en 2022 à autoriser quelques échanges et visites, comme l’accueil de délégations officielles et de groupes de touristes russes. Mais l’essentiel des restrictions restait en vigueur jusqu’à cette annonce surprise concernant Rason.
Les modalités de la réouverture
Si l’information de la réouverture de Rason aux touristes étrangers est confirmée par plusieurs sources, de nombreuses inconnues demeurent quant à sa mise en œuvre concrète. Les tour-opérateurs indiquent ne pas avoir encore reçu de détails sur les itinéraires possibles, les coûts ou les quotas de visiteurs.
Il semble néanmoins que l’accès soit autorisé immédiatement aussi bien aux voyageurs chinois qu’aux autres nationalités. Une décision surprenante quand on sait que les frontières entre la Chine et la Corée du Nord sont toujours officiellement fermées. Cela pourrait suggérer l’existence d’arrangements spécifiques pour permettre le passage des touristes.
Un test avant une plus large ouverture ?
Pour l’instant, seule la zone de Rason est concernée par cette réouverture, le reste du territoire nord-coréen demeurant inaccessible aux visiteurs étrangers. La ville de Samjiyon, autre point d’entrée touristique proche de la Chine dont la réouverture a été annoncée en août, reste pour le moment fermée selon les voyagistes.
De nombreux observateurs voient dans cette autorisation limitée à Rason un test des autorités nord-coréennes en vue d’une potentielle reprise plus générale du tourisme international. Selon des sources proches des milieux diplomatiques, Pyongyang chercherait ainsi à évaluer les bénéfices économiques et les risques sanitaires liés à un afflux même restreint de visiteurs étrangers.
Avec sa Zone économique spéciale, Rason pourrait servir de sas de décompression et de laboratoire grandeur nature pour une réouverture très progressive du pays.
Un expert de la Corée du Nord souhaitant garder l’anonymat.
Si l’expérience s’avère concluante, elle pourrait inciter le régime à étendre l’autorisation à d’autres villes et régions touristiques du pays. Une perspective encore hypothétique mais qui suscite déjà de nombreux espoirs parmi les tour-opérateurs et les voyageurs passionnés par cette destination atypique.
Des enjeux qui dépassent le tourisme
Au-delà de l’aspect strictement touristique, la décision de rouvrir partiellement les frontières nord-coréennes revêt une portée symbolique et stratégique. Après des années d’isolement renforcé, elle pourrait signaler une volonté de Pyongyang de renouer prudemment avec le monde extérieur.
Reste à savoir si cette main tendue apparente se limitera au tourisme ou préfigure une forme de dégel diplomatique plus large. Les prochains mois seront déterminants pour évaluer la profondeur et la sincérité de cette inflexion nord-coréenne.
En attendant, les candidats au voyage devront se montrer patients. Si Rason leur tend à nouveau les bras, le chemin vers une découverte plus complète de la Corée du Nord s’annonce encore long et parsemé d’embûches. Mais cette lueur d’espoir, même vacillante, ravive la flamme des passionnés de cette terre de mystères.
