Nouveau coup de tonnerre dans la guerre technologique sino-américaine. Les autorités chinoises viennent d’ouvrir une enquête sur Nvidia, leader mondial des semi-conducteurs, pour violation présumée des lois anti-monopole. Cette procédure, initiée par les services de régulation des marchés, vise également le non-respect d’un engagement pris par Nvidia lors de son acquisition en 2020 de Mellanox, fabricant israélien de puces. L’annonce a fait chuter le titre en bourse de la pépite de la Silicon Valley, valorisée plus de 1000 milliards de dollars.
Enquête Anti-Monopole : Nvidia dans le Viseur de Pékin
Selon une source proche du dossier, les régulateurs chinois soupçonnent Nvidia d’avoir abusé de sa position dominante sur le marché des cartes graphiques et des puces pour l’intelligence artificielle. Ils examinent en particulier les conditions de l’acquisition de Mellanox, rachetée pour 6,9 milliards de dollars. Nvidia aurait des pratiques anticoncurrentielles en imposant des clauses d’exclusivité et des prix élevés à ses clients chinois, grandes entreprises tech et centres de données.
Le groupe californien rejette ces accusations, assurant « respecter les lois en vigueur » et « coopérer avec les autorités ». Mais au delà de l’aspect juridique, cette enquête illustre les tensions croissantes entre les États-Unis et la Chine pour le contrôle des technologies clés comme les semi-conducteurs. Pékin cherche à réduire sa dépendance aux puces américaines, considérées comme un risque pour sa sécurité nationale. Washington de son côté restreint les exportations de composants et équipements vers la Chine pour freiner ses ambitions.
Bras de Fer Commercial et Technologique
En début décembre, l’administration Biden a encore durci les contrôles sur les ventes de semi-conducteurs à la Chine, suscitant l’ire de Pékin. Une escalade qui rappelle la guerre commerciale lancée sous Trump, qui pourrait reprendre après son retour annoncé à la Maison Blanche en janvier 2025. Le futur président menace déjà d’augmenter massivement les droits de douane si les entreprises ne relocalisent pas leur production.
De son côté, la Chine contre-attaque en limitant ses exportations de métaux rares comme le gallium et le germanium, indispensables pour la fabrication de puces et technologies de pointe. Elle mise aussi sur ses propres champions comme SMIC pour développer une filière de semi-conducteurs « Made in China ». Autant de signaux d’une volonté de s’affranchir de la dépendance américaine.
« Les semi-conducteurs sont le pétrole du 21ème siècle. Contrôler cette ressource, c’est contrôler le monde. »
Analyste géopolitique
Nvidia, Géant Fragilisé par son Succès
Dans cette compétition acharnée, Nvidia fait figure de champion en titre. Concepteur des « cerveaux » des IA les plus performantes comme ChatGPT, le groupe connaît une croissance phénoménale depuis deux ans. Son fondateur Jensen Huang est devenu l’un des grands manitous de la Tech, courtisé par tous les gouvernements.
Mais ce succès a un revers. La demande pour ses précieuses puces dépasse largement les capacités de production de Nvidia, entraînant des pénuries et des prix élevés. De quoi susciter le mécontentement des clients et l’appétit des concurrents comme AMD ou Intel. Des géants du Cloud comme Google et Amazon développent aussi leurs propres composants maison pour réduire leur dépendance.
Talon d’Achille Chinois
Surtout, Nvidia réalise une part importante de son chiffre d’affaires en Chine (26% en 2022). Le pays est à la fois un gros client et un sous-traitant clé pour la fabrication de ses puces. Un marché crucial mais risqué sur fond de rivalité géopolitique. L’enquête anti-monopole lancée par Pékin pourrait n’être qu’un avertissement ou un moyen de pression.
- En 2020, la Chine représentait 30% des revenus de Nvidia
- Baisse à 26% en 2022 du fait des restrictions américaines
- Nvidia a délocalisé une partie de sa production de Chine vers Vietnam et Israël
Jusqu’où ira ce bras de fer politique et technologique entre les deux superpuissances ? Nul ne le sait, mais une chose est sûre : les semi-conducteurs sont devenus un enjeu stratégique majeur. Un nerf de la guerre dont dépendent autant la compétitivité économique que la souveraineté numérique des États. Et dans ce « grand jeu », les géants comme Nvidia sont à la fois des atouts et des otages.
« Nvidia est pris en étau entre les deux éléphants qui se battent. Son défi est de naviguer entre les gouttes pour préserver ses intérêts. »
Expert du secteur des semi-conducteurs
Affaire à suivre donc, car au delà du cas Nvidia, c’est toute l’architecture de la mondialisation technologique qui se joue. Avec en toile de fond l’avenir de l’intelligence artificielle, dont les puces sont la clé. La prochaine bataille dans la conquête des données et des esprits.