C’est un véritable coup de tonnerre monétaire qu’a déclenché ce lundi la présidente de la Banque centrale européenne (BCE) Christine Lagarde. Lors d’un discours prononcé à Vilnius en Lituanie, elle a en effet annoncé que l’institution de Francfort prévoyait de nouvelles baisses de ses taux directeurs dans les mois à venir. Une inflexion majeure dans la politique de la BCE, qui avait jusqu’ici lourdement insisté sur la nécessité de maintenir des taux élevés pour combattre l’inflation galopante en zone euro.
Une désinflation plus rapide que prévu
Mais le contexte a changé plus vite qu’anticipé. Comme l’a souligné Mme Lagarde, les derniers chiffres montrent un net ralentissement de la hausse des prix dans les 20 pays partageant la monnaie unique. En mai, l’inflation est retombée à 6,1% sur un an, contre encore 7% en avril. Surtout, la BCE table désormais sur un retour de l’inflation à sa cible de 2% « courant 2025 », soit bien plus tôt que ce qu’elle prévoyait jusqu’ici.
Si les données qui arrivent continuent de confirmer notre scénario de base, alors la direction est claire : nous prévoyons de baisser davantage les taux d’intérêt.
Christine Lagarde, présidente de la BCE
Cette perspective d’une désinflation plus rapide qu’attendu change complètement la donne pour la BCE. Elle ouvre en effet la voie à un assouplissement plus précoce de sa politique monétaire, via de nouvelles baisses de ses taux. Une première baisse de 0,25 point pourrait ainsi intervenir dès la prochaine réunion de l’institution en juillet, suivie d’autres diminutions dans les mois suivants si la tendance se confirme.
Des risques pour la croissance
Ce revirement de la BCE n’est cependant pas sans risques. En abaissant ses taux trop rapidement, l’institution pourrait en effet fragiliser une croissance économique déjà chancelante en zone euro. Plusieurs grandes économies de la région, comme l’Allemagne ou l’Italie, ont d’ailleurs déjà basculé en récession ou frôlent la stagnation.
Un assouplissement monétaire prématuré pourrait donc casser le peu d’élan qu’il reste. D’autant que l’inflation, bien qu’en net repli, reste encore trois fois supérieure à l’objectif de la BCE. Le risque d’un retour en force des tensions sur les prix en cas de politique trop accommodante ne peut être écarté.
Un pari audacieux mais nécessaire
Malgré ces dangers, le pari de Christine Lagarde semble cependant nécessaire. Avec une inflation qui s’essouffle plus vite que prévu et des taux réels (hors inflation) redevenus positifs, le resserrement monétaire a sans doute atteint ses limites. Maintenir des taux trop élevés trop longtemps risquerait de faire basculer l’économie européenne dans une spirale récessionniste durable.
En annonçant de futures baisses de taux, la présidente de la BCE cherche donc à trouver un équilibre subtil. L’objectif est de continuer à lutter contre l’inflation tout en soutenant une activité économique qui donne des signes inquiétants d’essoufflement. Un exercice d’équilibriste périlleux mais incontournable pour tenter de piloter au mieux l’économie européenne dans cette période d’incertitude.
Les prochains mois seront donc décisifs. Si les chiffres d’inflation continuent de baisser comme l’anticipe désormais la BCE, Christine Lagarde aura réussi son pari en engageant un assouplissement monétaire au bon moment. Mais si la hausse des prix venait à repartir ou la croissance à s’effondrer, sa stratégie pourrait rapidement être remise en cause. Les marchés scruteront donc attentivement chaque nouvelle donnée économique.
- Les derniers chiffres montrent un net ralentissement de l’inflation en zone euro
- La BCE prévoit désormais un retour de l’inflation à 2% courant 2025
- Cette perspective ouvre la voie à de nouvelles baisses des taux directeurs
- Mais un assouplissement monétaire prématuré comporte des risques pour la croissance
- Le pari de Christine Lagarde semble cependant nécessaire pour éviter une spirale récessionniste