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La Bataille Légale Autour du Rhum Cubain Havana Club

Un rhum, deux propriétaires : la bataille judiciaire autour de l'emblématique Havana Club vient d'être relancée entre Cuba et le géant Bacardi suite à une nouvelle loi américaine. Découvrez les enjeux de ce conflit pour le contrôle d'un marché mondial du rhum en plein essor, malgré l'embargo...

La guerre commerciale fait rage depuis des décennies entre Cuba et le géant américain Bacardi autour de la célèbre marque de rhum Havana Club. Ce conflit vient d’être ravivé par la promulgation d’une nouvelle loi américaine, fustigée par le gouvernement cubain. Retour sur une saga judiciaire aux enjeux colossaux sur un marché mondial du rhum en pleine croissance.

Une loi sur les marques « confisquées » qui attise les tensions

Signée début décembre 2024 par le président américain Joe Biden, la « loi sur les marques volées non reconnues aux États-Unis » interdit aux tribunaux et agences fédérales de reconnaître les marques jugées illégalement confisquées par Cuba lors des nationalisations post-révolutionnaires de 1959. Une mesure taillée sur mesure pour le cas Havana Club, au cœur d’une bataille légale acharnée entre l’État cubain et la famille Bacardi.

Le fleuron du rhum cubain dans le viseur

Joyau de l’industrie du rhum cubain, Havana Club est depuis 1993 produit et commercialisé dans le monde entier (hormis aux USA en raison de l’embargo) via une joint-venture entre Cuba Ron et le groupe français Pernod Ricard. Mais le géant Bacardi, héritier de l’entreprise familiale de Santiago de Cuba nationalisée en 1960, conteste de longue date les droits sur la marque et vend depuis 1995 aux États-Unis son propre rhum Havana Club, fabriqué à Porto Rico.

Bacardi revendique l’héritage de la recette originale

Pour justifier sa légitimité, Bacardi assure suivre la recette originale du Havana Club créé en 1934 par la famille Arechabala, qui a perdu ses droits sur la marque en 1974 après son exil. Cuba avait réussi à faire enregistrer la marque aux USA en 1976, mais son renouvellement en 2026 pourrait être compromis par la nouvelle législation.

Un marché du rhum florissant qui attise les convoitises

L’enjeu de cette bataille juridico-commerciale est de taille. Selon les projections, le marché mondial du rhum devrait connaître un taux de croissance annuel moyen de 7,7% entre 2024 et 2031 pour atteindre plus de 32 milliards de dollars. Si Pernod Ricard se dit pénalisé par son incapacité à vendre le « vrai » Havana Club aux USA, Bacardi se frotte les mains d’un succès législatif visiblement obtenu à peu de frais en lobbying.

C’est un succès immensément rentable pour Bacardi. Peu d’argent a été dépensé pour atteindre l’objectif d’une loi en faveur de ses intérêts.

John Kavulich, directeur du Conseil commercial et économique Cuba-États-Unis

Une nouvelle escarmouche dans les relations USA-Cuba

Au-delà de la rivalité entre deux géants du rhum, l’affaire Havana Club illustre la persistance des tensions diplomatiques entre Washington et La Havane. Malgré le bref dégel initié sous Obama, l’administration Biden n’a pas fondamentalement remis en cause le durcissement des sanctions sous Trump, dont la politique pourrait même être à nouveau musclée vis-à-vis du régime communiste insulaire. Cuba a d’ailleurs vigoureusement dénoncé cette loi « ouvrant la voie au vol de ses marques ».

Vers une intensification de la bataille ?

Alors que le marché du rhum s’annonce toujours plus lucratif, cette nouvelle péripétie risque d’envenimer encore davantage le long contentieux entre Cuba et Bacardi. Derrière la guerre des étiquettes et des recettes se profile l’affrontement géopolitique persistant entre deux pays divisés par des décennies d’embargo et d’hostilité idéologique. À moins d’un improbable compromis, le dossier Havana Club a encore de beaux jours devant lui dans les prétoires et coulisses diplomatiques.

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