Un nouveau chapitre vient de s’écrire dans le bras de fer opposant Cuba à ses créanciers privés. D’après des sources proches du dossier, la Cour d’appel de Londres a rejeté mardi le recours intenté par la Banque Nationale de Cuba (BNC), confirmant ainsi la décision rendue en première instance en avril dernier. Une victoire significative pour le fonds d’investissement CRF, enregistré aux îles Caïmans, qui se voit reconnu comme un créancier légitime de la banque cubaine.
Une dette de 40 ans d’âge au cœur des tensions
Le contentieux porte sur deux lignes de crédit contractées par la BNC en 1984 auprès d’établissements bancaires européens, pour un montant initial de 15 millions de dollars. Des créances rachetées au fil des années par CRF, qui estime aujourd’hui leur valeur à 78 millions de dollars, intérêts compris. Un chiffre que la banque cubaine conteste farouchement.
L’enjeu est de taille pour le régime cubain. Car au-delà de ce dossier spécifique, c’est toute une série de dettes, contractées à l’époque de Fidel Castro et laissées en souffrance depuis la fin des années 80, qui pourraient revenir sur le devant de la scène judiciaire. Selon les informations recueillies, CRF détiendrait pour plus d’un milliard de dollars de titres de dette cubains impayés.
Une banque au statut contesté
La Banque Nationale de Cuba, ancienne banque centrale de l’île devenue une banque commerciale, arguait jusqu’ici que les cours britanniques n’étaient pas compétentes pour juger ce litige. Un argument balayé par les juges londoniens, qui ont estimé que la BNC ne représentait plus l’Etat cubain depuis la création d’une nouvelle banque centrale en 1997.
Nous restons déterminés à obtenir justice pour nos actionnaires si des négociations n’ont pas lieu
David Charters, président de CRF
Vers un jugement sur le fond
Avec cette décision, la voie est désormais ouverte pour que la justice britannique se prononce sur le fond du dossier et détermine les sommes effectivement dues par la BNC. Un scénario que le fonds CRF appelle de ses vœux, après avoir tenté, en vain selon lui, d’ouvrir des négociations avec les autorités cubaines pour restructurer cette dette.
Cette affaire met en lumière les difficultés rencontrées par Cuba dans la gestion de sa dette extérieure, héritage pesant des années de gouvernance castriste. Malgré une récente restructuration de sa dette auprès du Club de Paris, le pays peine encore à rétablir sa crédibilité financière sur la scène internationale. Et les “fonds vautours”, comme les qualifie le gouvernement cubain, rôdent, prêts à fondre sur leurs proies.
Cuba face à de nouvelles menaces juridiques
Au-delà du cas CRF, d’autres créanciers pourraient en effet être tentés de saisir la justice pour recouvrer leurs créances, s’appuyant sur le précédent établi par les cours britanniques. Un risque non négligeable pour les finances cubaines, déjà mises à mal par les sanctions américaines et la crise économique.
Face à ces défis, le président Miguel Diaz-Canel va devoir redoubler d’efforts diplomatiques pour rassurer ses partenaires étrangers et trouver une issue négociée à ces contentieux financiers. Tout en préservant les maigres ressources de l’île et les acquis sociaux de la révolution. Un numéro d’équilibriste périlleux, qui mettra à l’épreuve la résilience du modèle cubain dans les années à venir.