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La Banque centrale de Russie envisage une nouvelle hausse des taux

La patronne de la Banque centrale russe envisage une nouvelle hausse des taux en décembre face à une inflation galopante. Les milieux d'affaires s'inquiètent des conséquences sur la croissance. Le pays fait face à...

L’économie russe navigue en eaux troubles. Alors que l’inflation reste obstinément élevée, la patronne de la Banque centrale de Russie (BCR) Elvira Nabioullina a ouvert la porte mercredi à une nouvelle hausse des taux directeurs. Une perspective qui inquiète le monde des affaires, déjà confronté à des conditions de crédit très restrictives.

Les taux au plus haut depuis 20 ans

Actuellement à 8,5% en rythme annuel selon les dernières données officielles, l’inflation est le principal casse-tête des autorités monétaires russes. Pour tenter de la juguler, la BCR a déjà porté son taux directeur à 21% fin octobre, soit son plus haut niveau depuis 2003. Une politique inhabituelle en temps de guerre.

Nous avons signalé que la banque centrale envisageait la possibilité d’une hausse des taux car l’inflation n’a pas encore commencé à baisser.

Elvira Nabioullina, lors d’un forum financier à Moscou

Si elle venait à se concrétiser le 20 décembre, date de la prochaine réunion de politique monétaire, cette hausse constituerait un nouveau tour de vis pour une économie déjà malmenée par les sanctions internationales et les répercussions du conflit en Ukraine. D’après plusieurs analystes, le taux directeur russe pourrait grimper à 22%, voire au-delà.

Le spectre de la stagflation

Du côté des entreprises, c’est le branle-bas de combat. Ces derniers jours, de nombreux grands patrons se sont émus publiquement d’un tel scénario, mettant en garde contre un coût du crédit prohibitif qui menacerait les investissements et plomberait durablement l’activité. Un risque déjà bien identifié par les autorités, qui tablent sur une contraction du PIB de 3% en 2022.

Mais pour la patronne de la BCR, la priorité absolue reste la lutte contre l’inflation, quitte à sacrifier temporairement la croissance. Selon elle, ne pas agir maintenant pour casser la spirale inflationniste risquerait de lui faire perdre toute crédibilité auprès de la population, dont le pouvoir d’achat fond comme neige au soleil. Un choix cornélien.

Si nous ne réagissons pas maintenant, il sera considéré par les Russes que les autorités ont fait preuve de réticence ou d’incapacité à freiner l’inflation.

Elvira Nabioullina, s’adressant aux critiques

À moyen terme, c’est le spectre d’une stagflation qui se profile, soit la combinaison redoutable d’une croissance atone et d’une inflation élevée. Un cas d’école dans les manuels d’économie, vécu douloureusement par les économies occidentales dans les années 1970. La Russie parviendra-t-elle à échapper à ce sombre destin ?

Pénuries de main d’œuvre et dépenses militaires

Les causes de l’inflation russe sont multiples. Aux effets des sanctions internationales s’ajoutent l’envolée des dépenses militaires liées à la campagne ukrainienne et les pénuries croissantes de main d’œuvre, qui poussent les salaires à la hausse. Depuis février, des centaines de milliers d’hommes ont en effet quitté le marché du travail, soit pour rejoindre le front, soit pour fuir à l’étranger.

Face à ces déséquilibres, les entreprises n’ont d’autre choix que de proposer des rémunérations toujours plus attractives pour attirer les candidats, dans un contexte de concurrence exacerbée pour les talents. Une tendance qui nourrit à son tour l’inflation, via la boucle prix-salaires bien connue des économistes.

Le rouble sous pression

Sur le marché des changes aussi, les nuages s’amoncellent. Conséquence directe des tensions inflationnistes, le rouble évolue actuellement à son plus bas niveau face au dollar et à l’euro depuis la mi-mars 2022, peu après le déclenchement de l' »opération militaire spéciale » en Ukraine.

Une dépréciation qui renchérit mécaniquement le coût des importations, des matières premières à l’énergie en passant par les composants industriels, et complique encore un peu plus l’équation du pays. Reste à savoir jusqu’où la BCR sera prête à aller dans son bras de fer contre l’inflation. Réponse le 20 décembre.

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