Et si la banque centrale la plus puissante du monde tombait entre les mains d’un fidèle absolu de Donald Trump ? Mardi, le président américain a semé un vent de panique – ou d’excitation, selon le camp – en désignant presque ouvertement son conseiller économique Kevin Hassett comme le prochain patron de la Réserve fédérale.
Un simple « Merci Kevin », glissé devant les caméras, accompagné d’un sourire entendu, a suffi. Dans la salle, Hassett était bien là. Et tout le monde a compris.
Un Signal Clair Lancé depuis la Maison Blanche
Lors d’un événement à la Maison Blanche, Donald Trump a laissé peu de place au doute. Interrogé sur l’avenir de la Fed, il a répondu avec son style habituel : « Je crois que le potentiel président de la Fed est là aussi… potentiel… je peux vous dire que c’est quelqu’un de respecté. Merci Kevin. »
Le message est passé comme une traînée de poudre. Kevin Hassett, docteur en économie et défenseur acharné des politiques trumpiennes depuis des années, se retrouve propulsé favori numéro un pour succéder à Jerome Powell, dont le mandat expire en mai prochain.
Plus tôt dans la journée, Trump avait déjà distillé des indices : « Nous avons probablement étudié dix candidats et il en reste un. » Difficile de faire plus transparent.
Qui est vraiment Kevin Hassett ?
À 62 ans, Kevin Hassett n’est pas un inconnu dans les cercles républicains. Ancien président du Council of Economic Advisers sous le premier mandat Trump (2017-2019), il a toujours défendu bec et ongles les baisses d’impôts massives et la dérégulation.
Sur les plateaux télé, il est devenu ces derniers mois l’un des porte-voix les plus fidèles du président, vantant le « nouvel âge d’or » promis aux Américains tout en minimisant les risques inflationnistes des nouveaux droits de douane à 60 % sur les produits chinois ou 20 % sur le reste du monde.
« Les politiques de Donald Trump vont ramener la prospérité comme jamais auparavant »
Kevin Hassett, intervention récente sur une chaîne économique
Ses positions sont claires : il faut baisser fortement les taux d’intérêt pour accompagner la croissance, même au prix d’un peu plus d’inflation. Une musique que Trump adore entendre.
Un Calendrier qui s’accélère
Le président a indiqué qu’il annoncerait probablement son choix « en début d’année prochaine », voire avant Noël selon certaines sources proches du dossier. Scott Bessent, le secrétaire au Trésor pressenti, a déjà décliné l’offre : « Il n’en veut pas », a confirmé Trump.
Le calendrier est serré. Le mandat de Jerome Powell s’achève en mai 2026. Trump, qui n’a jamais digéré que « son » ancien protégé maintienne des taux jugés trop élevés, veut manifestement imposer sa marque dès que possible.
Il a d’ailleurs multiplié les attaques publiques contre Powell ces derniers mois, allant jusqu’à souhaiter son départ anticipé – une pression qui, juridiquement, n’a aucune chance d’aboutir.
Un Parcours du Combattant au Sénat
Même avec une majorité républicaine au Sénat, rien n’est gagné. La nomination doit être confirmée à la majorité simple, mais les démocrates promettent déjà une bataille féroce.
Ils viennent d’ailleurs d’essayer – sans succès – de bloquer la nomination d’un autre proche de Trump, Stephen Miran, au poste de gouverneur de la Fed. Qualifié de « laquais » par certains élus de l’opposition, Miran a fini par être confirmé en septembre.
Pour Hassett, le débat risque d’être encore plus violent. Ses prises de position très tranchées sur la nécessité de baisses de taux agressives et son absence de distance critique vis-à-vis de la Maison Blanche alimentent les craintes sur l’indépendance de l’institution.
Le point sensible : Peut-on confier la politique monétaire américaine à quelqu’un qui a passé des années à défendre publiquement l’idée que la Fed doit obéir aux souhaits du président ?
Les Marchés déjà nerveux
Wall Street suit l’affaire de très près. L’hypothèse Hassett a provoqué une légère hausse des rendements obligataires à long terme dès mardi soir – signe que les investisseurs anticipent une politique plus accommodante, mais aussi plus risquée sur l’inflation.
La crédibilité internationale de la Fed repose en grande partie sur son indépendance. Un président perçu comme trop aligné sur la Maison Blanche pourrait fragiliser la confiance, notamment auprès des investisseurs étrangers qui détiennent une part importante de la dette américaine.
Ce que cela dit de la vision économique de Trump
Choisir Kevin Hassett, ce serait envoyer un message fort : la politique monétaire doit accompagner la politique budgétaire et commerciale, point final. Exit les discours sur la lutte prioritaire contre l’inflation si cela freine la croissance ou les ambitions du président.
C’est une rupture potentielle avec soixante-dix ans de doctrine qui veulent que la Fed reste à l’écart des pressions politiques immédiates.
Et cela s’inscrit dans une stratégie plus large : après avoir placé des fidèles à des postes clés (Trésor, Commerce, Justice), Trump semble vouloir verrouiller aussi la banque centrale.
Et Jerome Powell dans tout ça ?
L’actuel président de la Fed reste impassible en public. Mais en privé, les observateurs rapportent une certaine tension. Nommé par Trump lui-même en 2017, Powell a depuis gagné le respect des marchés pour sa gestion de la crise Covid puis de l’inflation post-2022.
Ses relations avec le président se sont détériorées au fil des hausses de taux. Trump n’a jamais pardonné à Powell de ne pas avoir maintenu des taux proches de zéro comme il le réclamait.
Aujourd’hui, Powell incarne une forme de résistance institutionnelle. Le voir remplacé par un profil aussi partisan marquerait un tournant historique.
Les Scénarios possibles d’ici mai
- Confirmation rapide : les républicains serrent les rangs, Hassett passe avec 51 ou 52 voix.
- Bataille prolongée : auditions houleuses, fuites dans la presse, quelques républicains modérés (Collins, Murkowski ?) posent problème.
- Plan B : si le Sénat bloque, Trump pourrait nommer un intérim ou choisir un profil moins clivant à la dernière minute.
Rien n’est joué. Mais une chose est sûre : les prochains mois risquent d’être parmi les plus agités de l’histoire récente de la Fed.
L’Amérique se prépare à un changement de cap majeur. Et le monde entier regardera.
(Article mis à jour le 3 décembre 2025 – suivi en continu)









