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Kenya: Le Président Ruto Reconnaît les Exactions des Forces de Sécurité

Le président kenyan admet des exactions des forces de sécurité suite aux manifestations. Des dizaines d'enlèvements et de disparitions suscitent l'indignation dans le pays. Malgré les promesses présidentielles, les disparus ne réapparaissent pas...

Le Kenya est secoué par une vague d’enlèvements et de disparitions suite aux manifestations anti-gouvernementales durement réprimées en juin et juillet derniers. Plus de 60 personnes auraient été tuées selon des ONG, et les forces de sécurité kényanes sont accusées de dizaines de ces disparitions. Face à l’indignation grandissante dans le pays, le président William Ruto a finalement reconnu mardi des « cas d’actions excessives et extrajudiciaires » de la part des membres des services de sécurité, dans son discours de vœux pour 2025.

Un aveu en demi-teinte du président Ruto

Si cette reconnaissance des exactions par le chef de l’État constitue un premier pas, elle reste cependant mesurée. Le président Ruto a en effet immédiatement nuancé ses propos :

Cela dit, il est crucial de se rappeler que chaque liberté a ses limites, et que la sécurité publique et l’ordre doivent toujours primer sur le désir de liberté sans contrôle.

Une semaine auparavant, acculé, le président avait promis de « mettre fin aux enlèvements », ce que des défenseurs des droits humains avaient alors interprété comme un aveu de responsabilité. Mais dans le même temps, M. Ruto avait exhorté les parents à « assumer la responsabilité » de leurs enfants.

Des jeunes hommes critiques du pouvoir ciblés

La dernière vague d’enlèvements, qui fait les gros titres au Kenya, concerne principalement de jeunes hommes ayant critiqué le président Ruto sur les réseaux sociaux. Deux d’entre eux avaient notamment diffusé une image générée par intelligence artificielle montrant le chef de l’État allongé dans un cercueil. Dans ses vœux, le président a d’ailleurs déploré des « signaux clairs que notre tissu moral risque de se dégrader, exacerbé par divers facteurs, notamment la manipulation de la technologie numérique; en particulier les médias sociaux ».

La police nie mais n’enquête pas sur les disparitions

Lundi, la police kényane a violemment dispersé au gaz lacrymogène et arrêté des dizaines de manifestants qui protestaient pacifiquement contre ces disparitions à Nairobi. La police nie toute implication dans les enlèvements, mais les militants des droits humains s’interrogent sur l’absence apparente d’enquête. Un tribunal de la capitale a ordonné le même jour aux forces de l’ordre de libérer « immédiatement et sans condition » cinq hommes qui auraient été enlevés, et de les présenter au tribunal mardi ou « d’expliquer sous serment les circonstances de l’affaire ». Mais aucun des disparus n’est apparu à l’audience.

29 personnes toujours portées disparues selon la KNCHR

Selon un décompte de la Commission nationale des droits de l’homme du Kenya (KNCHR), sept cas d’enlèvements ont été signalés ce mois-ci, dont six personnes sont toujours portées disparues. Au total, depuis juin, la KNCHR a recensé 82 cas de disparitions, dont 29 personnes n’ont toujours pas été retrouvées à ce jour.

Malgré les promesses du président Ruto de mettre fin à ces enlèvements, les familles des disparus attendent toujours des réponses. L’aveu, même partiel, des exactions par le chef de l’État sera-t-il suivi d’effets? Les autorités kényanes sauront-elles faire toute la lumière sur ces disparitions et traduire les responsables en justice ? Beaucoup dans le pays en doutent et la colère continue de gronder.

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