Dans les rues animées de Woolwich, un quartier du sud-est de Londres, un drame a secoué la communauté le 7 janvier 2025. Kelyan, un adolescent de 14 ans, rappeur en herbe et fan d’Arsenal, a été sauvagement assassiné dans un bus en pleine journée. Ce jeune, décrit par sa mère comme « poli » et « attentionné », a été victime d’une attaque d’une violence inouïe, menée par deux mineurs armés de machettes. Cet événement tragique relance le débat sur l’emprise des gangs sur la jeunesse et la montée des crimes à l’arme blanche au Royaume-Uni.
Une tragédie qui ébranle Londres
Ce jour-là, Kelyan monte à bord du bus 472 pour se rendre à un rendez-vous. Quelques minutes plus tard, deux adolescents, âgés de 15 et 16 ans à l’époque, montent à leur tour, armés de machettes dissimulées sous leurs vêtements. Sans un mot, ils s’approchent de Kelyan avec une intention claire. En seulement 14 secondes, ils portent 27 coups de machette sur le jeune garçon, qui tente désespérément de se protéger avec son sac d’école. Les images de vidéosurveillance, montrant les assaillants sourire pendant l’attaque, glacent le sang.
Les passagers, pris de panique, fuient vers l’avant du bus. Kelyan, grièvement blessé, titube dans l’allée en criant « Aidez-moi, j’ai été poignardé ! » avant de s’effondrer. Malgré l’intervention rapide des secours, il succombe à ses blessures à 15h23, laissant derrière lui une mère dévastée et une communauté sous le choc.
Kelyan, un adolescent sous l’emprise des gangs
Kelyan n’était pas un inconnu des services sociaux. Dès l’âge de six ans, il avait été exposé à l’influence des gangs, selon sa mère, Marie. Déscolarisé à plusieurs reprises, il avait passé du temps dans la rue, fuyant parfois le domicile familial. Marie Bokassa, 50 ans, a partagé sa douleur dans une déclaration émouvante :
« J’ai essayé tant de fois de le sortir de cette emprise. J’ai crié qu’il allait être tué, mais personne ne m’a vraiment écoutée. »
Marie Bokassa, mère de Kelyan
Fan de football et rappeur amateur, Kelyan avait sorti une chanson intitulée Bangers and Mash le jour de Noël, révélant son talent créatif. Pourtant, son parcours était marqué par des difficultés. Avant ses 10 ans, il avait été surpris avec un couteau à l’école, et plus récemment, une machette, ce qui lui avait valu une convocation devant la justice pour possession d’arme offensive.
Une attaque planifiée et brutale
Les procureurs ont qualifié l’attaque de « planifiée ». Les deux adolescents, dont les identités restent protégées en raison de leur âge, semblent avoir été informés de la présence de Kelyan dans le bus. Ils sont montés à bord avec une détermination froide, chacun armé d’une machette identique. Après l’attaque, ils ont fui, l’un d’eux jetant son arme dans la Tamise, bien que celle-ci ait été retrouvée plus tard par la police.
Les deux jeunes, arrêtés le 15 janvier après une chasse à l’homme, ont plaidé coupable en mai. Lors du procès, l’un d’eux a semblé hésiter sur son plaidoyer, mais tous deux ont finalement reconnu les faits, ainsi que la possession d’armes offensives. Leur comportement en salle d’audience, où l’un a été vu souriant, a choqué les proches de Kelyan et le public.
Une condamnation à la hauteur du crime
Le 25 juillet 2025, le juge Mark Lucraft a prononcé une sentence lourde : la réclusion criminelle à perpétuité, avec une peine minimale de 15 ans et 110 jours avant toute possibilité de libération conditionnelle. Lors de l’audience, le juge a souligné la cruauté de l’acte :
« La vidéosurveillance montre que vous souriez pendant l’attaque. La mort de Kelyan est une perte insensée causée par les horreurs du crime au couteau. »
Juge Mark Lucraft
Les deux adolescents, déjà condamnés par le passé pour port d’arme blanche, étaient profondément ancrés dans la culture des gangs. Ce contexte, loin d’atténuer leur responsabilité, a mis en lumière l’urgence d’agir contre ce fléau qui touche les jeunes Britanniques.
Woolwich, un quartier marqué par la violence
Le quartier de Woolwich, où s’est déroulé le drame, est tristement connu pour ses activités criminelles liées aux gangs, souvent impliqués dans le trafic de drogue. La veille de l’attaque contre Kelyan, un jeune de 18 ans avait été grièvement blessé par arme blanche près d’une école du même quartier. En septembre 2024, un autre adolescent y avait perdu la vie dans une attaque qualifiée de « représailles » liées à une guerre de territoire.
Les statistiques sont alarmantes : en 2024, 10 adolescents ont été tués par arme blanche à Londres, après 18 en 2023. Ces chiffres reflètent une crise plus large, où les jeunes, parfois dès l’âge de 10 ans, sont attirés par les gangs promettant protection, argent et appartenance.
Les chiffres clés de la violence à l’arme blanche à Londres
- 10 adolescents tués par arme blanche en 2024.
- 18 adolescents tués en 2023.
- 27 000 jeunes (10-17 ans) identifiés comme membres de gangs en Angleterre et au Pays de Galles (2017).
- Woolwich : épicentre des activités criminelles liées aux gangs.
Le cri d’alarme de la mère de Kelyan
Marie Bokassa, la mère de Kelyan, est devenue une voix poignante dans ce drame. Elle a décrit un fils aimant, passionné par le football et la musique, mais aussi un adolescent vulnérable, happé par l’attraction des gangs. Dans une déclaration lue à l’extérieur du tribunal, elle a lancé un appel vibrant aux jeunes :
« À ceux qui portent des couteaux, je vous supplie d’arrêter avant de lever cette lame. Ne laissez pas un moment de colère voler votre avenir. »
Marie Bokassa
Son témoignage met en lumière un problème systémique : le manque de soutien pour les familles confrontées à l’influence des gangs. Malgré ses efforts répétés pour protéger son fils, Marie s’est heurtée à un manque de ressources et d’aide des autorités, un constat partagé par d’autres parents dans des situations similaires.
La culture des gangs : un cercle vicieux
La culture des gangs au Royaume-Uni est un problème complexe, enraciné dans des facteurs sociaux, économiques et culturels. Les gangs ciblent souvent des jeunes vulnérables, leur offrant un sentiment d’appartenance et de pouvoir. Selon un rapport de 2017, environ 27 000 jeunes âgés de 10 à 17 ans étaient membres de gangs en Angleterre et au Pays de Galles. Ces groupes exploitent les failles du système, recrutant des enfants dès leur plus jeune âge.
Le militant Faron Paul, lors d’un service religieux en hommage à Kelyan, a appelé à plus de moyens pour briser ce « cercle vicieux » de la violence. Il a souligné que les jeunes impliqués dans ces actes sont souvent eux-mêmes victimes d’un environnement toxique :
« Ces garçons sont très jeunes, et leurs actes provoquent des effets à long terme, avec d’autres qui cherchent à se venger. »
Faron Paul, militant
Le cas de Kelyan illustre ce cycle : lui-même portait une arme, signe qu’il vivait dans la peur, probablement à cause de son implication dans cet univers. Pourtant, il n’a pas eu le temps de se défendre lors de l’attaque.
Un problème national
La mort de Kelyan a ravivé le débat sur la crise des armes blanches au Royaume-Uni. Le Premier ministre Keir Starmer a qualifié ce fléau de « crise nationale », appelant à des mesures plus strictes pour endiguer la violence. Cependant, les solutions restent complexes. Les gangs prospèrent dans des quartiers où les opportunités manquent, et les jeunes, souvent issus de milieux défavorisés, deviennent des proies faciles.
Alison Cope, une mère dont le fils a été tué par arme blanche en 2013, déplore le manque de prévention :
« Les parents demandent de l’aide pour leurs enfants impliqués dans des gangs, mais tant qu’un drame ne survient pas, leur cas n’est pas pris au sérieux. »
Alison Cope, militante
Ce manque de réactivité laisse de nombreuses familles démunies, confrontées à un système débordé et à des ressources limitées.
Vers des solutions concrètes ?
Face à cette tragédie, plusieurs pistes sont envisagées pour lutter contre la violence des gangs et les crimes à l’arme blanche. Voici quelques propositions clés :
- Renforcer la prévention : Investir dans des programmes éducatifs pour détourner les jeunes des gangs.
- Améliorer le soutien aux familles : Offrir des ressources aux parents pour protéger leurs enfants.
- Contrôles accrus des armes : Intensifier les fouilles et les patrouilles dans les zones à risque.
- Réforme judiciaire : Accélérer les interventions pour les mineurs à risque avant qu’ils ne commettent des actes graves.
Ces mesures, bien que prometteuses, nécessitent un engagement politique et financier de long terme. La tragédie de Kelyan montre que le temps presse.
Un appel à l’action collective
La mort de Kelyan n’est pas un cas isolé, mais un symptôme d’un problème plus large. Les gangs, la violence à l’arme blanche et l’absence de perspectives pour certains jeunes forment un cocktail explosif. La société britannique, et au-delà, doit se mobiliser pour offrir des alternatives à ces adolescents vulnérables. Éducation, accompagnement social et répression ciblée doivent aller de pair pour briser ce cycle de violence.
Marie Bokassa, dans son chagrin, a trouvé la force de s’adresser aux jeunes : « Ne laissez pas les rues vous élever d’une manière que votre mère n’aurait jamais voulue. » Son message, empreint de douleur mais aussi d’espoir, résonne comme un appel à l’action pour tous.
La mort de Kelyan est une tragédie, mais aussi un rappel que chaque jeune mérite une chance de s’en sortir. Ensemble, pouvons-nous changer la donne ?
Ce drame, aussi choquant soit-il, doit servir de catalyseur pour un changement profond. La mémoire de Kelyan, un jeune rappeur plein de rêves, ne doit pas s’éteindre dans l’indifférence. À nous de faire en sorte que son histoire devienne un tournant dans la lutte contre la violence des gangs.