Imaginez pouvoir bénéficier de jours de congés supplémentaires en choisissant simplement un mode de transport plus écologique pour partir en week-end ou en vacances. C’est ce que proposent depuis peu certaines entreprises, sous le nom de “Temps de Trajet Responsable” ou TTR. Une tendance encore confidentielle mais qui pourrait bien se démocratiser à l’avenir.
Les pionniers du “Temps de Trajet Responsable”
En France, c’est la société Ubiq, filiale de Nexity spécialisée dans la recherche de bureaux à louer pour les entreprises, qui a ouvert la voie début 2023. Ses salariés peuvent désormais prendre jusqu’à deux jours de congés additionnels par an, fractionnables en demi-journées, s’ils utilisent un moyen de déplacement vertueux comme le train, le vélo, le covoiturage ou le bus pour leurs voyages personnels.
Pour en bénéficier, il leur suffit de fournir un justificatif de leur trajet (billet, facture…) d’une durée minimale de six heures. Quelques autres sociétés comme La Fresque du Climat, Home Exchange et Vendredi ont depuis emboîté le pas d’Ubiq. Mais ces initiatives restent isolées et surtout très peu encadrées juridiquement pour le moment.
Un coup de pouce pour le train face à l’avion
L’objectif affiché est d’inciter les collaborateurs à délaisser l’avion, grand pourvoyeur de gaz à effet de serre, au profit de modes de transport plus propres comme le train. Selon le site gouvernemental Datagir, ce dernier émet en moyenne 200 fois moins de CO2 que l’avion sur un trajet équivalent en France ou en Europe.
En offrant des jours de congés bonus pour compenser le temps de trajet plus long, les employeurs espèrent faire pencher la balance en faveur de la mobilité douce. C’est aussi un moyen de répondre à une attente croissante des salariés et des candidats, de plus en plus attentifs aux engagements RSE des entreprises.
Plus de 8 salariés ou candidats à l’embauche sur 10 estiment que les entreprises doivent considérer prioritairement leurs actions sociales et environnementales.
– Harris Interactive pour Mouvement Impact France, 2022
Des congés éco-responsables encore peu encadrés
Si l’intention est louable, ces nouveaux congés responsables soulèvent encore de nombreuses questions pratiques et juridiques. Comment contrôler la véracité des justificatifs fournis par les salariés ? Quelles sont les destinations éligibles ? Comment s’articulent ces jours de congé avec les autres dispositifs existants (RTT, congés payés…) ?
Pour l’heure, les modalités d’attribution des TTR sont fixées à la discrétion de chaque employeur, sans cadre légal spécifique. C’est pourquoi les spécialistes plaident pour une meilleure reconnaissance et un encadrement de ces initiatives vertueuses, par exemple via la directive européenne CSRD sur la transparence des entreprises en matière de durabilité.
L’exemple à suivre du Royaume-Uni ?
Nos voisins britanniques ont déjà une longueur d’avance sur le sujet. Dès fin 2019, la fondation 10:10 a lancé le programme “Climate Perks” qui offre aux salariés participants deux jours de congés additionnels par an pour effectuer leurs voyages personnels en transport bas-carbone.
D’après la responsable du dispositif Sarah Howden, il rassemble déjà 128 organisations adhérentes de tous horizons : cabinets d’avocats ou d’architectes, sociétés de conseil, agences gouvernementales, ONG… Preuve que la demande est forte du côté des employeurs comme des employés.
Vers une généralisation des congés verts ?
Si elles restent encore marginales, ces initiatives montrent que les entreprises prennent de plus en plus conscience de leur responsabilité dans la transition écologique, y compris sur les déplacements hors travail de leurs salariés. Dans un contexte de lutte contre le changement climatique, nul doute que les dispositifs de congés éco-responsables vont se multiplier dans les années à venir.
À condition bien sûr de trouver le bon équilibre entre incitation vertueuse et contrainte pour les salariés. Car tout le monde n’a pas forcément la possibilité ou l’envie de passer des heures dans un train plutôt que dans un avion pour partir en vacances. L’adhésion du plus grand nombre à ces nouveaux congés verts sera donc un enjeu majeur de leur généralisation.
Quelques mesures simples pour des voyages plus durables
En attendant que votre entreprise vous offre des jours de congés supplémentaires, voici quelques gestes faciles à adopter pour réduire l’empreinte carbone de vos déplacements :
- Privilégiez le train à l’avion dès que possible, surtout pour les trajets de moins de 4 heures
- Si l’avion est inévitable, choisissez des vols directs qui polluent moins que les vols avec escale
- Optez pour des hébergements éco-labellisés qui limitent leur impact environnemental
- Sur place, favorisez les transports en commun, la marche ou le vélo pour vous déplacer
- Compensez les émissions carbone incompressibles, par exemple via des projets certifiés
Des petits changements qui, mis bout à bout, peuvent faire une grande différence pour la planète, tout en vous faisant peut-être gagner des jours de vacances bonus. De quoi allier l’utile à l’agréable pour voyager en 2023 !