Vous souvenez-vous de ce sentiment de vide immense en mai 2004 quand Ross et Rachel se sont enfin retrouvés à l’aéroport et que les six amis ont posé leurs clés sur le comptoir de l’appartement violet ? On pleurait, on riait, on se disait que c’était la fin d’une ère. Et puis, comme un cadeau un peu bizarre du destin, on nous a annoncé qu’on allait suivre Joey à Los Angeles. Espoir, excitation… et puis la douche froide deux ans plus tard. La série s’arrête net. Huit épisodes restent dans les tiroirs. Vingt ans après, ces épisodes fantômes viennent enfin de réapparaître. Et croyez-moi, ils valent le détour.
Joey : le spin-off que personne n’attendait… et que tout le monde a fini par oublier
L’idée était pourtant belle sur le papier. Prendre le personnage le plus solaire, le plus naïf et le plus attachant de Friends et le lâcher dans la jungle hollywoodienne. Matt LeBlanc, auréolé du succès planétaire de Joey Tribbiani, accepte de rempiler seul. Sans Lisa Kudrow, sans Courteney Cox, sans les autres. Juste lui, sa sœur Gina (Drea de Matteo, tout juste oscarisée pour Les Soprano), son neveu surdoué Michael (Paulo Costanzo) et une agente complètement déjantée campée par une Jennifer Coolidge déjà irrésistible.
La saison 1 démarre fort. Les audiences sont correctes, les critiques mitigées mais bienveillantes. On rit des mésaventures de Joey qui tente de percer à Hollywood tout en vivant dans un appartement trop grand pour lui. On adore le duo qu’il forme avec son neveu intello. Et puis… petit à petit, le soufflé retombe. NBC déplace la série dans la grille, les téléspectateurs se dispersent. En mars 2006, c’est fini. La saison 2 est interrompue au 14e épisode. Game over.
Les huit épisodes que l’Amérique n’a jamais vus
Ce que beaucoup ignorent, c’est que la production avait déjà tourné les épisodes 15 à 22 de la saison 2. Huit épisodes complets, montés, prêts à diffuser. Quelques pays européens (l’Irlande, la Norvège, le Royaume-Uni) les ont montrés à l’époque. Mais aux États-Unis ? Rien. Zéro. Les fans américains ont vécu vingt ans avec une fin en suspens, Joey quittant une audition sans qu’on sache s’il allait enfin décrocher le rôle de sa vie.
Et puis, miracle de Noël avant l’heure : en cette fin novembre 2025, la chaîne officielle Friends sur YouTube vient de mettre en ligne l’intégralité de Joey, saison 2 comprise. Gratuitement. En HD. Avec sous-titres. Les huit épisodes maudits sont là, accessibles en deux clics.
Que se passe-t-il vraiment dans ces épisodes perdus ?
Attention, petit spoiler sans trop en dire : Joey touche le fond… puis remonte. On le voit enfin décrocher un rôle important dans une série médicale (clin d’œil évident). Sa relation avec Alex, sa voisine avocate, prend une tournure qu’on n’attendait pas du tout. Gina traverse une crise existentielle touchante. Michael, lui, vit sa première grande histoire d’amour compliquée. Et surtout, il y a cette scène finale, dans l’appartement de Venice Beach au coucher du soleil, où Joey prononce une réplique qui fait écho à la toute dernière phrase de Friends. Préparez les mouchoirs.
« J’ai passé dix ans à chercher l’amour à New York. Peut-être qu’à Los Angeles, je vais enfin apprendre à être heureux tout seul. »
Joey Tribbiani, saison 2 épisode 22
Cette phrase, jamais entendue par le public américain à l’époque, boucle vingt-deux ans d’histoire du personnage de la plus belle des manières.
Pourquoi Joey a-t-il échoué à l’époque ?
La question revient souvent. Comment une série portée par un personnage aussi populaire a-t-elle pu s’effondrer si vite ? Plusieurs raisons.
- Absence du groupe : Joey fonctionnait en bande. Seul, il perdait une partie de sa saveur.
- Tonalité différente : plus adulte, parfois plus sombre, loin de la légèreté de Friends.
- Concurrence féroce en 2005-2006 : Lost, Desperate Housewives, Grey’s Anatomy trustaient l’attention.
- Déprogrammation brutale : déplacée le vendredi soir, puis le mardi, la série a perdu son public initial.
Au final, Joey a été victime du syndrome du spin-off maudit. Sur des dizaines tentés dans l’histoire de la télé américaine, très peu ont survécu (franchise Law & Order et Frasier étant les grandes exceptions).
Et aujourd’hui, est-ce que ça tient encore la route ?
La réponse est oui… et non. Revu en 2025, Joey fait figure de série charmante, un peu datée dans ses blagues, mais incroyablement touchante. Matt LeBlanc y est bouleversant de sincérité. On sent qu’il porte le poids de dix ans de Friends sur les épaules et qu’il essaye, vraiment, de faire vivre autre chose à son personnage.
Jennifer Coolidge vole la vedette à chaque scène (et on comprend mieux pourquoi elle explose quinze ans plus tard avec The White Lotus). Drea de Matteo apporte une gravité inattendue. Quant à Paulo Costanzo, il forme avec LeBlanc un duo comique parfait.
Le cadeau de Noël parfait pour les fans de la première heure
En cette fin d’année 2025, alors que Friends fête ses 31 ans et que les objets du tournage continuent de partir à prix d’or aux enchères (le canapé orange du Central Perk a été adjugé 52 000 dollars l’an dernier), ces huit épisodes retrouvés tombent à pic.
C’est l’occasion de refermer une parenthèse laissée ouverte depuis vingt ans. De dire au revoir correctement à Joey Tribbiani. De rire encore à ses « How you doin’? » maladroits. Et peut-être de verser une petite larme en réalisant que, finalement, lui aussi a grandi.
Alors si vous avez cinq heures devant vous ce week-end, ouvrez YouTube, tapez « Joey full episodes », installez-vous confortablement, et laissez-vous porter une dernière fois par les aventures californiennes du plus attachant des New-Yorkais.
Parce qu’après tout, comme le disait si bien Joey dans le tout dernier plan de la série mère :
« C’est pas une fin. C’est juste… une nouvelle saison qui commence ailleurs. »
Vingt ans après, on peut enfin tourner la page. Merci Joey. Et how you doin’ ?
Bonus nostalgie : la chaîne YouTube officielle a aussi uploadé les bloopers des épisodes 15 à 22. Voir Matt LeBlanc et Jennifer Coolidge corpser pendant quatre minutes d’affilée est un trésor inestimable.
