Quand la fiction rencontre la triste réalité de l’alcoolisme… Un habitant de Charleroi multiplie depuis des années les appels farfelus aux services d’urgence de sa ville, en se faisant passer pour des personnages aussi célèbres qu’improbables. Dark Vador, le Capitaine Flam… Aucun héros de son enfance n’échappe à ses délires éthyliques. Un comportement qui exaspère les forces de l’ordre et la justice, confrontées à la récidive permanente de cet homme en grande souffrance.
Déjà condamné, il replonge à chaque sevrage
Frank (prénom d’emprunt) est malheureusement bien connu de la justice carolo. Depuis 2018, pas moins de quatre condamnations sont venues sanctionner son addiction au téléphone… et à la bouteille. Une première salve d’appels malveillants, pas moins de 30 en 2 heures, lui vaut un premier passage devant le tribunal en avril 2018. Mais les juges font preuve de clémence, en assortissant sa peine de prison d’un généreux sursis probatoire de 5 ans.
Las, à peine un mois plus tard, Frank craque à nouveau et décroche son combiné fatal pour harceler police-secours. Le costume est remisé au placard, mais les élucubrations alcoolisées sont toujours au rendez-vous. Re-condamnation immédiate, re-promesse de se ranger, re-belote quelques semaines plus tard… Le cycle sans fin d’un homme prisonnier du démon de midi.
Une chance de sevrage gâchée
Face à cette spirale dramatique mêlant alcoolisme chronique et harcèlement téléphonique, la justice tente en 2019 une approche innovante. Frank se voit offrir une place au sein de la chambre de traitement de la toxicomanie (CTT) de Charleroi, un programme visant à soigner sa profonde dépendance alcoolique. Sevrage rime avec espoir, et le prévenu jure devant les juges qu’on ne l’y reprendra plus.
Je ne boirai plus jamais, et j’arrête pour de bon d’embêter le 100 !
– Frank, un prévenu pas si repenti que ça
Mais les belles promesses n’engagent que ceux qui y croient. Quelques mois plus tard, c’est le drame : non seulement Frank a rechuté dans l’alcool, mais il a surtout récidivé dans le harcèlement des services de secours. Pas moins de 35 appels malveillants recensés en l’espace de 24h les 15 et 16 avril derniers ! De quoi faire sortir de ses gonds le substitut du procureur :
Il a traité nos opérateurs d’abrutis, dragué grossièrement une policière, et même prévenu qu’il allait manger ! Ce comportement est intolérable et doit cesser.
– Le substitut Brichet, excédé par l’attitude du prévenu
Un nouveau sursis… jusqu’à la prochaine rechute ?
Initialement prévu ce mardi, le jugement de Frank a finalement été reporté au 25 juin prochain. Il faut dire qu’entre-temps, le prévenu a réussi l’exploit d’ouvrir un nouveau dossier, pour des faits similaires ! Le parquet a donc demandé la jonction des deux affaires, afin que la sanction soit cette fois à la hauteur des troubles comportementaux de cet Haddock des temps modernes.
En attendant, gageons que les forces de l’ordre de Charleroi scruteront leur standard avec angoisse d’ici le mois de juin. Au premier coup de fil loufoque, nul doute qu’ils reconnaitront illico la voix de leur harceleur favori. D’ici là, souhaitons que Frank parvienne enfin à vaincre ses démons. Sa sanction mentale en dépend, autant que la tranquillité des services d’urgence carolos !
Les appels malveillants, un fléau qui gangrène les secours
Si le cas de ce Carolo multi-récidiviste peut prêter à sourire, les appels malveillants constituent un véritable fléau pour les services de secours. En mobilisant des moyens pour des interventions factices, ces canulars téléphoniques mettent potentiellement en danger des vies. Petit tour d’horizon d’un phénomène inquiétant :
- 🚨 En France, les pompiers reçoivent plus de 3 millions d’appels abusifs par an, soit près de 30% des appels au 18 !
- 🚓 Côté police, on estime que 15 à 20% des interventions font suite à de fausses alertes.
- ⚕️ Même constat chez les urgentistes : les appels non justifiés encombrent les standards du SAMU.
Au-delà de l’exaspération légitime des services concernés, ces dérives interrogent le rapport de nos sociétés aux numéros d’urgence. Mal informés sur leur vraie fonction, trop d’usagers les assimilent à des hotlines polyvalentes pour tous les tracas du quotidien. Une confusion qui peut virer au drame, dans le cas de véritables urgences vitales retardées par des lignes saturées d’appels abusifs.
Les pouvoirs publics cherchent des parades, entre campagnes de sensibilisation et durcissement des sanctions. Car derrière ces abus se cachent parfois de vraies détresses humaines, comme cet homme seul qui appelait les pompiers pour… un peu de compagnie. Un signal d’alarme pour mieux repérer et accompagner ces naufragés de nos villes.
La morale de cette histoire ? Derrière le fait divers sordide, sachons entrevoir la part d’humanité. Même Dark Vador a droit à une dernière chance de rédemption !