L’accord migratoire entre l’Italie et l’Albanie, présenté comme un modèle par le gouvernement de Giorgia Meloni, vient de subir un revers cinglant. Un tribunal italien a invalidé la rétention de 12 demandeurs d’asile envoyés en Albanie, les jugeant inaptes aux critères fixés. Une décision qui soulève de sérieuses questions sur la légalité et l’éthique de cette politique controversée.
Un accord remis en cause par la justice italienne
Mercredi dernier, 16 migrants originaires du Bangladesh et d’Égypte avaient été transférés vers le port albanais de Shengjin, en vertu de l’accord passé entre Rome et Tirana. Mais très vite, quatre d’entre eux, jugés « vulnérables », ont dû être renvoyés en Italie. Les douze autres ont suivi le même chemin samedi, après que des juges de la section des affaires migratoires du tribunal de Rome aient invalidé leur rétention.
Pour justifier cette décision, le tribunal s’est appuyé sur un récent arrêt de la Cour européenne de justice concernant les pays de provenance considérés comme « sûrs ». Selon les juges, les migrants ne remplissaient pas les critères permettant leur rétention en Albanie et devaient donc être renvoyés en Italie.
Un coup dur pour la politique migratoire de Meloni
Cette décision constitue un revers majeur pour le gouvernement ultra-conservateur de Giorgia Meloni, qui avait fait de la lutte contre l’immigration irrégulière un de ses chevaux de bataille. L’accord avec l’Albanie, d’une durée de 5 ans, était présenté comme un modèle à suivre pour les partenaires européens de l’Italie.
Il prévoyait le transfert des hommes adultes interceptés par les autorités italiennes vers des centres de rétention en Albanie, pour identification et traitement de leur demande d’asile. Un processus qui s’est avéré plus complexe que prévu, au vu des récents événements.
Des failles mises en lumière
Au-delà du cas individuel de ces 12 migrants, c’est toute la logique de l’accord italo-albanais qui est remise en question. Comment s’assurer que les droits des demandeurs d’asile seront respectés ? Quels sont les critères réels pour juger de leur « vulnérabilité » ? Et surtout, cet accord est-il vraiment compatible avec le droit européen et international ?
Autant de questions qui viennent s’ajouter aux critiques déjà formulées par les ONG et associations de défense des droits humains. Elles dénoncent un accord « inhumain », qui vise à externaliser le traitement des demandes d’asile sans garanties suffisantes pour les personnes concernées.
Un dossier brûlant pour le gouvernement italien
Pour le gouvernement Meloni, ce revers judiciaire tombe au plus mal. Il intervient alors que l’Italie fait face à une pression migratoire accrue, avec une augmentation de 115% des arrivées par la Méditerranée centrale au premier trimestre 2024.
La Première ministre, qui a fait de la fermeté sur ce dossier un marqueur politique, se retrouve en difficulté. D’autant que ses partenaires européens, à commencer par la France, regardent d’un œil critique sa politique migratoire jugée trop dure.
Il y a fort à parier que cet épisode ne soit qu’un premier accroc dans la mise en œuvre de l’accord avec l’Albanie. Le gouvernement italien va devoir revoir sa copie, sous peine de voir sa crédibilité écornée, tant sur le plan national qu’européen. La question migratoire, plus que jamais, s’annonce comme un des défis majeurs de son mandat.