Les élections présidentielles en Iran ont réservé une surprise de taille ce samedi 6 juillet 2024. Massoud Pezeshkian, un député réformateur de 69 ans, l’a emporté face à l’ultraconservateur Saïd Jalili. Avec plus de 16 millions de voix sur les 30 millions de bulletins dépouillés, Pezeshkian semble avoir convaincu les Iraniens avec son programme d’ouverture vers l’Occident.
Un scrutin sous haute tension
Ce scrutin présidentiel anticipé intervenait dans un contexte particulièrement tendu en Iran :
- Décès soudain du président Ebrahim Raïssi en mai dernier
- Mécontentement populaire face à la situation économique dégradée
- Vague de contestation fin 2022 suite à la mort de Mahsa Amini
- Tensions diplomatiques persistantes avec les pays occidentaux
Malgré une forte abstention au premier tour, la participation a atteint près de 50% pour ce second tour décisif. Un engouement qui témoigne de l’enjeu crucial de cette élection pour l’avenir de l’Iran.
Pezeshkian, l’outsider réformateur
Peu connu du grand public jusqu’alors, Massoud Pezeshkian a créé la surprise en s’imposant face aux poids lourds du régime. Médecin de formation, ce député de Tabriz s’est forgé une réputation d’homme intègre et proche du peuple. Veuf depuis 1993, il a élevé seul ses trois enfants, une histoire personnelle qui a ému de nombreux Iraniens.
Nous tendrons la main de l’amitié à tout le monde (…) nous devrions utiliser tout le monde pour le progrès du pays.
Massoud Pezeshkian, lors de sa première allocution
Son programme met l’accent sur l’apaisement et l’ouverture, aussi bien en interne que sur la scène internationale. Pezeshkian a reçu le soutien des anciens présidents réformateur et modéré Khatami et Rohani. Mais son élection suscite aussi la méfiance des ultraconservateurs et d’une partie de l’opposition.
Renouer le dialogue avec l’Occident
La victoire de Massoud Pezeshkian pourrait marquer un tournant dans les relations de l’Iran avec les pays occidentaux, et en premier lieu les États-Unis. Le nouveau président élu appelle à des « relations constructives » afin de « sortir l’Iran de son isolement ».
Parmi les dossiers brûlants :
- La relance de l’accord sur le nucléaire iranien
- La levée des sanctions économiques américaines
- L’apaisement des tensions régionales (Yémen, Syrie, Liban…)
Mais ce virage à 180 degrés voulu par Pezeshkian risque de se heurter à de fortes résistances en interne, notamment du guide suprême Ali Khamenei qui contrôle la politique étrangère. Les ultraconservateurs iraniens restent très méfiants à l’égard de Washington, « l’ennemi juré ».
Des pouvoirs limités pour le président
Au-delà des défis diplomatiques, Massoud Pezeshkian devra aussi composer avec les contraintes du système politique iranien. En effet, le président n’a que des pouvoirs restreints en Iran, où les grandes orientations sont dictées par le guide suprême Ali Khamenei.
Le premier test pour le nouvel exécutif sera de former un gouvernement, en obtenant l’aval du Parlement dominé par les conservateurs. Le soutien populaire dont bénéficie Pezeshkian sera un atout, mais les luttes de pouvoir s’annoncent intenses à Téhéran.
On ne peut pas construire un mur autour du pays.
Farzad, un électeur de 52 ans
Le nouveau président devra aussi répondre aux attentes démocratiques et sociétales de sa base électorale. Des sujets sensibles comme le port obligatoire du voile ou la liberté d’expression seront scrutés de près.
L’élection surprise de Massoud Pezeshkian ouvre une nouvelle page pour l’Iran. Mais le chemin vers le changement s’annonce semé d’embûches, entre résistances internes et défis géopolitiques. Les premiers pas du président réformateur seront déterminants pour l’avenir d’un Iran tiraillé entre ouverture et conservatisme.
