Dans un geste fort, l’Unesco vient de classer le rubab, luth traditionnel afghan, au patrimoine culturel immatériel de l’humanité. Une reconnaissance d’autant plus symbolique que depuis leur retour au pouvoir en août 2021, le régime taliban a interdit la pratique de la musique en Afghanistan, faisant du rubab un instrument proscrit.
L’art de fabriquer et de jouer du rubab reconnu malgré l’oppression
Fabriqué en bois de mûrier séché et doté de 6 à 12 cordes, le rubab est l’un des plus anciens instruments de musique d’Asie centrale. Omniprésent dans la poésie et la littérature afghanes, il incarne un héritage culturel partagé entre l’Afghanistan, l’Iran, le Tadjikistan et l’Ouzbékistan.
Mais en Afghanistan, plus aucune fête ni mariage ne résonne des notes du rubab. Les talibans ont saccagé de nombreux instruments et menacent musiciens et chanteurs. Certains, comme Fawad Andarabi, ont même été abattus pour avoir pratiqué une musique jugée « non islamique ».
Des musiciens afghans témoignent : « La joie a été soustraite à cette nation »
La musique ne disparaît jamais. Comme on dit, il ne peut y avoir de mort sans pleurs et de mariage sans musique.
Un joueur de rubab de Kaboul dont l’instrument a été détruit par la police
Mohsen, membre d’une association de musiciens, est amer : « La joie a été soustraite à cette nation. » De nombreux artistes ont fui à l’étranger. Ceux qui restent sont réduits à déclamer des chants religieux ou de la poésie.
L’Unesco veut préserver ce patrimoine culturel menacé
Face à cette situation dramatique, l’inscription du rubab au patrimoine immatériel est un message d’espoir. L’Unesco cherche ainsi à sauvegarder les savoirs liés à la fabrication et au jeu de cet instrument emblématique.
Une source proche du dossier explique : « En classant le rubab, l’Unesco montre que l’art et la culture afghane continuent d’exister malgré la répression. C’est une façon de soutenir les artistes en exil et ceux qui résistent encore sur place. »
Les artistes afghans veulent croire en l’avenir
Najib, un luthier réfugié en Allemagne, garde espoir : « Tant que des Afghans fabriqueront et joueront du rubab dans le monde entier, cet art vivra. Les talibans ne peuvent pas éteindre la musique. »
Au sein de la diaspora, des initiatives fleurissent pour préserver ce patrimoine. Des cours de rubab sont donnés aux plus jeunes, des concerts et enregistrements organisés.
Et en Afghanistan, malgré les menaces, des passionnés cachent précieusement leur instrument. Prêts, dès que possible, à faire résonner à nouveau la mélodie de la liberté.