L’annonce de l’installation prochaine d’un centre d’accueil pour mineurs isolés étrangers dans la commune d’Écully, proche de Lyon, fait l’objet d’une vive polémique depuis plusieurs mois. Ce projet, porté par la métropole de Lyon, se heurte à l’opposition ferme du maire de la commune, entraînant un bras de fer politique dont l’issue reste incertaine à ce jour.
Un projet controversé dès son lancement
C’est en juillet dernier que Sébastien Michel, maire d’Écully, a été informé du projet d’ouverture d’un centre d’hébergement pour mineurs étrangers isolés au sein d’un ancien bâtiment d’école d’ingénieurs de sa commune. Porté par la métropole de Lyon, ce centre de 70 places vise à accueillir des jeunes en attente de prise en charge pour déterminer leur statut.
Dès l’annonce du projet, le maire a exprimé son opposition, jugeant le site choisi inadapté car trop éloigné du centre de l’agglomération et des lieux de prise en charge des jeunes. Il dénonce également un manque de concertation, estimant avoir été mis devant le fait accompli en plein été.
Le maire refuse de délivrer le permis de travaux
Concrètement, Sébastien Michel a choisi de bloquer le projet en refusant de délivrer le permis de travaux nécessaire à la réhabilitation de l’ancien bâtiment qui doit accueillir le centre. Une décision motivée officiellement par des raisons techniques, mais qui revêt une dimension éminemment politique.
En face, le président écologiste de la métropole, Bruno Bernard, dénonce une décision « anti-républicaine » et un refus d’appliquer la loi pour des raisons idéologiques. Il pointe le coût de ce blocage pour la collectivité, chiffré en dizaines de milliers d’euros de nuitées d’hôtel pour les jeunes en attente de prise en charge.
L’affaire prend une tournure nationale
Très vite, ce bras de fer local prend une ampleur nationale. D’après des informations obtenues par notre rédaction, Bruno Retailleau, ministre de l’Intérieur, serait même intervenu personnellement auprès de la préfecture pour que le permis de travaux ne soit pas délivré contre l’avis du maire. Une implication qui illustre la dimension politique de ce dossier sensible.
Les discours xénophobes et stigmatisants de la droite locale sont inadmissibles. En parlant de « sécurité » ou de « délinquance » à propos de jeunes migrants vulnérables, ils s’alignent sur le Rassemblement National.
Bruno Bernard, président de la Métropole de Lyon
Un sujet clivant dans un contexte électoral tendu
Au-delà du projet en lui-même, cette polémique illustre les profondes divergences entre une métropole dirigée par une majorité de gauche et des communes de l’ouest lyonnais traditionnellement ancrées à droite. La question de l’accueil des mineurs isolés cristallise les tensions, dans un contexte où leur nombre a triplé en un an dans la métropole, dépassant les 3000 jeunes pris en charge.
Alors que doivent se tenir les élections métropolitaines en 2026, certains y voient déjà les prémices d’une bataille électorale à venir. Bruno Bernard et Sébastien Michel, pressentis pour être les têtes de liste de leur camp respectif, fourbissent leurs armes sur un sujet qui ne manquera pas d’animer la campagne.
Un dossier qui illustre la crise de l’accueil des mineurs isolés
Au-delà du cas d’Écully, c’est toute la problématique de l’accueil des mineurs non accompagnés qui se trouve posée à travers cette affaire. Avec une augmentation de près de 150% du nombre de jeunes pris en charge en un an, les départements et métropoles sont confrontés à un véritable défi pour assurer leur hébergement et leur suivi dans de bonnes conditions.
Face à l’urgence, les réponses apportées sont souvent sources de crispations avec les élus locaux. L’État est régulièrement pointé du doigt pour son manque d’anticipation et de soutien face à un phénomène qui s’amplifie d’année en année.
Un sujet complexe qui nécessite une réponse coordonnée
Mais au-delà des polémiques, c’est un véritable besoin de coordination qui s’exprime entre l’État, les départements et les communes pour faire face à cet enjeu. Car derrière les batailles politiques, c’est le sort de milliers de jeunes vulnérables, souvent victimes de traumatismes, qui se joue.
Pour les associations comme Forum Réfugiés, qui doit gérer le futur centre d’Écully, l’urgence est d’abord de trouver des solutions d’accueil dignes et adaptées. Un défi de plus en plus difficile à relever face à la défiance grandissante d’élus locaux inquiets des réactions de leur population.
L’avenir du projet de centre d’Écully reste donc plus que jamais en suspens à ce jour. Mais au-delà, c’est toute la politique d’accueil des mineurs isolés qui devra être repensée pour éviter que ce type de polémique ne se multiplie sur le territoire. Un chantier aussi urgent que sensible.