Depuis vendredi dernier, la Turquie a pris la décision controversée de bloquer l’accès à Instagram sur son territoire. Après quatre jours de suspension, les autorités turques ont finalement convoqué les responsables du célèbre réseau social pour une rencontre cruciale ce lundi. Au cœur des discussions : les « contenus criminels » pointés du doigt par Ankara comme justification du blocage. Mais au-delà des questions de censure et de liberté d’expression, cette décision pourrait avoir de lourdes conséquences économiques pour le pays.
Instagram, pilier du commerce en ligne en Turquie
Avec entre 50 et 60 millions d’utilisateurs turcs selon les estimations, Instagram est devenu ces dernières années un véritable moteur pour le commerce électronique dans le pays. D’après Emre Ekmekçi, vice-président de l’Association des opérateurs du e-commerce, près de 10% des ventes en ligne s’effectueraient directement via la plateforme et les réseaux sociaux, générant un chiffre d’affaires quotidien de 930 millions de livres turques, soit plus de 25 millions d’euros.
Le blocage d’Instagram risque de coûter 1,9 milliard de livres turques, soit près de 57 millions de dollars, par jour au pays.
Emre Ekmekçi, vice-président de l’Association des opérateurs du e-commerce
Un coup dur pour les PME et les influenceurs
Cette suspension brutale inquiète particulièrement les petites et moyennes entreprises turques, qui ont massivement investi les réseaux sociaux ces dernières années pour promouvoir leurs produits et toucher de nouveaux clients. Beaucoup craignent une chute drastique de leur activité dans les jours à venir. Même constat pour les nombreux influenceurs et créateurs de contenus turcs, qui ont fait d’Instagram leur principal outil de travail et voient leur source de revenus menacée.
Face à cette situation préoccupante, les représentants du secteur appellent les autorités à trouver rapidement une solution pour rétablir l’accès à la plateforme. Car chaque jour de blocage supplémentaire risque d’aggraver un peu plus les pertes économiques et de fragiliser tout un écosystème entrepreneurial.
Quel avenir pour les réseaux sociaux en Turquie ?
Au-delà de l’impact à court terme, cette décision interroge sur la place des réseaux sociaux en Turquie et la volonté de contrôle des autorités. Le gouvernement a justifié ce blocage par la présence de contenus jugés inappropriés, sans donner plus de précisions. Une politique de censure dénoncée par de nombreux défenseurs de la liberté d’expression.
La rencontre de ce lundi entre les responsables d’Instagram et le ministre turc en charge du numérique sera donc décisive. Au menu des discussions, les demandes d’Ankara pour un meilleur contrôle des publications et un retrait plus systématique des contenus problématiques. Reste à savoir si un compromis pourra être trouvé, alors que Meta, la maison-mère d’Instagram, a déjà exprimé ses réserves face à ces exigences gouvernementales.
Une chose est sûre : l’avenir d’Instagram et plus largement des réseaux sociaux en Turquie est aujourd’hui en jeu. Et avec lui, c’est toute une économie numérique florissante qui pourrait être durablement affectée par les décisions politiques à venir.