Le rejet par le président américain sortant Joe Biden du rachat à 14,9 milliards de dollars de U.S. Steel par son concurrent japonais Nippon Steel a provoqué de vives inquiétudes au Japon, poussant le Premier ministre Shigeru Ishiba à exprimer ses préoccupations directement à son homologue lors d’une récente discussion.
Un blocage controversé au nom de la sécurité nationale
A quelques jours de son départ de la Maison Blanche, le locataire sortant a choisi d’invoquer la sécurité nationale pour empêcher cette opération, une décision aussitôt contestée par les deux groupes sidérurgiques devant la justice américaine. Nippon Steel et U.S. Steel ont dénoncé une ingérence illégale, accusant Biden d’avoir ignoré l’État de droit pour s’attirer les faveurs des syndicats dans une optique électoraliste.
U.S. Steel en difficulté face à la menace chinoise
Pour le sidérurgiste américain, en proie à des difficultés, ce rapprochement avec le géant nippon représentait pourtant un moyen de faire face à la concurrence de la Chine et d’assurer sa pérennité. Faute de ce rachat, U.S. Steel se verrait contraint de renoncer à des investissements cruciaux de modernisation, au risque de devoir recourir à des plans sociaux et des fermetures d’aciéries.
Sursis temporaire et craintes pour l’alliance nippo-américaine
Si les deux groupes ont obtenu un sursis jusqu’en juin pour formellement enterrer le projet, la décision fragilise les relations entre Washington et Tokyo. Le chef de la diplomatie japonaise Takeshi Iwaya a souligné l’importance de gérer ce dossier de manière à préserver l’alliance entre les deux pays, le Japon étant le premier investisseur étranger aux États-Unis avec 783,3 milliards de dollars en 2023.
De vives préoccupations s’élèvent non seulement au Japon mais aussi dans les milieux d’affaires américains et j’ai exhorté Joe Biden à dissiper ces sentiments.
– Shigeru Ishiba, Premier ministre japonais
L’importance des investissements japonais menacée
Selon la Chambre de commerce américaine, les investissements nippons soutiennent près d’un million d’emplois aux États-Unis. Toyota, par exemple, compte 49 000 employés dans ses dix usines sur le sol américain. Cette décision pourrait refroidir les ardeurs des entreprises japonaises et remettre en cause cette relation économique privilégiée.
Même si un compromis reste possible d’ici juin, cet épisode illustre la complexité des liens économiques et stratégiques entre les États-Unis et le Japon, soumis aux aléas de la politique intérieure et des tensions géopolitiques avec la Chine. Il met aussi en lumière les défis auxquels fait face la sidérurgie américaine, tiraillée entre impératifs de compétitivité et tentation du protectionnisme.