Imaginez-vous réveillé au milieu de la nuit par un bruit assourdissant : ce n’est pas la pluie qui tombe sur le toit, c’est l’eau qui monte déjà dans votre salon. C’est la réalité brutale que vivent des centaines de milliers d’habitants du sud de la Thaïlande depuis plusieurs jours.
Le bilan humain ne cesse de s’alourdir et, ce mercredi, les autorités ont confirmé un chiffre qui donne le vertige : au moins 33 personnes ont perdu la vie dans sept provinces touchées par des inondations d’une violence exceptionnelle.
Une catastrophe qui frappe de plein fouet le sud thaïlandais
Ce n’est pas une simple saison des pluies un peu plus intense que d’habitude. Les précipitations qui s’abattent depuis plus d’une semaine sur le sud du pays ont transformé des villes entières en lacs de boue. Les rues sont devenues des rivières, les rez-de-chaussée des maisons ont disparu sous des eaux brunâtres et chargées de débris.
Parmi les zones les plus sinistrées, la province de Songkhla concentre tous les regards. L’état d’urgence y a été décrété dès mardi. Et pour cause : la ville de Hat Yai, véritable plaque tournante touristique et commerciale, est littéralement noyée.
Hat Yai, la ville engloutie
Ceux qui connaissent Hat Yai pour ses marchés animés et ses hôtels accueillants ont du mal à reconnaître la cité aujourd’hui. Les images qui circulent montrent des scènes irréelles : des pick-up de l’armée avancent péniblement dans des rues où l’eau atteint parfois la taille d’un homme adulte.
Des sauveteurs en combinaison orange utilisent des bateaux pneumatiques, des jet-skis et même des camions militaires pour atteindre les habitants coincés chez eux. Plus de 10 000 personnes ont déjà été évacuées rien que dans la province de Songkhla.
« Le niveau de l’eau devrait baisser dans le sud »
Siripong Angkasakulkiat, porte-parole du gouvernement thaïlandais
Cette phrase, prononcée mercredi, apporte un mince espoir. Mais sur le terrain, nombreux sont ceux qui restent prudents : les prévisions météo annoncent encore des averses dans les prochains jours.
Un bilan humain particulièrement lourd
Les 33 victimes recensées sont mortes dans des circonstances tragiques. Les inondations soudaines – ces fameux « flash floods » – ont surpris de nombreuses personnes en pleine nuit. D’autres ont été électrocutées par des câbles arrachés ou se sont noyées en tentant de mettre leurs biens à l’abri.
Derrière ce chiffre officiel, il y a des familles brisées, des enfants qui ont tout perdu, des personnes âgées évacuées en urgence vers des hôpitaux déjà saturés.
L’armée thaïlandaise a déployé des moyens exceptionnels : un porte-avions a même été mobilisé pour servir de base logistique et des hélicoptères tournoient sans relâche pour transporter les blessés les plus graves.
Sept provinces sous l’eau
Ce ne sont pas seulement Songkhla et Hat Yai qui souffrent. Sept provinces du sud sont officiellement touchées, soit plusieurs millions d’habitants directement exposés. Les autorités parlent d’une des pires inondations depuis plus d’une décennie dans cette région.
- Des routes coupées sur des centaines de kilomètres
- Des écoles fermées jusqu’à nouvel ordre
- Des hôpitaux qui fonctionnent en mode dégradé
- Des cultures agricoles entièrement détruites
- Des milliers d’animaux d’élevage emportés par les eaux
Le département de prévention et de gestion des catastrophes suit la situation heure par heure. Les centres d’hébergement d’urgence tournent à plein régime.
Le réchauffement climatique en toile de fond
La Thaïlande est habituée à la mousson. Chaque année, de juin à septembre, les pluies abondantes font partie du paysage. Mais ce que vivent les Thaïlandais aujourd’hui dépasse largement les standards habituels.
Les scientifiques ne cessent de le répéter : pour chaque degré supplémentaire de réchauffement, l’atmosphère peut contenir 7 % d’humidité en plus. Résultat : quand il pleut, il pleut beaucoup plus fort, beaucoup plus longtemps et de façon beaucoup plus destructrice.
Ces événements extrêmes, autrefois considérés comme exceptionnels, tendent à devenir la nouvelle norme dans de nombreuses régions du globe, et l’Asie du Sud-Est paye un lourd tribut.
La Malaisie voisine également touchée
La Thaïlande n’est pas seule. Juste de l’autre côté de la frontière, la Malaisie fait face à une situation presque aussi dramatique. Huit États sont concernés par des inondations majeures.
Plus de 27 000 personnes ont dû être évacuées vers des abris temporaires cette semaine. Un décès a été signalé dans l’État du Kelantan, au nord-est du pays.
La saison de la mousson, qui s’étend de novembre à mars en Malaisie, est particulièrement active cette année. Et les prévisions ne sont guère encourageantes pour les prochains jours.
Des touristes malaisiens bloqués en Thaïlande
La situation a pris une dimension internationale inattendue. Des milliers de touristes malaisiens, venus passer quelques jours dans le sud thaïlandais, se sont retrouvés coincés dans leurs hôtels, les routes et les aéroports étant impraticables.
Le ministère malaisien des Affaires étrangères a suivi la situation de très près. Plus de 6 300 de ses ressortissants ont déjà pu regagner leur pays, souvent grâce à des convois organisés sous escorte.
Que nous réserve la suite ?
Le porte-parole du gouvernement thaïlandais veut rester optimiste : le niveau de l’eau devrait commencer à baisser dans les prochains jours. Mais chacun sait que la décrue peut être aussi destructrice que la montée des eaux.
La boue, les bâtiments endommagés, les infrastructures électriques à reconstruire, les maladies liées à l’eau stagnante… La phase de reconstruction s’annonce longue et coûteuse.
Et surtout, une question demeure en suspens : jusqu’à quand allons-nous continuer à subir, année après année, des catastrophes de plus en plus violentes sans remettre en cause fondamentalement notre modèle climatique ?
Pour l’instant, dans le sud de la Thaïlande, l’urgence reste humaine. Sauver ceux qui peuvent encore l’être, héberger ceux qui ont tout perdu, et prier pour que la pluie, enfin, s’arrête.
Le sud de la Thaïlande nous rappelle brutalement que la nature, quand elle se déchaîne, ne fait pas de distinction entre riches et pauvres, touristes et locaux. Seule la solidarité peut alors faire la différence.
Les images de bateaux zigzaguant entre les immeubles, d’enfants transportés sur les épaules de soldats, de familles entières entassées dans des gymnases transformés en dortoirs resteront longtemps gravées dans les mémoires.
Et pendant que les secours s’organisent avec un courage admirable, une seule certitude demeure : la saison des pluies 2025 entrera malheureusement dans les annales comme l’une des plus meurtrières que la Thaïlande ait connues.









