Le paisible village de Chiva, dans la province de Valence en Espagne, offre un spectacle de désolation quatre jours après les inondations dévastatrices qui ont endeuillé le sud-est du pays, faisant plus de 200 victimes selon des sources locales. Entre bâtiments effondrés, rues transformées en torrents de boue et une population en détresse, Chiva panse difficilement ses plaies.
Une colère légitime face à l’inaction des autorités
Pour Oscar Hernandez, 75 ans, l’heure est à la colère. Ce natif de Chiva ne décolère pas contre la passivité des autorités régionales face à l’ampleur du drame :
Ici, on est en train de crever. Je ne comprends pas qu’il n’y ait pas un moyen de tirer une balle dans la tête de l’administration.
Oscar Hernandez, habitant de Chiva
L’indignation de ce retraité est à la hauteur des dégâts subis. Sa propre maison est défigurée et des dizaines d’autres sont en ruine. Des cratères béants défigurent les rues et même l’église locale n’a pas été épargnée. Le comble de l’ironie ? Il affirme avoir reçu une alerte sur son portable… deux jours après les faits.
Des commerçants au bord du gouffre
Helena Danna Daniella, 39 ans, gérante d’un bar-restaurant local, tente tant bien que mal de remettre son commerce en état. Mais cette nuit d’enfer la hante encore :
Des gens, des voitures emportés… Ils vous demandaient de l’aide et vous ne pouviez rien faire, car sinon vous étiez emportés avec eux. C’est dans la tête, ça te rend fou.
Helena Danna Daniella, commerçante à Chiva
Après 7 ans d’activité, elle songe sérieusement à baisser définitivement le rideau si son établissement doit rester fermé, ce qui impliquerait le licenciement de ses employés.
L’angoisse de familles sinistrées
María José, mère de famille de 54 ans, contemple impuissante un groupe de jeunes bénévoles tentant de sauver les rares affaires épargnées par les flots dans sa maison ravagée. Bloquée 48h sans eau ni électricité, elle peine à réaliser l’étendue des dégâts.
Chaque jour on pleure davantage car on réalise le niveau des destructions.
María José, habitante de Chiva
Malgré l’intensité des pluies, elle déplore l’absence d’alerte préalable. Ce n’est qu’à 23h que les gendarmes l’ont prévenue du débordement de la rivière, trop tard pour évacuer sereinement.
La fatalité et la solidarité face au drame
Ramon, chauffeur poids-lourd, enrage contre le manque d’anticipation des pouvoirs publics. Selon lui, l’alerte aurait dû être déclenchée au moins 10h avant. Mais comme beaucoup ici, la colère laisse place à une forme de résignation face aux caprices de la nature.
Mario Silvestre, ancien cycliste de 84 ans, en a vu d’autres mais garde peu d’illusions. Entre des promesses d’aides qui tardent à se concrétiser et une reconstruction titanesque, il porte un regard fataliste sur la situation :
On parle de 300 millions d’euros… Des promesses qui, à la fin, sont oubliées. Je ne veux pas parler en mal de l’Espagne, mais c’est un fait.
Mario Silvestre, habitant de Chiva
Seule lueur d’espoir dans ce sombre tableau, l’arrivée spontanée de jeunes bénévoles venus de Valence prêter main forte aux sinistrés pour déblayer les gravats et tenter de sauver ce qui peut l’être encore.
Mais pour les 17000 habitants de Chiva, le chemin sera long avant de retrouver une vie normale. Entre colère légitime contre un manque de réactivité des autorités et un fatalisme né de la brutalité des éléments, la population tente de garder espoir malgré tout. L’heure est au deuil, au nettoyage des décombres et aux interrogations sur une reconstruction qui s’annonce longue et douloureuse. Les stigmates de ces inondations catastrophiques mettront du temps à s’effacer, dans les rues dévastées comme dans les mémoires meurtries des habitants de Chiva.