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Inde-Pakistan : L’Aide au Sri Lanka Bloquée par la Rivalité

Le Sri Lanka pleure ses 410 morts et 1,5 million de sinistrés après le cyclone Ditwah. Le Pakistan veut envoyer un avion d’aide d’urgence… mais l’Inde refuse le survol de son territoire. Jusqu’où ira cette rivalité même face à la détresse humaine ?

Imaginez un avion rempli de couvertures, de nourriture et de médicaments qui attend depuis plus de soixante heures sur le tarmac, moteur éteint, parce que deux pays voisins refusent de se parler. Ce n’est pas une fiction. C’est ce qui s’est passé cette semaine entre le Pakistan et l’Inde, alors que le Sri Lanka comptait déjà plus de quatre cents morts après le passage dévastateur du cyclone Ditwah.

Quand la haine prend le pas sur l’humanité

Le Sri Lanka traverse l’une des pires catastrophes naturelles de son histoire récente. Des pluies torrentielles ont transformé des provinces entières en lacs, emportant maisons, routes et espoirs. Pourtant, au milieu de ce chaos, un nouveau drame se joue dans le ciel : celui d’un avion humanitaire pakistanais cloué au sol par un simple refus administratif indien.

Cette scène illustre à quel point la rivalité entre New Delhi et Islamabad reste viscérale, même quand des vies sont en jeu.

Le cyclone Ditwah : une catastrophe sans précédent

Le cyclone Ditwah a frappé l’île avec une violence rare. En quelques jours, des quantités d’eau équivalant à plusieurs mois de pluie se sont abattues sur le pays. Les fleuves ont débordé, les barrages ont cédé, et des villages entiers ont été rayés de la carte.

Le bilan officiel fait état d’au moins 410 morts, mais les autorités craignent que le chiffre réel soit beaucoup plus élevé. Plus de 1,5 million de personnes sont sinistrées, sans abri, sans eau potable ni électricité.

C’est dans ce contexte d’urgence absolue que le Pakistan a décidé d’envoyer un avion spécial chargé d’aide humanitaire : tentes, médicaments, aliments de première nécessité.

Soixante heures d’attente sur le tarmac

L’avion a décollé, direction Colombo. Mais pour atteindre le Sri Lanka depuis le Pakistan par la voie la plus courte, il doit obligatoirement survoler le territoire indien. Or, depuis les affrontements de mai dernier parmi les plus graves depuis 1999, les deux pays maintiennent leurs espaces aériens fermés aux appareils de l’autre.

Islamabad demande donc une autorisation exceptionnelle, pour raisons humanitaires. New Delhi finit par répondre… mais avec des conditions jugées « totalement impossibles à respecter » par les Pakistanais : une fenêtre de quelques heures seulement, et sans autorisation pour le vol retour.

« L’avion spécial qui transporte l’aide humanitaire du Pakistan à destination du Sri Lanka est retardé depuis plus de soixante heures dans l’attente d’un feu vert de l’Inde »

Ministère pakistanais des Affaires étrangères

Soixante heures. Pendant ce temps, des enfants sri-lankais dorment sous la pluie.

Les deux versions des faits

Du côté indien, on affirme avoir accordé une autorisation « motivée par des raisons purement humanitaires » et on renvoie la balle : le Pakistan, lui aussi, maintient la fermeture de son espace aérien aux compagnies indiennes.

Islamabad rétorque que l’autorisation était inapplicable et accuse New Delhi de jouer la montre. Chacun campe sur ses positions, comme toujours.

En résumé :

  • Pakistan demande survol exceptionnel pour aide humanitaire
  • Inde accorde une autorisation limitée dans le temps
  • Pakistan juge les conditions intenables
  • L’avion reste au sol
  • 1,5 million de Sri-Lankais attendent toujours

Un conflit qui empoisonne tout depuis 1947

Cette querelle aérienne n’est que le dernier épisode d’une rivalité commencée à la partition de 1947. Le Cachemire, région himalayenne à majorité musulmane mais rattachée à l’Inde, reste le cœur du problème. Trois guerres, des dizaines d’accrochages, et une course à l’armement nucléaire ont suivi.

Au printemps dernier, un attentat au Cachemire revendiqué par un groupe basé au Pakistan a entraîné des frappes aériennes indiennes sur le sol pakistanais, suivies d’une riposte. Plus de 70 morts en quatre jours. Depuis, la ligne de contrôle est calme, mais la méfiance est totale.

Au point que même un geste humanitaire devient un champ de bataille diplomatique.

Le Sri Lanka, victime collatérale

Colombo, déjà débordé par l’ampleur de la catastrophe, se retrouve pris en otage entre ses deux grands voisins. L’Inde, traditionnellement proche du Sri Lanka, a été parmi les premiers pays à envoyer de l’aide par la mer et par des routes terrestres. Le Pakistan, lui, voulait montrer sa solidarité musulmane avec une partie de la population sri-lankaise.

Mais ce bras de fer aérien ternit l’image des deux pays et, surtout, retarde des secours qui pourraient sauver des vies.

Vers une désescalade possible ?

À l’heure où ces lignes sont écrites, on ignore si l’avion pakistanais a finalement pu décoller. Certains observateurs espèrent que la pression internationale finira par faire plier l’une des deux capitales.

Mais l’histoire a montré que la logique humanitaire pèse souvent peu face aux impératifs de fierté nationale et de sécurité perçue.

Une chose est sûre : tant que le nœud cachemiri ne sera pas dénoué, chaque occasion même la plus tragique sera prétexte à une nouvelle crispation entre l’Inde et le Pakistan.

Et ce sont toujours les plus faibles, ici les sinistrés sri-lankais, qui en paient le prix.

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