Depuis la mi-juillet, les nuits sont devenues un cauchemar éveillé pour les habitants du lieu-dit La Maisonneuve, un hameau cossus de la commune de Reignac en Gironde. Une série d’incendies criminels, sept au total, ont pris pour cible les haies de trois maisons du bourg, semant terreur et insomnies chez les riverains. En proie à une angoisse grandissante, ils ont décidé d’organiser des tours de garde nocturnes pour tenter de prendre sur le fait le pyromane qui semble les narguer.
Des nuits sous haute tension
« On ne dort plus la nuit ou alors très mal », témoigne Jean Nau, octogénaire dont la demeure a été visée par les flammes à plusieurs reprises. « Chaque soir, je veille de 23h à 4h du matin avec d’autres hommes du hameau. Notre forme physique tient encore le coup mais le moral est atteint. Cette peur constante, c’est épuisant nerveusement ».
Les trois maisons ciblées sont pourtant éloignées d’à peine 100 mètres les unes des autres. Les incendies se déclenchent systématiquement au cœur de la nuit, et ce malgré la surveillance accrue mise en place par les riverains. « Lors du dernier départ de feu, notre guetteur venait juste de s’assoupir quelques minutes, il était 2h20 », raconte un voisin. « Les personnes qui montent la garde semblent elles-mêmes surveillées. Le pyromane guette nos failles ».
Un suspect dans le collimateur
Les soupçons des habitants se portent sur un individu du hameau, « tout le monde sait de qui il s’agit » assure Jean Nau. Mais les preuves manquent pour confondre le suspect et les victimes redoutent un classement sans suite de l’enquête. « On n’est pas dupes sur l’identité de l’auteur mais maintenant il nous faut des preuves solides », insiste le vieil homme, fer de lance de la riposte locale.
Dès le mois de juillet, Jean Nau a alerté par courrier le procureur de Libourne et le sous-préfet sur l’escalade de violence qui couvait. Il craint qu’un drame ne survienne si un riverain excédé décide de se faire justice lui-même ou que le coupable ne passe à l’acte armé. Pierre Renou, maire de Reignac, appelle ses administrés au calme malgré un climat délétère : « On est tous inquiets mais il faut éviter la panique et la surenchère. Les pompiers et les gendarmes sont mobilisés, faisons-leur confiance ».
Une enquête qui piétine
Car une enquête a bien été ouverte par le parquet de Libourne pour « dégradation ou détérioration du bien d’autrui par un moyen dangereux pour les personnes » suite aux multiples plaintes déposées par les victimes. Les gendarmes ont accentué leurs patrouilles dans ce hameau d’ordinaire si tranquille où tout laisse présager des actes intentionnels.
« C’est une priorité pour nous mais pour l’instant nous n’avons pas assez d’éléments probants », confie une source proche du dossier. Les enquêteurs restent discrets sur leurs investigations mais ne cachent pas leurs difficultés à identifier formellement un suspect en l’absence de témoins directs ou de preuves matérielles irréfutables. Surtout, l’absence apparente de mobile vient compliquer leur tâche.
« Quel est le motif de l’auteur ? C’est l’alcool, la drogue et un esprit malade ! », s’emporte Jean Nau. Pour ce patriarche révolté, chaque jour sans interpellation fait craindre un embrasement incontrôlable. À La Maisonneuve, on retient son souffle en attendant que le coupable soit enfin mis hors d’état de nuire. Un dénouement que tous espèrent rapide, avant que l’irréparable ne soit commis.