Imaginez un tatami où deux géants s’affrontent, l’un invaincu depuis des décennies, l’autre un prodige déterminé à briser cette légende. Dans l’univers du judo, un nom émerge comme une menace sérieuse pour le roi incontesté, Teddy Riner : Inal Tasoev. Ce judoka russe, avec son style implacable et son palmarès impressionnant, incarne l’espoir d’une nouvelle ère dans la catégorie des poids lourds. Mais qui est cet homme qui ose défier une icône ?
Un Nouveau Titan dans l’Arène du Judo
Originaire de l’Ossétie du Nord-Alanie, une région montagneuse du Caucase, Inal Tasoev n’est pas un inconnu dans le monde du judo. À seulement 27 ans, il affiche un ratio de victoires qui frôle les 97 % par an, un exploit que peu de judokas peuvent revendiquer. Sa trajectoire, marquée par une médaille d’or mondiale partagée avec Riner en 2023 à Doha, fait de lui une figure incontournable. Mais derrière les chiffres, c’est son histoire, son style et ses ambitions qui captivent.
Des Montagnes du Caucase au Tatami Mondial
Le parcours de Tasoev commence dans un cadre austère, loin des projecteurs. Enfant, il arpente les forêts de son Ossétie natale, où la lutte libre est une tradition. À 12 ans, un coup de foudre pour le judo change sa vie. Influencé par des légendes comme Alexander Kareline, lutteur aux 887 victoires, Tasoev développe une discipline monacale. Ses premières compétitions en cadets et juniors le propulsent rapidement : quatre finales, trois médailles d’or et une d’argent.
Son arrivée au club de Saint-Pétersbourg, un bastion du judo russe, marque un tournant. Ce lieu, fréquenté par des figures politiques influentes, lui offre un cadre d’entraînement d’élite. Là, il peaufine sa technique, basée sur un sens du timing exceptionnel et une capacité à projeter ses adversaires avec une fluidité déconcertante.
Il projette sans effort apparent grâce à un sens parfait du timing.
Martti Puumalainen, champion d’Europe 2023
Le Duel Épique avec Teddy Riner
Teddy Riner, avec ses 14 titres olympiques et mondiaux, est une montagne à gravir. Pourtant, Tasoev a déjà ébranlé ce colosse. En 2023, lors des championnats du monde à Doha, il devient le premier à faire tomber Riner en finale d’un tournoi majeur. Une erreur d’arbitrage, corrigée trois jours plus tard, conduit à un titre partagé, une première historique. Ce moment, bien que controversé, a révélé la capacité de Tasoev à rivaliser avec les plus grands.
Leur rivalité ne date pas d’hier. En 2019, au Grand Chelem du Brésil, et en 2021, aux Masters du Qatar, Tasoev affrontait Riner avec un mélange de respect et d’appréhension. Aujourd’hui, il affirme avoir dépassé ce stade : “Mon approche est différente”, confie-t-il. Son objectif ? Prendre le trône des poids lourds.
Les Clés de la Rivalité
- Technique : Tasoev excelle dans le placement et l’action-réaction.
- Endurance : Ses victoires en golden score prouvent son cardio.
- Mental : Il transforme les échecs en opportunités.
Un Style qui Impressionne
Sur le tatami, Tasoev est une énigme. Son physique imposant, combiné à une agilité de ballerine, déroute ses adversaires. Martti Puumalainen, champion d’Europe, admet n’avoir trouvé aucune faille lors de leurs affrontements. Même Lukas Krpalek, double champion olympique, reconnaît l’absence de points faibles chez le Russe. Son secret ? Une science du placement et une efficacité redoutable en combat prolongé.
À Benidorm, lors d’un stage en mai 2025, Tasoev domine des médaillés européens et mondiaux avec une aisance déconcertante. Lucie Décosse, ancienne championne et coach française, s’émerveille : “Mais comment fait-il ?” Sa capacité à verticaliser puis renverser ses adversaires en fait un adversaire redouté.
C’est le seul aujourd’hui qui a toutes constitutionalismtoutes les armes pour battre Teddy.
Frédéric Lecanu, ex-judoka
Une Ombre Controversée
Malgré son talent, Tasoev ne fait pas l’unanimité. Ses liens avec l’armée russe et son club de Saint-Pétersbourg, associé à des figures proches du pouvoir, soulèvent des questions. Ses publications sur les réseaux sociaux, marquées par des soutiens implicites à l’effort militaire russe, ont compliqué sa participation aux JO de Paris 2024. Face aux restrictions du CIO, la Russie a boycotté l’événement, privant Tasoev d’une chance de briller.
Interrogé sur ces sujets, Tasoev esquive, préférant “laisser le tatami parler”. Cette posture divise : certains y voient une prudence nécessaire, d’autres une échappatoire. Ezio Gamba, ex-entraîneur de l’équipe russe, plaide pour une focalisation sur le sport, affirmant que l’équipe est “contre la guerre”.
Événement | Résultat |
---|---|
Mondiaux 2023 (Doha) | Or (partagé avec Riner) |
Europe 2024 (Monténégro) | Or |
Europe 2025 | Or |
Cap sur Los Angeles 2028
Les Jeux Olympiques de Los Angeles en 2028 sont dans le viseur de Tasoev. Après avoir manqué Tokyo et Paris, il rêve d’un face-à-face avec Riner sous les projecteurs. Lors des JO de Paris, où il était simple spectateur, il a observé Riner, notant son invincibilité mais aussi une froideur dans leurs interactions. “Dès le premier combat, j’ai su qu’il serait intouchable”, admet-il.
Pourtant, sa détermination reste intacte. Arsen Galstyan, champion olympique, loue son refus de fuir l’adversité. Anatoly Rakhline, président de son club, compare Tasoev à un funambule, capable de marcher sur la corde raide sans vaciller. Tête de série numéro 1 aux Mondiaux de Budapest en 2025, il s’entraîne avec une rigueur inégalée, prêt à saisir sa chance.
Un Avenir Plein de Promesses
Le parcours d’Inal Tasoev est celui d’un homme façonné par les défis. Son style, alliant puissance et finesse, en fait un adversaire unique. Mais au-delà du tatami, il devra naviguer dans un contexte géopolitique complexe. Saura-t-il transformer les obstacles en tremplins, comme il l’a toujours fait ?
En attendant, son palmarès parle pour lui : 18 podiums consécutifs depuis 2020, deux défaites en quatre ans, et une aura qui fait de chaque combat un événement. Le rendez-vous est pris pour 2028, où le duel avec Riner pourrait redéfinir l’histoire du judo.
Un champion, c’est comme un funambule : il n’y en a qu’un sur un million qui peut avancer sur la corde sans tomber.
Anatoly Rakhline
Le monde du judo retient son souffle. Inal Tasoev, avec son talent brut et sa résilience, est prêt à écrire un nouveau chapitre. Reste à savoir si ce chapitre marquera la fin du règne de Riner ou l’ascension d’un nouveau roi.