La chute d’Imran Khan, l’ancienne star du cricket devenue un opposant politique majeur au Pakistan, se poursuit. Vendredi, l’ex-Premier ministre pakistanais a été condamné à 14 ans de prison supplémentaires pour corruption dans une nouvelle affaire, portant sur des détournements de fonds de sa fondation Al-Qadir Trust. Un coup dur pour celui qui est déjà incarcéré et fait face à pas moins de 200 affaires judiciaires.
Malgré les pressions et les spéculations sur un possible accord avec l’armée pakistanaise, véritable faiseur de roi dans le pays, Khan reste inflexible. « Je ne passerai pas d’accord ni ne chercherait à alléger ma peine », a-t-il martelé depuis la salle d’audience improvisée dans la prison d’Adiala où il est détenu. À ses côtés, son épouse Bushra Bibi, anciennement sa conseillère spirituelle, a écopé de 7 ans de prison dans la même affaire.
Un bras de fer judiciaire et politique
Les avocats d’Imran Khan ont d’ores et déjà annoncé qu’ils feraient appel de cette condamnation, qu’ils jugent infondée et politiquement motivée. « Nous allons porter ce verdict en appel. Cette décision ne tiendra pas », a assuré Naeem Panjotha, un des conseils du parti Pakistan Tehreek-e-Insaf (PTI) fondé par Khan.
L’ancien Premier ministre, évincé du pouvoir en avril 2022 après 4 ans à la tête du gouvernement, est engagé dans une lutte ouverte contre l’armée pakistanaise depuis lors. Ses partisans organisent régulièrement des manifestations massives pour exiger sa libération, malgré les nombreuses condamnations prononcées à son encontre. Jusqu’à présent, Khan a réussi à faire annuler ou suspendre ces verdicts en appel.
Pression de l’armée et refus du compromis
D’après les observateurs, l’armée pakistanaise utilise ces procédures judiciaires comme moyen de pression pour contraindre Imran Khan à se retirer de la vie politique. Des rumeurs d’un possible accord avaient circulé ces derniers jours, mais l’intéressé les a fermement démenties.
Je n’ai jamais détourné de fonds, donc pourquoi devrais-je accepter des compromis ? Je ne me résignerai à aucun marché jusqu’à mon dernier souffle.
Imran Khan
La condamnation de Bushra Bibi, elle aussi écrouée à l’issue de l’audience, ajoute une pression supplémentaire sur Khan. Cette dernière avait pourtant été libérée en octobre dernier et avait mené une démonstration de force du PTI en novembre aux portes du quartier gouvernemental d’Islamabad. Son arrestation pourrait attiser la colère des partisans de Khan.
Une détention « arbitraire » selon l’ONU
En juillet, un panel d’experts de l’ONU avait qualifié d' »arbitraire » la détention d’Imran Khan et réclamé sa « libération immédiate ». Mais le gouvernement pakistanais n’a pas donné suite à ces recommandations. Le PTI, principale force d’opposition et premier groupe au Parlement, a été évincé de la coalition au pouvoir après la destitution de Khan.
Cette nouvelle condamnation risque d’aggraver les tensions politiques au Pakistan, 5ème pays le plus peuplé au monde avec plus de 240 millions d’habitants. Imran Khan, 70 ans, peut compter sur une base de soutiens fidèles, notamment chez les jeunes, malgré les efforts du pouvoir pour le marginaliser. Son bras de fer avec l’armée et la justice est loin d’être terminé.