En cette fin de semaine, le dossier brûlant de l’immigration est sur toutes les lèvres. Michel Barnier, premier ministre fraîchement nommé, et son ministre de l’Intérieur Bruno Retailleau ont décidé de prendre le taureau par les cornes en se rendant directement à la frontière franco-italienne, théâtre de tensions récurrentes ces derniers mois. Leur objectif : rencontrer leurs homologues transalpins pour définir une stratégie commune face à l’afflux de migrants.
Un déplacement sous haute surveillance
C’est sous haute sécurité que le convoi ministériel s’apprête à rallier Menton, dernière ville française avant l’Italie. Au programme, une réunion de travail avec deux poids lourds du gouvernement italien : Antonio Tajani, ministre des Affaires étrangères, et Matteo Piantedosi, son homologue de l’Intérieur. Deux proches de la Première ministre italienne Giorgia Meloni, connue pour sa fermeté sur les questions migratoires.
Après un déjeuner probablement expéditif vu l’importance des sujets à aborder, la délégation franco-italienne mettra le cap sur Vintimille, première ville italienne après la frontière. L’occasion de visiter le centre névralgique de la coopération policière et douanière entre les deux pays, installé à Ponte San Ludovico.
L’immigration irrégulière est un défi que la France et l’Italie doivent relever main dans la main.
– Un proche du dossier.
Barnier renoue avec sa fibre européenne
Si les deux ministres français reprendront ensuite la route de Menton pour une visite des locaux de la PAF (Police aux Frontières), Michel Barnier, lui, mettra à profit ce déplacement pour renouer avec sa fibre européenne. La veille, il aura en effet participé à Bruxelles à une réunion avec ses camarades du PPE, le parti de la droite européenne dont il est un membre éminent.
L’occasion pour lui de se poser en homme d’État sachant allier gestion des dossiers intérieurs épineux et stature internationale. Un positionnement subtil qui lui permettra peut-être d’exister dans le duo exécutif qu’il forme avec le Président Macron, sans trop le froisser.
Une unité franco-italienne contre les passeurs
Mais l’enjeu principal de ce sommet franco-italien reste la lutte contre les réseaux de passeurs qui profitent de la détresse des migrants. Paris et Rome ont d’ores et déjà convenu de créer une unité spéciale transfrontalière sur le modèle de celle existant entre la France et le Royaume-Uni.
Cette nouvelle “task force”, qui devrait être opérationnelle début 2025, aura pour mission de mieux partager les renseignements sur les filières d’immigration clandestine. Elle viendra épauler les effectifs déjà à pied d’œuvre des deux côtés des Alpes, alors que la région a enregistré une hausse marquée des tentatives de passages ces derniers mois.
Paris et Rome promettent la fermeté
Côté français, Bruno Retailleau va probablement profiter de ce déplacement pour détailler les mesures qu’il compte inclure dans son projet de loi immigration, comme l’allongement de 90 à 210 jours de la durée maximale de rétention pour les étrangers faisant l’objet d’une obligation de quitter le territoire.
Quant à l’Italie de Meloni, elle ne cache pas sa volonté de durcir le ton, comme en témoigne le récent accord conclu avec l’Albanie pour y renvoyer des migrants arrivés illégalement. Paris et Rome devraient d’ailleurs annoncer une trajectoire commune visant à renforcer les contrôles et faciliter les expulsions.
La France et l’Italie vont muscler leur arsenal anti-immigration en accélérant les procédures de renvoi.
– Une source diplomatique.
Alors, coup de com’ ou véritable tournant ? Une chose est sûre, en portant ensemble un discours de fermeté, Barnier et Retailleau envoient un message clair : ils ne laisseront rien passer. Ou presque. Car si les flux migratoires à la frontière franco-italienne font les gros titres, ils restent pour l’heure bien en-deçà de ceux observés dans d’autres régions d’Europe. Mais ça, c’est un autre débat.