Imaginez-vous, à plus de 75 ans, contraint d’attendre près de 30 heures sur un simple brancard dans un couloir d’hôpital bondé. C’est malheureusement le quotidien vécu par de nombreux patients âgés aux urgences du CHU de Brest cet été, comme le dénonce avec force la CGT à travers un outil choc : le “mur de la honte”.
127 patients de plus de 75 ans ont attendu en moyenne 23 heures sur un brancard
Installé devant l’hôpital par le syndicat, ce mur affiche des temps d’attente effarants subis par les patients les plus vulnérables. Jugez plutôt : entre le 10 juillet et le 7 août, pas moins de 127 patients âgés de plus de 75 ans ont attendu en moyenne 23 heures sur un simple brancard dans les couloirs des urgences. Parmi les cas les plus choquants, on relève :
- Une personne de 92 ans ayant passé 31 heures sur un brancard
- Un patient de 91 ans contraint d’attendre 29 heures
- Un autre de “seulement” 75 ans resté 30 heures sur un brancard
Des conditions d’accueil déplorables qui peuvent s’avérer dangereuses pour ces patients fragiles. Une récente étude de l’AP-HP et de l’Inserm a en effet montré que passer une nuit sur un brancard augmenterait de 40% le risque de mortalité pour les patients âgés.
Le parcours du combattant des patients âgés aux urgences
Si la situation est particulièrement critique pour les plus de 75 ans, qui représentent plus d’un tiers des passages quotidiens en cette période estivale, c’est parce que leur prise en charge est souvent plus complexe comme l’explique Stéphane Vielmas, infirmier et représentant CGT :
Les personnes âgées nécessitent de plus en plus de soins et une prise en charge de plus en plus longue avec de multiples examens comme des bilans sanguins, des scanners, etc. Des actes à la durée incompressible qui rallongent considérablement leur séjour aux urgences.
Stéphane Vielmas, infirmier et représentant CGT au CHU de Brest
La direction du CHU pointe un manque de respect des soignants
Face à cette dénonciation musclée, la direction du CHU ne cache pas son agacement. La coordinatrice générale des soins, Laurence Jullien-Flageul, dénonce un dispositif “irrespectueux pour nos soignants”. Tout en reconnaissant que ces temps d’attente sont “très importants” et qu’on “ne peut pas s’en satisfaire”, elle souligne que “l’ensemble des soignants se mobilise pour prendre en charge les patients”.
La direction assure par ailleurs que le CHU ne souffre pas de postes vacants aux urgences et qu’en moyenne 38 lits sont disponibles chaque jour depuis début août sur les 2500 que compte l’établissement. Insuffisant pour faire face à l’afflux quotidien de patients selon les syndicats, qui réclament plus de moyens.
Une grève illimitée depuis début juillet
Car derrière ce mur de la honte, c’est bien la colère des personnels hospitaliers qui gronde. Depuis le 4 juillet, les urgences du CHU sont en grève illimitée pour dénoncer leurs conditions de travail et le manque d’effectifs chronique. Un mouvement suivi par la majorité des agents malgré la période estivale.
Tout le monde est en poste malgré la grève, c’est bien la preuve de la pression et du manque d’effectifs qui pèse sur le service.
Stéphane Vielmas, infirmier et représentant CGT au CHU de Brest
L’hôpital public en crise
Cette situation n’est malheureusement pas propre au CHU de Brest. Partout en France, les urgences hospitalières sont sous tension, victimes de fermetures de lits, de manque de personnel soignant et d’afflux de patients. De quoi générer des temps d’attente à rallonge et des conditions d’accueil indignes pour des patients vulnérables. Un symptôme de plus de la crise profonde que traverse l’hôpital public.
Face à ce constat alarmant, il y a urgence à agir pour redonner des moyens à notre système de santé et assurer une prise en charge de qualité à tous les patients, y compris les plus âgés et les plus fragiles. Car derrière les chiffres et les murs de la honte, ce sont bien des vies humaines qui sont en jeu.