Imaginez une toile éclatante, née du regard d’une femme que la maladie a privée de tout mouvement. Karine Brailly, artiste toulousaine atteinte de sclérose latérale amyotrophique (SLA), a transformé son combat en une œuvre vibrante, défiant les limites du corps et les préjugés de la société. Quatre mois après sa disparition tragique en janvier 2025, une exposition à Toulouse célèbre son héritage tout en lançant un cri d’alarme : le validisme, cette discrimination insidieuse contre les personnes handicapées, menace des vies qui pourraient être épanouies avec un soutien adéquat.
Un Hommage à une Artiste Résiliente
À Toulouse, du 16 au 23 mai 2025, l’association Handi-Social 31 dévoile Battue sur le fil : quand l’art résiste au validisme, une exposition dédiée à Karine Brailly. Installée au Petit Bouillon, cette rétrospective met en lumière des toiles où couleurs et émotions dansent, créées grâce à une commande oculaire. Atteinte de SLA depuis 2013, Karine a continué à peindre malgré une paralysie totale, prouvant que la créativité transcende les barrières physiques.
« Karine témoignait qu’une vie est possible malgré la maladie, mais sans aide, elle n’aurait jamais pu créer. »
Odile Maurin, membre de Handi-Social 31
Son parcours, marqué par des expositions dans des galeries prestigieuses et un engagement auprès d’associations, incarne une résistance farouche. Pourtant, derrière chaque tableau, se cache une lutte quotidienne : celle pour un accompagnement digne, souvent refusé par un système défaillant.
Le Validisme : Une Discrimination Méconnue
Le terme validisme désigne les préjugés et discriminations envers les personnes handicapées, les reléguant à une vie jugée « moins digne ». Pour Karine, ce validisme s’est traduit par l’absence d’auxiliaires de vie formés et de financements pour des aides techniques essentielles. Malgré la loi Handicap de 2005, qui promet une compensation intégrale, elle a dû compter sur une association pour obtenir sa commande oculaire.
Sans cette technologie, Karine aurait été réduite au silence. Combien d’autres voix sont-elles étouffées par ce système ?
L’exposition ne se contente pas de célébrer son art : elle dénonce un système qui, trop souvent, pousse les personnes handicapées vers l’isolement ou, pire, vers des choix extrêmes. Karine, qui chérissait sa vie, s’est résignée à une sédation profonde, faute de soutien adapté.
Une Loi sur la Fin de Vie Controversée
Alors que l’Assemblée nationale examine une nouvelle loi sur la fin de vie, Handi-Social 31 tire la sonnette d’alarme. Ce texte, censé offrir plus d’autonomie, pourrait faciliter l’accès à la mort pour les personnes handicapées, sans garantir leur droit à une vie digne. Pour les militants, il reflète une vision validiste, où la société juge certaines existences moins « valables ».
« Nous ne sommes ni religieux ni réactionnaires. Nous voulons des soins, pas une loi qui nous pousse vers la mort. »
Odile Maurin
Les associations pointent une dérive inquiétante : au lieu d’investir dans l’inclusion sociale et l’accessibilité, le système privilégie des solutions définitives. Karine, par exemple, n’aspirait pas à mourir. Ce qu’elle voulait, c’était peindre, aimer, vivre – mais sans auxiliaires formés, elle s’est retrouvée piégée.
L’Art comme Acte de Résistance
Les toiles de Karine Brailly ne sont pas de simples œuvres : elles sont des manifestes. Chaque coup de pinceau virtuel, guidé par ses yeux, raconte une histoire de défi. L’exposition Battue sur le fil illustre comment l’art peut devenir un refuge, un cri, une arme contre l’exclusion.
- Liberté d’expression : La commande oculaire a permis à Karine de s’exprimer malgré la SLA.
- Engagement : Ses œuvres ont soutenu des causes associatives, donnant une voix aux sans-voix.
- Résilience : Chaque tableau est une victoire sur la maladie et les préjugés.
Le vernissage, prévu le 16 mai à 18h, promet une immersion dans cet univers où l’art défie le validisme. Le lendemain, un débat à 17h abordera les enjeux de la loi sur la fin de vie, invitant le public à réfléchir : comment construire une société qui célèbre toutes les vies ?
Un Système à Réformer
Le cas de Karine Brailly révèle des failles systémiques criantes. La loi Handicap de 2005, bien que ambitieuse, reste sous-financée. Les aides techniques, comme les commandes oculaires, coûtent des milliers d’euros, et les auxiliaires de vie qualifiés manquent cruellement. Résultat : des personnes handicapées sont laissées à l’abandon, parfois contraintes à des choix qu’elles n’auraient jamais envisagés.
Problème | Conséquence | Solution proposée |
---|---|---|
Manque d’auxiliaires formés | Isolement, perte d’autonomie | Formation et financement accrus |
Aides techniques coûteuses | Inaccessibilité pour beaucoup | Subventions intégrales |
Validisme sociétal | Discrimination, dévalorisation | Éducation et sensibilisation |
Face à ces défis, les militants appellent à une réforme profonde : investir dans les droits des handicapés, former des professionnels, et promouvoir une culture d’inclusion. L’exposition de Toulouse est un premier pas, mais le chemin reste long.
Vers une Société Plus Inclusive
Et si le véritable hommage à Karine Brailly était de bâtir une société où personne ne serait forcé de choisir entre la vie et la dignité ? L’exposition Battue sur le fil invite à repenser notre rapport au handicap. Elle montre que, avec les bons outils, une vie riche et épanouie est possible, même face à une maladie aussi dévastatrice que la SLA.
Rejoignez le débat le 17 mai à Toulouse et découvrez comment l’art peut changer les regards.
En célébrant Karine, Handi-Social 31 ne se contente pas de regarder le passé. L’association pose une question essentielle : quelle société voulons-nous ? Une société qui facilite la mort ou une qui investit dans la vie, quelle que soit la condition physique ? La réponse, espèrent-ils, émergera des discussions et des émotions suscitées par cette exposition.
En explorant les toiles de Karine Brailly, les visiteurs découvriront plus qu’une artiste : une femme qui, jusqu’à son dernier souffle, a peint pour dire au monde que chaque vie mérite d’être vécue. Son héritage, vibrant et poignant, appelle à l’action. À nous de relever le défi.