Dans un contexte géopolitique tendu, l’Europe cherche à renforcer son autonomie stratégique, notamment dans le domaine clé de l’intelligence artificielle appliquée à la défense. C’est dans ce cadre que la pépite allemande Helsing, spécialiste de l’IA de défense, vient d’annoncer une levée de fonds record de 450 millions d’euros. Une opération qui propulse sa valorisation à près de 5 milliards d’euros et lui permet de poursuivre son expansion sur le Vieux Continent.
Un poids lourd européen de l’IA militaire
Fondée en 2021 à Munich, Helsing s’est rapidement imposée comme un acteur incontournable de la défense européenne. Sa technologie de pointe, basée sur l’apprentissage automatique et l’analyse de données massives, vise à doter les forces armées d’outils d’aide à la décision ultra-performants. Un atout précieux à l’heure où les menaces se complexifient et se digitalisent.
Parmi ses réalisations phares, Helsing a été choisie pour fournir l’infrastructure d’IA du SCAF, le futur avion de combat européen qui doit remplacer les Rafale et Eurofighter à l’horizon 2040. Un programme crucial pour garantir la souveraineté technologique de l’Europe face aux géants américains et chinois.
Des investisseurs de renom au capital
Pour soutenir ses ambitions, Helsing a su convaincre des investisseurs de premier plan, comme en témoigne sa dernière levée de fonds. Parmi eux, on retrouve le célèbre fonds de la Silicon Valley General Catalyst, mais aussi des spécialistes européens comme le suédois Saab AB. Un gage de crédibilité pour cette jeune pousse en pleine ascension.
La sécurité européenne est à la croisée des chemins et Helsing jouera un rôle important en donnant aux démocraties la capacité de dissuasion et de défense.
Niklas Köhler, Torsten Reil et Gundbert Scherf, co-fondateurs de Helsing
Priorité au flanc Est de l’Europe
Avec ces nouveaux moyens, Helsing compte bien renforcer sa présence dans les pays européens frontaliers de la Russie. Un enjeu stratégique majeur au vu des tensions actuelles et des opérations de déstabilisation orchestrées par Moscou, comme les récentes attaques informatiques en Estonie.
Les fonds levés serviront ainsi à accélérer la R&D et le déploiement de solutions concrètes pour protéger le flanc oriental de l’OTAN. Parmi les pistes explorées :
- Des systèmes de détection et de contre-mesures face aux cyberattaques
- Des outils d’analyse prédictive des menaces hybrides (propagande, ingérence…)
- L’intégration de l’IA dans les équipements de surveillance et de renseignement
Un rôle clé dans le conflit ukrainien
Signe de son engagement, Helsing est présente en Ukraine depuis le début de l’invasion russe en 2022. Elle y assiste les forces de Kiev grâce à sa technologie de pointe. Un terrain d’expérimentation grandeur nature qui lui permet d’éprouver et d’améliorer constamment ses algorithmes dans un contexte de guerre réelle.
L’entreprise a aussi fondé récemment la Defence Manufacturers Alliance, un collectif réunissant plusieurs acteurs de la technologie de défense pour coordonner l’aide à l’Ukraine. Une initiative saluée par de nombreux experts et décideurs.
Vers une IA européenne de défense ?
Au-delà du cas Helsing, cette méga-levée de fonds met en lumière les efforts croissants de l’Europe pour rattraper son retard dans l’IA militaire face aux États-Unis et à la Chine. Un défi majeur qui nécessite des investissements massifs et une coopération accrue entre États-membres et industriels du secteur.
Des initiatives comme le Fonds européen de la défense, doté de 8 milliards d’euros, vont dans ce sens. Leur but : stimuler l’innovation, éviter la dépendance technologique et bâtir une véritable base industrielle et technologique de défense européenne (BITDE). Un impératif stratégique dans un monde de plus en plus imprévisible.
Dans cette course à l’IA militaire, des success stories comme Helsing prouvent que l’Europe a des atouts dans son jeu. Reste à transformer l’essai en construisant un écosystème solide et intégré, capable de peser face aux mastodontes mondiaux. Un défi aussi complexe que vital pour la sécurité et la souveraineté du Vieux Continent au XXIe siècle.