Une coalition de groupes rebelles syriens, menée par Hayat Tahrir al-Sham (HTS), a lancé mercredi une offensive éclair contre les forces du régime de Bachar al-Assad dans la région d’Alep. Mais qui se cache derrière ce groupe armé, initiateur et fer de lance des combats en cours? D’anciens djihadistes affiliés à al-Qaida qui ont opéré ces dernières années une surprenante mue idéologique et stratégique.
De djihadistes internationaux à rebelles nationalistes
Hayat Tahrir al-Sham est né en janvier 2017 de la fusion de plusieurs groupes djihadistes et rebelles, dont le Front al-Nosra, branche syrienne d’al-Qaida. Sous la houlette de son chef Abou Mohammed al-Joulani, HTS va progressivement s’éloigner de l’idéologie djihadiste transnationale pour adopter une rhétorique révolutionnaire et nationaliste.
Fini les appels au djihad global contre les « mécréants ». Désormais, HTS affirme se concentrer sur le renversement du régime « tyrannique » de Damas et l’instauration d’un État islamique en Syrie. Une mue opportuniste pour gagner en légitimité auprès de la population et de la communauté internationale.
Contrôle de la province d’Idlib
Depuis 2017, Hayat Tahrir al-Sham a pris le contrôle quasi-total de la province d’Idlib, dernier grand bastion rebelle dans le nord-ouest syrien. Le groupe y a imposé une gouvernance inspirée de la charia, tout en ménageant la population civile et en nouant des relations pragmatiques avec la Turquie voisine.
Ils ont renié le djihad global et collaborent avec des puissances internationales.
– Un expert du dossier syrien
Malgré ce changement de posture, HTS reste classé comme organisation terroriste par l’ONU et plusieurs pays. Ses combattants les plus radicaux ont fait scission, l’accusant de trahir l’idéal djihadiste.
Une offensive calculée contre le régime
En lançant son offensive sur Alep, ville stratégique reconquise par le régime fin 2016, HTS cherche à marquer des points sur les plans militaire et politique. Le groupe espère reprendre du terrain, affaiblir Damas et s’imposer comme un interlocuteur incontournable dans toute future négociation.
Pour y parvenir, le chef d’HTS al-Joulani a récemment appelé ses combattants à faire preuve de « miséricorde » et à être « un modèle de tolérance ». Une consigne en phase avec la nouvelle image façonnée par le groupe, mais qui ne doit pas faire oublier ses racines et ses méthodes.
Cette mue calculée suffira-t-elle à HTS pour se faire accepter comme un acteur politique crédible? Rien n’est moins sûr, tant le passif du groupe et la complexité du conflit syrien rendent tout pronostic hasardeux. Une chose est sûre: en mutant pour s’adapter et survivre, Hayat Tahrir al-Sham confirme son opportunisme et son habileté manœuvrière.