Imaginez être membre d’un parti qui se présente comme le grand défenseur des femmes et découvrir qu’un de vos responsables vous envoie, pendant des années, des messages à caractère sexuel sans jamais avoir demandé votre avis. C’est exactement ce qui arrive aujourd’hui au PSOE, le parti au pouvoir en Espagne.
Un nouveau dossier qui tombe au pire moment
La justice espagnole vient d’ouvrir une enquête préliminaire pour harcèlement sexuel contre Antonio Navarro, secrétaire général du PSOE dans la province de Torremolinos, dans le sud du pays. Les faits reprochés sont lourds : depuis 2021, il aurait envoyé des centaines de messages à connotation sexuelle, des insinuations et des avances non sollicitées à une femme membre du même parti.
À ces messages s’ajouteraient des gestes déplacés en personne, toujours sans consentement. La plaignante, excédée, a fini par porter plainte. L’antenne locale du parti a immédiatement demandé à la direction nationale la suspension provisoire du responsable mis en cause.
Un contexte déjà très chargé
Ce n’est pas la première fois cet été que le PSOE se retrouve confronté à des accusations de ce type. Un autre dossier, tout aussi gênant, concerne Francisco Salazar, ancien conseiller proche de Pedro Sánchez et ancien dirigeant du parti.
Plusieurs anciennes collaboratrices l’accusent de harcèlement sexuel. Elles ont témoigné ces derniers jours dans la presse, déplorant le manque de réactivité des services du Premier ministre lorsqu’elles avaient signalé les faits en interne. Francisco Salazar s’est mis en retrait de toutes ses fonctions début juillet, mais aucune procédure judiciaire n’est, pour l’instant, engagée contre lui.
Le contraste est violent entre le discours officiel et la réalité interne du parti.
Pedro Sánchez et la lutte contre les violences faites aux femmes
Depuis son arrivée au pouvoir, Pedro Sánchez a fait de l’égalité femmes-hommes et de la lutte contre les violences sexuelles l’une des priorités affichées de son gouvernement. En 2022, il a porté une loi pionnière baptisée « seulement oui est oui », qui place le consentement au centre de la définition des agressions sexuelles.
Cette loi a été saluée dans toute l’Europe comme un progrès majeur. Pourtant, à l’intérieur même de son parti, les mécanismes de protection semblent dysfonctionner lorsqu’il s’agit de cadres ou de proches du pouvoir.
Le cumul des affaires crée un malaise grandissant. D’autant que d’autres scandales ont récemment éclaboussé l’entourage du président du gouvernement : affaire de corruption impliquant un ancien ministre des Transports, enregistrements évoquant des prostituées… En juillet, le PSOE a même fini par interdire à ses membres tout recours à la prostitution – pratique qui reste légale en Espagne.
Une opposition qui n’attendait que ça
Du côté de la droite et de l’extrême droite, on ne boude pas son plaisir. Ces affaires sont présentées comme la preuve d’une hypocrisie morale du camp progressiste. Pedro Sánchez, lui, dénonce régulièrement des « attaques orchestrées » par ses adversaires politiques.
Mais plus les dossiers s’accumulent, plus la défense devient difficile à tenir. Lorsque les victimes présumées sont des militantes du même parti, il devient compliqué d’invoquer un complot extérieur.
Vers une crise de confiance interne ?
Dans les rangs socialistes, certains murmurent que le mot tabou : « malaise ». La base féminine, très mobilisée depuis des années sur ces questions, observe avec une certaine amertume la gestion des affaires.
Une militante historique confiait récemment : « On a porté la loi sur le consentement dans la rue et au Parlement, on ne peut pas fermer les yeux quand ça se passe chez nous. »
La direction nationale du PSOE n’a pas encore communiqué officiellement sur l’affaire de Torremolinos. Le silence, pour l’instant est assourdissant.
Ce que cela dit de l’Espagne en 2025
Ces affaires arrivent dans un pays où la parole des femmes s’est libérée de manière spectaculaire ces dernières années, notamment après le scandale de « La Manada » en 2016. La société espagnole est devenue l’une des plus exigeantes d’Europe sur les questions de consentement et de respect.
Du coup, le décalage entre les avancées législatives et les pratiques internes d’un parti censé incarner ces valeurs apparaît encore plus criant.
Beaucoup d’observateurs estiment que le PSOE va devoir aller plus loin que des suspensions provisoires : un vrai protocole interne, des formations obligatoires, une tolérance zéro affichée et appliquée.
À retenir
- Enquête ouverte contre Antonio Navarro, cadre local PSOE à Torremolinos
- Centaines de messages et gestes déplacés depuis 2021
- Affaire Francisco Salazar toujours en suspens
- Pedro Sánchez sous pression sur son engagement féministe
- Le parti a interdit le recours à la prostitution à ses membres en juillet
Le gouvernement de Pedro Sánchez parviendra-t-il à traverser cette série noire sans perdre sa crédibilité sur les questions d’égalité ? L’année 2025 s’annonce, en tout cas, particulièrement mouvementée pour le PSOE. Et pour les femmes qui croyaient avoir trouvé en lui un allié indéfectible.
L’histoire est en marche, et elle ne pardonne pas les contradictions.









