Dans la petite ville de Hamtramck, nichée au cœur du Michigan, un vote du conseil municipal a provoqué un séisme. Cette cité ouvrière d’environ 28 000 âmes, enclavée dans Detroit, est devenue en 2015 la première ville des États-Unis à élire un conseil municipal à majorité musulmane. Un symbole de diversité et de tolérance pour beaucoup, dans un pays encore marqué par les discours islamophobes. Mais mardi soir, à l’unanimité, ce même conseil a voté l’interdiction des drapeaux LGBT sur les propriétés municipales, provoquant stupeur et colère chez une partie des habitants.
Une ville multiculturelle sous tension
Fondée par des immigrés polonais au début du XXe siècle, surnommée “Little Warsaw”, Hamtramck a vu sa démographie évoluer au fil des décennies. Selon le dernier recensement, la population musulmane, principalement originaire du Yémen et du Bangladesh, représente aujourd’hui environ 60% des résidents. Une transformation célébrée par beaucoup comme un exemple d’intégration réussie et de multi-culturalisme. L’élection en 2015 d’un conseil municipal à majorité musulmane, une première aux États-Unis, avait suscité une grande fierté et un fort intérêt médiatique.
Mais les tensions n’ont pas tardé à apparaître entre certaines franges conservatrices de la communauté musulmane et les défenseurs d’une vision progressiste, attachée aux droits des minorités. Le dossier du drapeau LGBT cristallise ces dissensions depuis plusieurs mois. D’un côté, des élus et des habitants musulmans invoquent le respect de leurs convictions religieuses. De l’autre, des membres de la communauté LGBT et leurs alliés dénoncent une atteinte à l’inclusivité et une forme de discrimination.
Un vote sans appel
Après des heures de débats tendus, le conseil municipal a finalement tranché mardi soir. Par 6 voix contre 0, les élus ont adopté une résolution interdisant les drapeaux LGBT sur tout bâtiment ou propriété de la ville. Un texte présenté par le maire Amer Ghalib, qui exclut aussi tout drapeau à caractère politique, ethnique ou raciste.
Je travaille pour le peuple, pour ce que la majorité des gens aiment.
Mohammed Hassan, membre du conseil municipal
Une décision saluée par des vivats dans la salle du conseil, bondée pour l’occasion. Sur les réseaux sociaux de la ville, les commentaires homophobes se sont déchaînés. “Fagless City” (ville sans pédés), pouvait-on lire, avec des émojis de biceps en signe de force.
Colère et incompréhension
Du côté des soutiens LGBT, c’est la consternation. L’ancienne maire Karen Majewski, une Américaine d’origine polonaise, parle d’un sentiment de “trahison”. Elle rappelle que le précédent conseil municipal, à majorité non-musulmane, avait autorisé en 2004 l’appel à la prière depuis les mosquées de la ville, malgré l’opposition d’une partie des habitants.
Nous vous avons soutenus lorsque vous étiez menacés, et maintenant nos droits sont menacés, et c’est vous qui nous menacez.
Karen Majewski, ancienne maire de Hamtramck
Pour Amanda Jaczkowski, ex-membre du conseil municipal convertie à l’islam, cette résolution pose question sur le plan légal et éthique. D’autres habitants LGBT, comme Gracie Cadieux, se disent “effacés” et “repoussés dans le placard” par cette décision qui établit une “discrimination claire”.
Coexistence ou exclusion ?
Au-delà de la question du drapeau, c’est le modèle même d’Hamtramck comme havre de mixité et de tolérance qui semble vaciller. Le maire Amer Ghalib assure vouloir gouverner équitablement pour tous, mais estime que les militants LGBT sont allés trop loin en voulant “forcer leur agenda”. Un argument rejeté par les intéressés, qui rappellent ne demander qu’une égalité de traitement et de représentation.
Malgré ces déchirements, beaucoup veulent encore croire en la capacité de coexistence pacifique de la ville. Car au-delà des passes d’armes politiques, c’est au quotidien que se joue l’avenir du “vivre-ensemble” à Hamtramck. Un défi de tous les jours, fait de dialogues, de compromis, parfois de frictions. Mais peut-être aussi, à terme, de réconciliation des diversités.
Au-delà de la question du drapeau, c’est le modèle même d’Hamtramck comme havre de mixité et de tolérance qui semble vaciller. Le maire Amer Ghalib assure vouloir gouverner équitablement pour tous, mais estime que les militants LGBT sont allés trop loin en voulant “forcer leur agenda”. Un argument rejeté par les intéressés, qui rappellent ne demander qu’une égalité de traitement et de représentation.
Malgré ces déchirements, beaucoup veulent encore croire en la capacité de coexistence pacifique de la ville. Car au-delà des passes d’armes politiques, c’est au quotidien que se joue l’avenir du “vivre-ensemble” à Hamtramck. Un défi de tous les jours, fait de dialogues, de compromis, parfois de frictions. Mais peut-être aussi, à terme, de réconciliation des diversités.