Imaginez un pays où la voix des médias s’éteint à l’approche d’un moment décisif pour son avenir. En Guinée, à quelques jours d’un référendum constitutionnel prévu pour le 21 septembre, les autorités viennent de frapper fort : un site d’information suspendu, une télévision interdite. Ces décisions, prises par le régulateur des médias, soulèvent des questions brûlantes sur la liberté de la presse et l’avenir démocratique du pays. Que se passe-t-il réellement dans cette nation ouest-africaine, et pourquoi ces mesures drastiques ?
Une Crise Médiatique à l’Approche du Référendum
La Guinée se prépare à un référendum crucial, convoqué par le général Mamadi Doumbouya, leader de la junte au pouvoir depuis le coup d’État de septembre 2021. Ce scrutin, censé marquer un retour à l’ordre constitutionnel, divise profondément le pays. Alors que l’opposition accuse la junte de chercher à consolider son pouvoir, les autorités semblent resserrer leur emprise sur les médias, un secteur déjà sous pression.
Dans ce contexte tendu, la Haute Autorité de la Communication (HAC) a pris des mesures radicales. Un site d’information populaire a été suspendu « jusqu’à nouvel ordre » pour des raisons de partialité présumée dans sa couverture de la campagne référendaire. Une télévision en ligne, appartenant au même groupe, a été purement et simplement interdite pour « activité illégale ». Ces sanctions, annoncées dans un communiqué officiel, ont immédiatement suscité l’indignation des défenseurs de la liberté d’expression.
Les Médias dans le Viseur des Autorités
Les accusations portées contre les deux médias visés restent floues. La HAC reproche au site d’information un manque de neutralité et d’équilibre dans sa couverture de l’actualité référendaire. Quant à la télévision, son activité serait « non conforme » à la réglementation. Mais aucun détail précis n’a été fourni, ce qui alimente les soupçons de censure ciblée.
« Ces mesures répressives visent à museler les voix dissidentes à l’approche d’un scrutin controversé. »
Un communiqué du Forum des Forces Sociales de Guinée
Cette suspension n’est pas un cas isolé. Début septembre, un autre site d’information a écopé d’une suspension de trois mois pour « insuffisance professionnelle » et « manipulation de l’information ». Ces décisions s’inscrivent dans un climat de restrictions croissantes, où les médias indépendants peinent à opérer librement.
Un Référendum Controversé
Le référendum du 21 septembre est au cœur de la tourmente. Convoqué par le général Doumbouya, qui a renversé le président Alpha Condé en 2021, ce scrutin vise à adopter une nouvelle Constitution. Mais le projet, rendu public en juin, reste ambigu sur un point clé : la possibilité pour le chef de la junte de se présenter à une future élection présidentielle.
La charte de transition, établie après le coup d’État, interdisait explicitement aux membres de la junte de participer aux élections. Cependant, l’adoption d’une nouvelle Constitution pourrait lever cette interdiction, alimentant les craintes de l’opposition. Pour beaucoup, ce référendum n’est qu’un outil pour prolonger le pouvoir de Doumbouya.
Pourquoi le référendum divise-t-il autant ?
- Il pourrait permettre au général Doumbouya de se présenter à la présidentielle.
- L’opposition dénonce une confiscation du pouvoir par la junte.
- La société civile critique le manque de transparence dans le processus.
La Liberté de la Presse en Danger
La suspension des médias n’est qu’un symptôme d’un problème plus large : la restriction progressive de la liberté de la presse en Guinée. Depuis l’arrivée de la junte au pouvoir, plusieurs journalistes ont été arrêtés, puis relâchés, dans des circonstances troubles. L’un d’eux, dirigeant d’un site d’information, est porté disparu depuis décembre, ce qui a choqué les professionnels du secteur.
Les organisations de défense des droits des médias dénoncent une stratégie d’intimidation. En bloquant ou suspendant les organes de presse, les autorités semblent vouloir contrôler le récit autour du référendum. Cette situation rappelle d’autres contextes où les régimes autoritaires musellent les voix critiques avant des échéances électorales.
Une Société Civile en Résistance
Face à ces restrictions, la société civile ne reste pas silencieuse. Le Forum des Forces Sociales de Guinée (FFSG), un mouvement citoyen, a qualifié les sanctions contre les médias de « mesures répressives ». Dans un communiqué, le FFSG appelle à la mobilisation pour défendre la liberté d’expression et s’oppose fermement à la tenue du référendum.
Ce mouvement illustre une fracture profonde dans la société guinéenne. D’un côté, la junte affirme vouloir restaurer l’ordre constitutionnel. De l’autre, l’opposition et la société civile dénoncent une dérive autoritaire, où les libertés fondamentales sont sacrifiées au profit du pouvoir.
Un Contexte Régional Inquiétant
La situation en Guinée s’inscrit dans un contexte régional plus large, où plusieurs pays ouest-africains, comme le Mali ou le Burkina Faso, ont vu des juntes militaires prendre le pouvoir ces dernières années. Dans ces pays, la censure des médias est souvent utilisée pour limiter les critiques et consolider l’autorité des nouveaux dirigeants.
En Guinée, les restrictions médiatiques risquent d’aggraver les tensions à l’approche du référendum. Sans une presse libre pour informer la population, le débat public est étouffé, et la transparence du scrutin est compromise.
Événement | Impact |
---|---|
Suspension d’un site d’information | Limitation de l’information indépendante avant le référendum |
Interdiction d’une télévision | Réduction de la diversité des voix médiatiques |
Disparition d’un journaliste | Climat de peur pour les professionnels des médias |
Vers un Avenir Incertain
À l’approche du référendum, la Guinée se trouve à un carrefour. Le scrutin pourrait ouvrir la voie à une transition démocratique, comme le promet la junte. Mais les restrictions imposées aux médias et les accusations de l’opposition jettent une ombre sur ce processus. Sans une presse libre et un débat ouvert, la légitimité du référendum risque d’être remise en question.
La communauté internationale observe de près la situation. Les partenaires régionaux, comme la CEDEAO, pourraient jouer un rôle clé pour garantir un processus transparent. Mais pour l’instant, les Guinéens restent dans l’attente, partagés entre espoir d’un renouveau démocratique et crainte d’une consolidation autoritaire.
En conclusion, la suspension des médias en Guinée n’est pas seulement une attaque contre la presse : elle reflète une lutte plus large pour le contrôle de l’information et du pouvoir. Alors que le référendum approche, une question demeure : la voix du peuple pourra-t-elle s’exprimer librement ?