C’est une rentrée sous haute tension qui s’annonce à l’Immaculée Conception, prestigieux ensemble scolaire catholique de Pau. La suspension pour trois ans de son directeur, Christian Espeso, par le rectorat provoque l’émoi et la colère. Des “atteintes à la laïcité” et une “politique managériale” lui sont notamment reprochées, sans plus de détails de la part de la rectrice Anne Bisagni-Faure.
Mais pour les nombreux soutiens de ce directeur charismatique, adoré par une grande majorité du personnel, il s’agit d’une sanction totalement disproportionnée. Certains y voient même le signe d’une offensive orchestrée contre l’enseignement catholique, ravivant le spectre d’une “guerre scolaire” que l’on croyait appartenir au passé.
Une personnalité clivante mais adulée
Âgé de 61 ans, Christian Espeso dirige d’une main de fer cet établissement qui accueille plus de 2500 élèves, de la maternelle aux classes préparatoires. Décrit comme une “forte personnalité”, il est connu pour ses prises de position conservatrices, notamment sur les questions de société. Mais il est surtout loué pour son dévouement sans faille à l’établissement et à ses élèves.
“C’est un homme de convictions, qui a toujours eu à cœur de défendre les valeurs de l’enseignement catholique”, témoigne un professeur sous couvert d’anonymat. “Mais il est surtout d’une générosité et d’une bienveillance rares envers les élèves et le personnel.”
– Un professeur de l’Immaculée Conception
Des griefs qui font polémique
Parmi les griefs avancés pour justifier sa suspension, des “atteintes à la laïcité”, notamment concernant la place de l’enseignement religieux, et une “censure de certains ouvrages et auteurs”. Des accusations que rejettent en bloc ses soutiens, y voyant une remise en cause de la liberté pédagogique et du caractère propre des établissements catholiques sous contrat.
“On cherche à nous imposer une vision totalement laïciste, en niant la spécificité de notre projet éducatif”, s’insurge un parent d’élève. “C’est une atteinte inacceptable à notre liberté de choisir l’enseignement que nous souhaitons pour nos enfants.”
– Un parent d’élève
Une mobilisation qui s’organise
Face à ce qu’ils considèrent comme une injustice flagrante, les soutiens du directeur s’organisent. Une pétition en ligne recueille des milliers de signatures, tandis qu’un comité de soutien appelle à une grande manifestation devant le rectorat.
Dans le même temps, la direction diocésaine de l’enseignement catholique dénonce un “procès d’intention” et une “mise en cause de la liberté d’enseignement”. Elle assure Christian Espeso de son entier soutien et demande sa réintégration immédiate.
Un débat ravivé sur la place du religieux à l’école
Au-delà du cas personnel du directeur, cette affaire remet sur le devant de la scène le débat récurrent sur la place du fait religieux à l’école et l’équilibre toujours précaire entre liberté de l’enseignement et respect de la laïcité.
“Il ne faut pas se voiler la face : derrière les attaques contre ce directeur, c’est tout l’enseignement catholique qui est visé”, estime un responsable de la Fédération des Organismes de gestion de l’Enseignement catholique. “Il y a une volonté de remettre en cause les équilibres issus de la loi Debré et de marginaliser notre réseau.”
– Un responsable de l’Enseignement catholique
Une opinion loin d’être partagée par tous, certains y voyant au contraire une saine réaffirmation des principes laïques et du contrôle de l’État sur les établissements privés sous contrat. Une chose est sûre : alors que s’ouvre une année scolaire déjà chargée en défis, cette polémique est loin d’être close et promet encore de nombreux rebondissements dans les prochaines semaines.
