Imaginez un matin où, fiévreux et souffrant, vous vous rendez à votre pharmacie habituelle… pour tomber nez à nez avec des étagères désespérément vides et une pancarte “Fermé pour cause de grève” ! C’est le cauchemar qui risque de devenir réalité pour des millions de Français jeudi prochain. Les pharmaciens, à bout, sont appelés à une mobilisation massive pour tirer la sonnette d’alarme sur la crise sans précédent qui frappe leur profession.
Le cri d’alarme des pharmaciens
Depuis des mois, les officines vivent un véritable cauchemar : ruptures de stocks à répétition, médicaments introuvables, marges réduites à peau de chagrin face à l’inflation galopante… Une situation intenable qui a poussé deux grands syndicats, l’USPO et la FSPF, à lancer un appel à la grève nationale, soutenu par l’Ordre des pharmaciens. Pierre-Olivier Variot, président de l’USPO, témoigne :
Depuis la fin du Covid, on n’arrive plus à conjuguer l’inflation avec notre activité. Cet hiver par exemple, nous avons manqué de cortisone et avant, de doliprane. C’est une situation plus qu’inquiétante !
Pierre-Olivier Variot, président USPO
Un constat alarmant partagé par Philippe Besset, patron de la FSPF, qui craint qu’en l’absence de réponse du gouvernement, ce soit l’avenir même du réseau officinal qui soit en péril, avec des conséquences dramatiques en termes d’accès aux soins.
Des fermetures d’officines en cascade
Le mois de janvier a déjà donné un avant-goût de la catastrophe qui se profile : 36 pharmacies ont dû mettre la clé sous la porte, asphyxiées par les difficultés économiques. Selon les projections des syndicats, si rien n’est fait, ce sont entre 20 000 et 25 000 emplois de pharmaciens qui pourraient être menacés à court terme ! Un tsunami social en perspective.
Des pénuries de médicaments qui s’aggravent
Autre motif d’exaspération des professionnels : les ruptures de stocks de médicaments qui se multiplient. Les chiffres de l’ANSM sont édifiants :
- +30,9% de pénuries signalées en 2023
- 4925 alertes recensées sur le seul mois de janvier 2024 !
Les tensions d’approvisionnement concernent des produits de première nécessité comme le doliprane ou la cortisone, indispensables pour soigner les petits maux du quotidien comme les pathologies plus lourdes. Face à cette situation critique, le gouvernement a promis une “feuille de route”, sans qu’aucune mesure concrète n’ait été dévoilée à ce stade.
Le spectre d’une dérégulation qui inquiète
La coupe est pleine pour des pharmaciens déjà à cran, qui vivent comme une menace les rumeurs persistantes d’une éventuelle dérégulation de la vente de médicaments. Autoriser la vente en ligne de produits de santé sans ordonnance serait vécu comme une trahison par une profession sous pression. “Les médicaments vont devenir des biens de consommation et c’est dangereux”, met en garde Pierre-Olivier Variot.
Une mobilisation massive attendue
La grève du 30 mai s’annonce donc très suivie, avec des estimations allant jusqu’à 90% de fermetures d’officines dans certains départements selon les syndicats. De quoi mettre une pression maximale sur le gouvernement pour qu’il prenne enfin la mesure de la crise sans précédent que traverse le secteur.
En attendant, un service minimum devrait être assuré dans la plupart des territoires via des réquisitions préfectorales. Mais pour combien de temps encore ? Si rien n’est fait, le spectre d’une pénurie générale de médicaments, avec son cortège de drames et de souffrances, pourrait rapidement devenir réalité. Il y a urgence à agir pour sauver notre système de santé !
Quel avenir pour la profession ?
Au-delà de la mobilisation du 30 mai, c’est un vrai plan Marshall pour les pharmacies qui est attendu par une profession au bord du burn-out. Parmi les revendications mises sur la table par les syndicats :
- Une revalorisation tarifaire d’urgence pour faire face à l’inflation
- Un “new deal” conventionnel avec l’Assurance Maladie
- Des mesures pour sécuriser l’approvisionnement en médicaments
- Un coup d’accélérateur sur la réforme des études de pharmacie
Autant de chantiers cruciaux qui engagent l’avenir du modèle officinal à la française, et avec lui notre capacité collective à garantir un accès équitable aux médicaments sur tous les territoires. Le gouvernement saura-t-il prendre la mesure de l’enjeu et ouvrir de vraies négociations ? Les prochaines semaines s’annoncent décisives. La santé des Français est à ce prix.