Avez-vous déjà vu une capitale s’arrêter net, comme figée dans un cri silencieux ? C’est ce qui s’est passé en Argentine ce jeudi, alors qu’une grève générale a secoué le pays. En réponse à une politique d’austérité brutale menée par le président ultralibéral, des milliers de citoyens ont battu le pavé, dénonçant une érosion dramatique de leur pouvoir d’achat. Mais entre gares fantômes et bus roulant comme si de rien n’était, le tableau est loin d’être uniforme.
Une Grève qui Divise le Pays
À minuit pile, les sirènes de la révolte ont retenti. La **CGT**, première centrale syndicale du pays, a lancé un appel à une grève de 24 heures, soutenue par d’autres organisations. Objectif ? Faire plier un gouvernement accusé de sacrifier les travailleurs sur l’autel des chiffres macro-économiques. Mais si certains secteurs ont répondu massivement, d’autres ont continué à tourner, révélant une société fracturée.
Transports : entre Paralysie et Résistance
Imaginez une gare centrale, habituellement grouillante de vie, transformée en désert de béton. C’est l’image qu’offrait la gare de Constitucion à Buenos Aires ce jeudi. Même constat à l’aéroport Jorge Newberry : plus de 258 vols annulés, laissant près de 20 000 voyageurs sur le carreau, selon une source proche de la compagnie nationale. Pourtant, dans les rues, les autobus continuaient leurs rondes, presque insolents dans leur normalité.
Les bus roulent, mais le cœur du pays est à l’arrêt.
– Un observateur sur place
Le syndicat des chauffeurs de bus, refusant de rejoindre le mouvement, a maintenu en vie cet immense réseau transportant quotidiennement 10 millions de personnes. Un contraste saisissant avec l’aéronautique, où le suivi a été qualifié de « très élevé » par les représentants syndicaux. Cette disparité illustre une chose : l’unité face à l’austérité est encore loin d’être acquise.
Le Gouvernement Pointe du Doigt la « Caste Syndicale »
Pendant que les rues vibraient d’une colère contenue, l’exécutif affichait une sérénité presque provocante. Une photo publiée sur les réseaux montrait le président entouré de son équipe, légendée d’un cinglant « Aujourd’hui, on travaille ». Mais derrière cette façade, le ton est monté : des messages placardés dans les gares dénonçaient une « attaque contre la République » orchestrée par les syndicats.
Le gouvernement a même mis en place un numéro vert pour signaler les pressions syndicales, une initiative qui a fait grincer des dents. Pour les autorités, cette grève n’est qu’une tentative désespérée d’une « caste » cherchant à préserver ses privilèges. Une rhétorique qui ne passe pas auprès des manifestants.
Une Économie sous Tension : les Chiffres Mentent-ils ?
Sur le papier, tout va mieux. L’inflation, qui culminait à **211 %** il y a 16 mois, est redescendue à **66 %** en rythme annuel. Une prouesse que le gouvernement brandit comme un trophée. Mais pour les Argentins, ces statistiques sonnent creux face à une réalité bien plus sombre : la **perte de pouvoir d’achat** frappe de plein fouet, surtout les retraités et les classes populaires.
- Salaires gelés face à des prix qui grimpent encore.
- Coupes drastiques dans les aides sociales.
- Retraités en première ligne de la crise.
Pour les syndicats, ces chiffres masquent une détresse quotidienne. « Les revenus des travailleurs ne peuvent pas être la variable d’ajustement éternelle », a tonné un leader syndical lors d’un discours enflammé devant le Parlement. Une manifestation qui, mercredi soir, avait déjà rassemblé des milliers de personnes dans une ambiance tendue mais sans dérapage.
Milei et le FMI : un Pari à 20 Milliards
Pendant que le pays grondait, les regards de l’exécutif étaient tournés ailleurs. Un prêt de **20 milliards de dollars** du FMI est dans la balance, une bouée de sauvetage pour refinancer une dette écrasante et gonfler des réserves de change en chute libre. Un accord technique a été scellé en début de semaine, mais le feu vert définitif reste suspendu à une validation imminente.
Secteur | Impact de la grève | Réaction gouvernementale |
Transports publics | Mitigé (bus OK, trains KO) | Dénonciation des syndicats |
Aéronautique | Paralysie quasi-totale | Numéro vert anti-pression |
Fonction publique | Adhésion massive | Photo provocatrice |
Ce prêt, s’il est validé, pourrait redonner un souffle à une économie asphyxiée. Mais à quel prix ? Les critiques fusent : cette manne financière risque de renforcer une politique d’austérité déjà impopulaire, creusant encore les inégalités. Un pari risqué pour un président qui joue sa crédibilité sur la scène internationale.
Et Après ? Une Société au Bord du Gouffre
Alors que la grève s’éteignait à minuit, une question flotte dans l’air : ce mouvement marquera-t-il un tournant ? Pour beaucoup, il s’agit d’un cri d’alarme face à une politique qui privilégie les indicateurs aux dépens des citoyens. Les syndicats promettent d’autres actions si rien ne change, tandis que le gouvernement campe sur ses positions.
En résumé : une grève en demi-teinte, un pays divisé, et un avenir incertain suspendu à des milliards étrangers.
Ce jeudi n’était peut-être qu’un avant-goût. Entre colère sociale et ambitions économiques, l’Argentine marche sur un fil, et chaque pas pourrait faire basculer le pays dans une direction imprévisible. Reste à savoir qui cédera en premier : le peuple ou le pouvoir.