Dans les entrailles de la gare Saint-Charles à Marseille, une odeur pestilentielle assaille les narines des voyageurs. Depuis 10 jours, les poubelles débordent, s’amoncellent, pourrissent à vue d’œil. En cause : une grève des éboueurs de la société Laser Propreté, prestataire de la SNCF, sur fond d’accusations de fraude et de résiliation de contrat. Mais pour les usagers excédés, peu importe les raisons, seul compte le résultat. Et il est là, sous leurs yeux, à leurs pieds : des déchets, encore des déchets, toujours des déchets.
Le préfet sort l’artillerie lourde
Face à cette situation intenable, le préfet de police des Bouches-du-Rhône Pierre Dartout a décidé de sévir. Par un arrêté publié mardi, il ordonne la réquisition de la société Onet jusqu’au 1er octobre pour « procéder au ramassage des déchets et au nettoyage de la gare Saint-Charles de Marseille ». Une décision rarissime qui témoigne de l’exaspération des pouvoirs publics face à ces « désordres urbains » qui ternissent l’image de la cité phocéenne.
On ne peut pas laisser la gare, vitrine de Marseille, dans cet état déplorable. C’est une question de salubrité et d’ordre public.
– Un proche du préfet
La SNCF et Laser Propreté dos à dos
Mais comment en est-on arrivé là ? Tout a commencé quand la SNCF a résilié le contrat la liant à Laser Propreté, l’accusant de « pratiques frauduleuses ». Selon l’entreprise ferroviaire, le prestataire aurait affecté à temps plein les mêmes salariés sur deux marchés publics distincts : celui du nettoyage de la gare et celui du métro. Un système bien rodé qui aurait permis à Laser Propreté d’engranger des bénéfices conséquents, au détriment du service rendu. Des accusations fermement rejetées par la société de nettoyage marseillaise.
Les syndicats montent au créneau
Depuis le 9 septembre, les salariés de Laser Propreté ont donc cessé le travail, avec le soutien de leurs syndicats. Ils réclament que la SNCF lance un nouvel appel d’offres pour les reprendre, eux et leurs acquis sociaux. Une exigence pour l’instant rejetée par l’entreprise publique, qui campe sur ses positions et dénonce un « chantage » inacceptable. Pendant ce temps, les déchets continuent de s’entasser, au grand dam des voyageurs et des commerçants.
C’est invivable, ça pue, c’est dégueulasse. On a l’impression d’être dans une décharge à ciel ouvert. Il faut que ça cesse !
– Maria, usagère quotidienne de la gare
Une situation inextricable ?
La réquisition de la société Onet, si elle permet de donner un coup de balai salutaire, ne règle pas le fond du problème. SNCF et grévistes restent arc-boutés sur leurs positions, dans un face-à-face qui semble inextricable. À moins qu’un médiateur ne réussisse à renouer le fil du dialogue pour trouver une issue à ce conflit aussi nauséabond que le sont devenues les entrailles de la gare Saint-Charles.
Car au-delà de l’enjeu sanitaire immédiat, c’est bien la pérennité et la qualité du service public de nettoyage qui est en cause. Un service vital pour la propreté et l’image de Marseille, déjà bien écornée par les multiples grèves qui se succèdent au fil des ans. Il est plus que temps que les différents acteurs prennent leurs responsabilités pour sortir de cette impasse. Les voyageurs et les Marseillais méritent mieux que de slalomer entre les détritus au quotidien.