Une crise politique sans précédent secoue actuellement le Ghana, pays souvent cité en exemple pour sa stabilité démocratique en Afrique de l’Ouest. Depuis mardi, l’Assemblée nationale ghanéenne est paralysée par une bataille juridique concernant la vacance de quatre sièges parlementaires. Cette suspension indéfinie des travaux législatifs intervient à un moment critique, à moins de deux mois des élections générales dans le pays.
Au cœur de cette crise se trouve un conflit entre le parti au pouvoir, le New Patriotic Party (NPP), et le principal parti d’opposition, le National Democratic Congress (NDC). La tension est montée d’un cran mi-octobre lorsque quatre députés, deux du NPP, un du NDC et un indépendant, ont annoncé leur intention de se présenter aux prochaines élections sous des étiquettes différentes de celles avec lesquelles ils avaient été élus.
Une décision contestée du président du Parlement
Face à cette situation, le président de l’Assemblée nationale, Alban Bagbin, a pris la décision controversée de déclarer les quatre sièges concernés vacants. Une décision immédiatement contestée par le NPP, qui y voit une violation de la Constitution ghanéenne. Selon la loi fondamentale du pays, les députés n’ont en effet pas le droit de faire défection du parti avec lequel ils ont été élus pour se présenter ensuite sous une autre étiquette.
La riposte du NPP ne s’est pas fait attendre. Le parti au pouvoir a saisi la Cour suprême pour contester la légalité de la décision prise par Alban Bagbin. Pendant ce temps, à l’Assemblée nationale, les députés du NPP ont quitté la séance en signe de protestation, laissant le Parlement avec moins de la moitié de ses membres présents.
Nous ne permettrons pas au NDC de créer le chaos et de perturber la paix de ce pays.
– Alexander Afenyo-Markin, chef du NPP au Parlement
Le spectre de l’instabilité plane
Cette paralysie de l’Assemblée nationale ghanéenne n’est pas sans rappeler les tensions qui avaient éclaté en janvier 2021, lorsque l’armée avait dû intervenir au Parlement pour séparer les députés du NPP et du NDC qui en étaient presque venus aux mains. Un épisode qui avait choqué l’opinion dans ce pays considéré comme un modèle de stabilité politique dans une région secouée par les coups d’État et l’insécurité.
Aujourd’hui, cette nouvelle crise politique fait resurgir le spectre de l’instabilité et menace le bon déroulement des prochaines élections. Avec un Parlement suspendu pour une durée indéterminée, c’est tout le processus législatif qui est paralysé, mettant en péril l’adoption de projets de loi cruciaux et du budget pour l’année 2025.
Un compromis nécessaire pour sortir de l’impasse
Face à cette situation inédite, de nombreux observateurs appellent les deux principaux partis à la responsabilité et au dialogue. Selon Rasheed Draman, directeur exécutif du Centre africain pour les affaires parlementaires (ACEPA), NPP et NDC doivent impérativement trouver un compromis pour éviter que le pays ne sombre dans une crise politique majeure.
Cette situation pourrait paralyser les activités du gouvernement, en particulier avec des projets de loi cruciaux sur la table. Les deux parties doivent négocier et trouver un compromis pour éviter une impasse.
– Rasheed Draman, directeur exécutif de l’ACEPA
Reste à savoir si les principaux acteurs politiques ghanéens sauront faire preuve de la sagesse nécessaire pour préserver la stabilité chèrement acquise de leur démocratie. Alors que le pays s’apprête à retourner aux urnes, c’est tout l’avenir politique du Ghana qui se joue en ce moment au sein d’une Assemblée nationale paralysée par les querelles partisanes.