Dans une décision lourde de conséquences pour la communauté LGBT+ au Ghana, la plus haute juridiction du pays a rejeté mercredi deux recours contre un projet de loi adopté par le Parlement qui restreint drastiquement les droits des personnes homosexuelles. Cette législation, vivement critiquée en Occident, pourrait ainsi bientôt entrer en vigueur après sa ratification par le président ghanéen.
Un projet de loi controversé aux lourdes peines de prison
Baptisé « projet de loi sur les droits sexuels et les valeurs familiales », le texte voté en février par le Parlement ghanéen prévoit des sanctions particulièrement sévères. Une personne se livrant à des activités homosexuelles encourt jusqu’à 3 ans d’emprisonnement. Quant à la « promotion » de l’homosexualité, elle est passible de 5 à 10 ans de prison.
Bien que les relations entre personnes de même sexe soient déjà interdites par une loi héritée de l’époque coloniale, aucune poursuite n’avait jusqu’à présent été engagée sur cette base dans ce pays d’Afrique de l’Ouest très religieux et conservateur, à majorité chrétienne. Mais ce nouveau projet de loi marque un durcissement net à l’égard de la communauté LGBT+.
Les recours rejetés par la Cour suprême
La Cour suprême ghanéenne avait été saisie par deux requérants : le journaliste Richard Dela-Sky qui contestait la constitutionnalité de la loi, et la chercheuse universitaire Amanda Odoi qui demandait une ordonnance pour empêcher son envoi au président Nana Akufo-Addo. Mais les sept juges ont finalement estimé qu' »il n’y a pas d’acte que la Cour suprême puisse annuler » et que le texte peut « devenir une loi conformément à la Constitution ».
De vives critiques internationales
Ce projet de loi a suscité de nombreuses réactions indignées, notamment en Occident. Plusieurs pays et organisations internationales ont fait part de leur préoccupation quant à cette législation jugée discriminatoire et attentatoire aux droits humains. Certains appellent le président ghanéen à ne pas la promulguer.
Nous continuons d’exhorter le gouvernement ghanéen à protéger les droits humains fondamentaux de toutes les personnes au Ghana.
– Communiqué de l’ambassade des États-Unis à Accra
Des risques pour l’économie ghanéenne
Au-delà des questions de droits humains, cette loi pourrait aussi avoir des répercussions économiques pour le Ghana. Selon des sources proches du ministère des Finances, le pays risquerait de perdre près de 3,8 milliards de dollars de financement de la Banque mondiale. Un coup dur alors que le Ghana traverse une grave crise économique et bénéficie d’un programme d’aide du FMI.
Le président Nana Akufo-Addo, qui quittera ses fonctions en janvier après deux mandats, avait indiqué attendre le verdict de la Cour suprême avant de se prononcer. Malgré les pressions, rien n’indique pour l’instant qu’il s’opposera à cette loi. Un nouveau coup dur se profile donc pour la communauté LGBT+ ghanéenne, déjà très marginalisée et discriminée dans le pays.
Cette décision de la justice ghanéenne s’inscrit dans un contexte de durcissement des législations à l’encontre des minorités sexuelles dans plusieurs pays africains. Mais les vives critiques internationales et les risques économiques mettent en lumière les dilemmes auxquels font face ces États entre pressions sociétales conservatrices internes et condamnations extérieures.