Un vent de crise politique souffle sur la Géorgie depuis la tenue des élections législatives controversées du 26 octobre dernier. Ce mardi, les tensions ont atteint un nouveau paroxysme lorsque la police a brutalement dispersé des manifestants qui dénonçaient la victoire du parti au pouvoir, le Rêve Géorgien. Pendant ce temps, la présidente du pays, Salomé Zourabichvili, une opposante, a demandé à la Cour constitutionnelle d’annuler purement et simplement le scrutin.
Victoire électorale contestée et accusations de fraude
Depuis l’annonce des résultats officiels samedi, qui donnent gagnant le Rêve Géorgien avec 53,93% des voix et 89 sièges sur 150 au parlement, l’opposition crie à la fraude électorale et refuse de siéger. Selon elle, ce parti pro-russe au pouvoir depuis 2012 aurait truqué le vote et entraînerait le pays dans une dérive autoritaire, l’éloignant des objectifs d’adhésion à l’Union européenne et à l’OTAN inscrits dans la Constitution.
Pendant près d’un mois, des milliers de Géorgiens sont descendus dans la rue pour contester les résultats, sans effet jusqu’à présent. L’officialisation de la victoire du Rêve Géorgien ce week-end a mis le feu aux poudres et entraîné une nouvelle vague de manifestations.
Heurts entre policiers et manifestants
Ce mardi matin, les protestations ont tourné à l’affrontement quand la police a entrepris d’évacuer les manifestants qui bloquaient une artère principale de la capitale Tbilissi et un campement installé près de l’Université d’État. Selon des images des télévisions locales, plusieurs protestataires, dont au moins un journaliste, ont été violemment frappés lors de l’intervention. Le parti d’opposition Akhali affirme que certains de ses membres ont été « battus et arrêtés ».
La liberté de réunion et d’expression n’inclut pas le droit d’interrompre délibérément la circulation et le rythme normal de la vie des citoyens.
Le ministère de l’Intérieur géorgien
La présidente demande l’annulation des élections
Dans ce contexte tendu, la présidente Salomé Zourabichvili a décidé de saisir la Cour constitutionnelle pour demander l’annulation pure et simple des élections législatives qu’elle estime entachées de fraudes massives. Selon son avocat, elle dénonce « des violations généralisées du caractère universel du vote et du secret du scrutin ». La présidente, critique de longue date du gouvernement formé par Rêve Géorgien, avait déjà évoqué après le scrutin une fraude électorale reposant sur « une méthodologie russe ».
Un pays dans l’impasse politique
Alors que l’opposition refuse de siéger au nouveau parlement qui doit se réunir lundi prochain, la Géorgie semble s’enfoncer dans une impasse politique. Un bras de fer s’engage entre la présidente, qui refuse de signer le décret de convocation des députés, et le Premier ministre du Rêve Géorgien qui menace de passer outre. Mais selon les experts, le parlement ne pourra de toute façon pas se réunir tant que la Cour constitutionnelle n’aura pas tranché sur le recours de la présidente.
L’éventuelle annulation d’un scrutin déjà validé par la commission électorale plongerait le pays dans l’inconnu. Mais elle apporterait de l’eau au moulin de l’opposition qui dénonce depuis un mois un « hold-up électoral ». Affaire à suivre dans ce pays du Caucase, tiraillé entre ses aspirations pro-occidentales et l’influence toujours prégnante de la Russie.