ActualitésInternational

Génocide des Tutsis au Rwanda : Réclusion à perpétuité confirmée pour un accusé

L'ancien gendarme rwandais Philippe Manier a vu sa peine de réclusion criminelle à perpétuité confirmée en appel pour son rôle dans le génocide des Tutsis et crimes contre l'humanité au Rwanda en 1994. Un verdict lourd pour des crimes imprescriptibles reconnus plus de 25 ans après...

Au terme d’un procès fleuve de six semaines, la cour d’assises de Paris a confirmé ce mardi en appel la peine de réclusion criminelle à perpétuité prononcée en première instance à l’encontre de Philippe Manier. Cet ancien gendarme rwandais, naturalisé Français sous ce nom après avoir été connu comme Philippe Hategekimana, était rejugé pour son rôle dans le génocide des Tutsis et des crimes contre l’humanité au Rwanda en 1994. Une décision lourde pour des actes inqualifiables commis il y a plus d’un quart de siècle, mais dont l’horreur reste vivace.

Un accusé reconnu coupable de génocide et de crimes contre l’humanité

Âgé aujourd’hui de 67 ans, Philippe Manier a été reconnu coupable de génocide et de crimes contre l’humanité pour quasiment tous les chefs d’accusation retenus contre lui. D’après des sources proches du dossier, l’ancien gendarme a notamment été condamné pour avoir participé et supervisé des massacres visant la communauté tutsie dans la préfecture de Butare, dans le sud du Rwanda, en avril 1994.

Massacres et barrages meurtriers

Selon l’accusation, Philippe Manier aurait ordonné et encadré l’érection de barrages routiers destinés à « contrôler et assassiner les civils tutsis ». Il lui est également reproché d’avoir pris part, en donnant des ordres voire en étant directement impliqué sur le terrain, à plusieurs massacres de grande ampleur :

  • Le massacre de la colline de Nyabubare, où 300 personnes ont été tuées le 23 avril 1994
  • Celui de la colline de Nyamure quatre jours plus tard, où s’étaient réfugiés des milliers de Tutsis
  • Celui de l’Institut des sciences agronomes du Rwanda, avec des dizaines de milliers de victimes recensées

Un « bras zélé du génocide »

Pour le président de la cour d’assises, l’ancien gendarme a été « le bras zélé du génocide par [son] action déterminée mais aussi déterminante ». Et de souligner que sans lui, « les faits n’auraient pas atteint une telle ampleur. » Une analyse qui reflète bien la gravité des actes commis, et explique la sévérité de la peine prononcée à son encontre.

« Vous restez une énigme pour nous. Vous n’avez pas montré de regret, pas de déni, pas d’introspection. Vous ne vous êtes présenté que comme la victime d’un complot. »

– Le président de la cour d’assises à Philippe Manier

Satisfaction des parties civiles

Pour les parties civiles, représentées notamment par le Collectif des parties civiles pour le Rwanda (CPCR) et l’association Ibuka, ce verdict en appel est source de satisfaction. « La justice a été rendue, la vérité judiciaire a été rendue et nous en sommes satisfaits », a réagi Alain Gauthier, président du CPCR. L’avocate d’Ibuka a quant à elle salué le fait que « la cour a retenu le caractère vertigineux et surtout l’impact sur l’histoire de l’humanité » de ces crimes.

L’accusé nie en bloc et se pourvoit en cassation

De son côté, Philippe Manier, qui a toujours nié toute implication dans le génocide, n’a pas réagi à l’annonce du verdict. Juste avant que la cour ne se retire pour délibérer, il avait affirmé que « la situation au Rwanda était un cauchemar sans fin », reconnaissant que « le génocide à l’encontre des Tutsis a été une réalité atroce ». Mais il a maintenu être « un homme brisé car innocent de ce dont on [l’]accuse ». Ses avocats ont immédiatement annoncé leur intention de se pourvoir en cassation.

Cette confirmation en appel de la condamnation de Philippe Manier représente une étape importante dans le long et douloureux processus de reconnaissance et de réparation des crimes du génocide des Tutsis au Rwanda. Un génocide qui, en à peine trois mois entre avril et juillet 1994, a fait plus de 800 000 morts selon l’ONU. Des crimes contre l’humanité imprescriptibles, dont la justice peine encore à rattraper tous les coupables près de trois décennies plus tard.

Passionné et dévoué, j'explore sans cesse les nouvelles frontières de l'information et de la technologie. Pour explorer les options de sponsoring, contactez-nous.