C’est une décision qui pourrait bien changer la donne dans le paysage des télécoms britanniques. Ce jeudi, l’autorité de la concurrence du Royaume-Uni a donné son feu vert à la fusion entre les opérateurs Vodafone et Three. Une opération mastodonte à près de 20 milliards d’euros qui réduit le nombre d’acteurs majeurs à trois sur le marché. Mais derrière cette concentration se cache une promesse : celle d’investissements colossaux dans le réseau 5G du pays, actuellement à la traine.
Le régulateur convaincu par les engagements des opérateurs
La Competition and Markets Authority (CMA) avait initialement exprimé des réserves sur ce rapprochement, craignant une hausse des prix et une baisse de la qualité de service pour les consommateurs. Mais Vodafone et Three ont su la rassurer en prenant des « engagements contraignants » d’investir massivement dans la 5G. Pas moins de 11 milliards de livres seraient ainsi injectés pour développer cette technologie de nouvelle génération.
Des promesses qui ont visiblement convaincu le gendarme de la concurrence, pour qui cette fusion « stimulera la concurrence entre les opérateurs » et « profitera à des millions de personnes ». Le régulateur a cependant posé ses conditions, exigeant notamment le maintien de certains tarifs et forfaits pendant au moins trois ans.
Le Royaume-Uni à la traine sur la 5G
Il faut dire que le Royaume-Uni a un sérieux retard à rattraper en matière de 5G. Selon une étude récente, le pays se classe seulement 53e mondial sur les vitesses de téléchargement en 5G. Un rang peu reluisant pour une nation qui ambitionne d’être à la pointe de la technologie. Plusieurs facteurs expliquent cette situation :
- Des investissements insuffisants de la part des opérateurs
- Une législation peu favorable au déploiement des infrastructures
- Le bannissement en 2020 des équipements 5G de Huawei pour des raisons de sécurité nationale
Résultat, les opérateurs ont dû remplacer à grands frais les antennes du géant chinois, freinant d’autant la couverture du territoire en 5G. Un retard que le gouvernement espère bien combler grâce aux investissements promis par Vodafone et Three.
Vers une révolution dans le secteur?
Pour de nombreux experts, cette mégafusion pourrait être le coup d’envoi d’une profonde transformation du paysage télécoms britannique. Avec seulement trois opérateurs principaux, le marché serait plus à même de dégager les marges nécessaires pour investir massivement dans les réseaux.
Un marché rationalisé à trois acteurs, tel qu’il existe dans des pays comme les Pays-Bas et la Suisse, pourrait accroître la rentabilité et encourager les investissements indispensables dans les réseaux britanniques en retard.
Matt Britzman, analyste chez Hargreaves Lansdown
Reste à voir si cette concentrationne se fera pas au détriment du portefeuille des consommateurs. Vodafone et Three se sont engagés à ne pas répercuter les coûts de leurs investissements sur les abonnés. Mais ce genre de promesses sont souvent plus faciles à faire qu’à tenir sur le long terme, préviennent certains observateurs.
Une fusion dans un contexte de restructuration pour Vodafone
Pour Vodafone, cette opération s’inscrit dans une vaste restructuration engagée par le groupe britannique pour redresser sa rentabilité après plusieurs années difficiles. L’opérateur a déjà vendu plusieurs de ses filiales européennes, comme en Espagne et en Italie, pour un total de 13 milliards d’euros.
Il a aussi annoncé la suppression de 11 000 emplois, soit 10% de ses effectifs mondiaux, afin de réduire ses coûts. Des efforts qui commencent à payer, avec un retour aux bénéfices au premier semestre 2023.
Avec ce « mariage » britannique, Vodafone espère franchir une nouvelle étape et créer un « champion national » de la 5G dans un marché ultra-concurrentiel. Mais il lui faudra tenir ses promesses d’investissements malgré un contexte économique incertain. Les prochains mois seront décisifs pour juger du succès de cette ambitieuse manœuvre.
