Imaginez la scène : un bateau en feu au milieu de l’océan, des hommes qui s’accrochent aux débris pour sauver leur vie. Et soudain, une seconde explosion. Ce n’est pas un film d’action hollywoodien. C’est ce qui s’est passé début septembre en eaux internationales, sous commandement américain.
Washington passe à l’offensive maritime contre le narcotrafic
Depuis l’été, les États-Unis ont radicalement changé de posture face au trafic de drogue. Exit les simples interceptions. Place aux frappes directes. Plus de vingt navires ont été coulés en quelques mois, dans les Caraïbes comme dans le Pacifique. Le bilan humain est lourd : au moins 83 morts. Et le secrétaire à la Défense, Pete Hegseth, l’assume pleinement.
Lors d’un conseil des ministres ouvert à la presse, il a même ironisé sur la difficulté à trouver de nouvelles cibles. « Nous ne faisons que commencer à envoyer des narcoterroristes au fond de l’océan », a-t-il lancé, sourire en coin. Un ton qui tranche avec la gravité des accusations qui pèsent sur certaines opérations.
La seconde frappe qui fait polémique
L’affaire a éclaté quand des informations précises ont filtré. Lors d’une opération début septembre, un navire suspect a d’abord été touché. L’embarcation a pris feu. Des survivants se sont accrochés aux restes flottants. Puis une seconde salve a été ordonnée. Onze personnes sont mortes au total.
Des élus américains ont immédiatement parlé de possible crime de guerre. Des experts en droit international ont dénoncé une exécution sommaire. L’ONU, par la voix de son Haut-Commissaire aux droits de l’homme, Volker Türk, a évoqué de « solides indices » d’exécutions extrajudiciaires.
« Des survivants qui s’accrochaient désespérément à leur bateau en flammes ont été tués par la seconde frappe »
Cette phrase, révélée par des sources proches du dossier, résume la violence de l’épisode. Elle a mis le Pentagone sur la défensive.
La défense du Pentagone : « Je n’ai pas vu de survivants »
Pete Hegseth a tenté d’éteindre l’incendie. Oui, il a autorisé la première frappe. Oui, il a suivi l’opération en direct. Mais non, il n’était plus dans la salle au moment où la seconde a été décidée. « Le bateau était en feu, je n’ai personnellement pas vu de survivants », a-t-il expliqué.
Il a aussi rappelé qu’il avait « beaucoup de choses à faire » au ministère – qu’il appelle désormais ouvertement le « ministère de la Guerre », nouveau nom choisi par l’administration Trump pour le département de la Défense.
La Maison Blanche, d’abord muette, puis niant l’existence d’une seconde frappe, a fini par la reconnaître. Et par la défendre. « C’était la bonne décision pour couler le bateau et éliminer la menace », a tranché un porte-parole.
L’amiral soutenu, le « brouillard de guerre » invoqué
Au cœur de la tempête, l’amiral Frank Bradley, qui supervisait l’opération. Pete Hegseth lui a renouvelé publiquement sa confiance. Il a parlé du fameux « brouillard de guerre », cette expression consacrée pour désigner l’incertitude et la pression extrême des décisions sur le terrain.
La porte-parole du Pentagone, Kingsley Wilson, a complété : toutes les actions sont « conformes au droit des conflits armés » et légales « tant au regard du droit américain que du droit international ».
Un renforcement militaire inédit dans les Caraïbes
Depuis août, la présence militaire américaine dans la zone a été massivement renforcée. Objectif affiché : couper les routes maritimes du narcotrafic. Cible prioritaire : le Venezuela. Washington accuse ouvertement le président Nicolas Maduro de diriger personnellement un cartel et d’utiliser l’État comme machine à blanchir l’argent de la drogue.
Aucun élément concret n’a été présenté publiquement pour étayer ces accusations contre chacun des navires coulés. C’est l’un des principaux points de critique des organisations internationales et des experts indépendants.
Les chiffres clés de l’opération depuis septembre
- Plus de 20 navires frappés
- Zones concernées : mer des Caraïbes et océan Pacifique
- Au moins 83 morts recensés
- Aucune preuve publique de lien avec le trafic de drogue pour la majorité des cibles
Jusqu’où ira cette nouvelle doctrine ?
En déclarant que les États-Unis « ne font que commencer », Pete Hegseth a envoyé un message clair. Cette stratégie de frappes préventives et létales n’est pas une parenthèse. Elle s’installe dans la durée.
Le ton ironique sur la « pause » due au manque de cibles montre aussi une forme de provocation. Comme si Washington voulait signifier qu’il est prêt à aller très loin, preuves ou pas, critiques internationales ou pas.
Le débat est lancé. Entre ceux qui voient dans ces opérations une réponse enfin musclée à un fléau qui ravage les États-Unis, et ceux qui y voient une dérive dangereuse, une guerre sans règles déclarée au nom de la lutte antidrogue.
Une chose est sûre : la mer des Caraïbes n’a jamais été aussi surveillée, ni aussi dangereuse pour quiconque navigue sans l’aval américain. Et la liste des bateaux coulés risque de s’allonger dans les prochains mois.
La question reste entière : où s’arrêtera cette escalade ? Et à quel prix, humain comme diplomatique ?









