C’est un vendredi 13 que personne n’oubliera de sitôt à Matignon. Après des jours d’intenses spéculations et un bras de fer surréaliste, Emmanuel Macron a fini par nommer François Bayrou au poste de Premier ministre. Une décision lourde de sens qui en dit long sur le compagnonnage politique ambigu qu’entretiennent les deux hommes depuis 2017.
Dans les coulisses d’une nomination sous haute tension
Selon des sources proches du dossier, les dernières heures avant l’annonce officielle ont été particulièrement tendues. Emmanuel Macron, réticent jusqu’au bout à l’idée de confier Matignon à François Bayrou, a dû se résoudre à cette option sous la pression de son allié centriste. Un véritable bras de fer qui a tenu en haleine tout le microcosme politique.
« Nul plus que moi ne connaît la difficulté de la situation », a déclaré François Bayrou lors de sa prise de fonction, évoquant « l’Himalaya qui se dresse devant nous ». Des mots forts qui résonnent comme un écho aux tractations de coulisses ayant précédé sa nomination.
François Bayrou, l’indéboulonnable centriste
Figure incontournable du paysage politique français, François Bayrou n’a jamais caché ses ambitions gouvernementales. Déjà pressenti pour Matignon en 2017, il avait dû renoncer suite à une affaire d’emplois fictifs au MoDem. Mais le centriste béarnais a su rebondir, se rendant indispensable dans la majorité présidentielle.
Je crois que ce serait marrant, oui !
François Bayrou, interrogé en janvier sur une éventuelle nomination à Matignon
Homme de réseaux et fin stratège, François Bayrou a su tisser sa toile au sein des arcanes du pouvoir, cultivant des relations privilégiées avec de nombreux ténors de la macronie. Un positionnement clé qui lui a permis de s’imposer, envers et contre tout, comme le choix naturel pour succéder à Élisabeth Borne à Matignon.
Emmanuel Macron pris au piège de l’« extrême centre »
Pour Emmanuel Macron, la nomination de François Bayrou est un choix par défaut qui ne s’est pas fait sans heurts. Le Président, soucieux de garder la main sur son gouvernement, craignait de voir son autorité contestée par un Premier ministre trop politique et autonome. Une inquiétude partagée par de nombreux macronistes historiques.
- Selon un ministre, « Bayrou n’est pas du sérail, il n’a pas la culture de la macronie. Sa nomination pose question ».
- Un proche du président a confié : « Emmanuel Macron s’est résigné, il sait que Bayrou va vouloir tirer la couverture à lui ».
Mais face à une Assemblée nationale où il ne dispose plus de majorité absolue, Emmanuel Macron avait besoin d’un Premier ministre capable de composer avec les différentes forces politiques. Un profil qui correspondait en tous points à François Bayrou, habile manoeuvrier rompu aux négociations et au consensus.
Cap sur un « gouvernement de personnalités »
Désormais installé à Matignon, François Bayrou doit relever un défi de taille : former un gouvernement à même de dépasser les clivages politiques et d’éviter le spectre d’une nouvelle motion de censure. Une gageure qui passe par la constitution d’une équipe resserrée composée de personnalités d’expérience issues de différents horizons.
Parmi les noms qui circulent avec insistance : l’ex-président du Sénat Gérard Larcher, l’ancien Premier ministre Bernard Cazeneuve, ou encore la députée macroniste Barbara Pompili. Autant de profils susceptibles d’incarner le « dépassement politique » cher à François Bayrou.
Les 5 travaux titanesques qui attendent Bayrou
Au-delà de la composition du gouvernement, le nouveau locataire de Matignon va devoir s’atteler en urgence à plusieurs dossiers brûlants :
- Bâtir un « accord de non censure » avec les oppositions pour sécuriser son action.
- Construire un budget 2024 sous contrainte, dans un contexte économique tendu.
- Apaiser les tensions sociales après des mois de réforme controversée des retraites.
- Relancer les grands chantiers mis entre parenthèses, comme la planification écologique.
- Incarner la « nouvelle méthode » politique voulue par Emmanuel Macron.
Autant de défis XXL qui promettent d’occuper François Bayrou 24h/24. Mais le nouveau Premier ministre peut compter sur sa ténacité légendaire et son sens politique aiguisé pour tenter de réussir là où d’autres ont échoué avant lui. L’avenir nous dira si le pari était le bon.