L’atmosphère est lourde et pesante dans les couloirs de l’Assemblée nationale. Le spectre d’une chute imminente du gouvernement Barnier plane sur le Palais Bourbon. Nommé il y a à peine trois mois, le Premier ministre s’apprête à affronter une épreuve décisive qui pourrait sceller le sort de son équipe ministérielle.
Le couperet de la censure
C’est une véritable épée de Damoclès qui est suspendue au-dessus de la tête de Michel Barnier. Après avoir engagé la responsabilité de son gouvernement via l’article 49.3 de la Constitution pour faire adopter sans vote le projet de loi de financement de la Sécurité sociale, le locataire de Matignon s’expose à une motion de censure qui a toutes les chances d’être adoptée dans les prochains jours.
Les députés de gauche comme ceux du Rassemblement National ont en effet annoncé qu’ils voteraient la censure, faisant fi de leurs profondes divergences idéologiques. Une alliance de circonstance qui pourrait bien faire tomber l’exécutif.
Une situation inédite sous la Vème République
Si la censure venait à être votée, ce serait un événement sans précédent depuis 1962 et le renversement du gouvernement Pompidou. Le gouvernement Barnier deviendrait ainsi le plus éphémère de l’histoire de la Vème République. Un scénario qui plongerait un peu plus le pays dans la crise politique née de la dissolution de l’Assemblée nationale en juin dernier.
La chute de Barnier est actée. Ce qui le fera tomber, c’est justement que le RN aura cessé de le soutenir.
Arthur Delaporte, député socialiste
Des conséquences potentiellement désastreuses
Au-delà de la crise politique, c’est aussi le spectre d’une crise financière qui se profile. Sans budget de la Sécurité sociale, le déficit des comptes sociaux pourrait atteindre des sommets. Une situation particulièrement préoccupante alors que la France doit continuer à emprunter sur les marchés à des taux avantageux.
Le ministre du Budget Laurent Saint-Martin a d’ailleurs tiré la sonnette d’alarme, évoquant un déficit qui pourrait atteindre près de 30 milliards d’euros l’an prochain en l’absence de budget. Des chiffres vertigineux qui donnent le tournis.
Emmanuel Macron sur le grill
Si le pire devait se produire, c’est bien le Président de la République qui se retrouverait en première ligne. Lui qui a choisi de dissoudre l’Assemblée en juin dernier devra à nouveau nommer un Premier ministre si le gouvernement Barnier venait à tomber sous les coups de la censure.
Une décision lourde de sens et de conséquences pour le chef de l’État, actuellement en visite officielle en Arabie saoudite et qui n’a pas souhaité commenter la situation. Mais nul doute qu’en coulisses, l’inquiétude est de mise à l’Élysée.
Les prochaines étapes
En attendant le vote fatidique, le travail parlementaire se poursuit tant bien que mal. Les sénateurs doivent ainsi continuer à plancher sur le budget de l’État, un texte sur lequel le recours au 49.3 semblait de toute façon inévitable. Quant aux députés, une commission mixte paritaire doit se pencher sur le budget de « fin de gestion » pour 2024.
On se creuse les méninges, on essaye de préparer la suite.
Un député socialiste
Préparer la suite, c’est bien le défi qui attend désormais l’ensemble de la classe politique française. Car si la chute du gouvernement Barnier semble actée, c’est une véritable page blanche qui s’ouvre, avec son lot d’incertitudes et d’inconnues. Une chose est sûre, les prochains jours s’annoncent décisifs et lourds de conséquences pour l’avenir du pays.
La Ve République n’a pas fini de trembler sur ses bases. Et c’est peut-être bien un nouveau chapitre de son histoire tourmentée qui est en train de s’écrire sous nos yeux. Avec en toile de fond, une question qui brûle les lèvres : et maintenant, que va-t-il se passer ?