Chaque été, la petite ville d’Avignon se transforme en une immense scène théâtrale, attirant des milliers de spectateurs du monde entier. En 2025, la 79e édition du Festival d’Avignon promet d’être un rendez-vous incontournable, non seulement pour les amateurs de théâtre, mais aussi pour ceux qui s’intéressent aux débats brûlants de notre époque. Des conflits au Moyen-Orient à la résonance mondiale du procès des viols de Mazan, cette édition s’ancre dans l’actualité tout en célébrant la richesse de la langue arabe. Préparez-vous à plonger dans un programme audacieux, où l’art se fait miroir du monde.
Un Festival Engagé dans son Temps
Le Festival d’Avignon, fondé en 1947 par Jean Vilar, est bien plus qu’un simple événement culturel. Il s’est imposé comme une plateforme où les artistes interrogent la société, ses crises et ses espoirs. Cette année, du 5 au 26 juillet 2025, la programmation s’articule autour de thématiques puissantes, mêlant création artistique et réflexion politique. Avec 42 spectacles, dont 32 créations inédites, le festival offre une diversité esthétique qui reflète les préoccupations d’un monde en mutation.
Le directeur du festival, Tiago Rodrigues, a choisi de placer la langue arabe au cœur de cette édition, une décision audacieuse dans un contexte géopolitique tendu. Cette langue, parlée par des millions de personnes à travers le monde et deuxième langue en France, est célébrée pour sa richesse poétique et son rôle de pont entre les cultures. Mais le festival ne s’arrête pas là : il aborde également des sujets sensibles comme les violences faites aux femmes, à travers un hommage poignant à Gisèle Pelicot, victime du procès de Mazan.
La Langue Arabe, une Invitation au Dialogue
Pour la troisième année consécutive, le Festival d’Avignon met une langue à l’honneur, après l’anglais en 2023 et l’espagnol en 2024. En 2025, c’est l’arabe qui prend la scène, avec une quinzaine d’artistes, principalement des chorégraphes et musiciens, venus du Maghreb, du Proche-Orient et au-delà. Cette célébration ne se limite pas à une exploration linguistique : elle vise à déconstruire les stéréotypes et à ouvrir un espace de dialogue culturel.
L’arabe, langue de lumière, de dialogue et de connaissance, est souvent pris en otage par les discours de haine. L’inviter, c’est choisir de faire face à la complexité politique.
Tiago Rodrigues, directeur du Festival d’Avignon
Parmi les moments forts, une soirée dédiée à la légendaire Oum Kalthoum, dont on célèbre les 50 ans de la disparition, aura lieu le 14 juillet dans la majestueuse Cour d’honneur du Palais des Papes. Des artistes comme Natacha Atlas et Souad Massi réinterpréteront ses chansons, offrant une plongée dans l’héritage musical arabe. De plus, le spectacle Nour, une célébration poétique de la langue arabe, promet plus de trois heures de poésie et de musique dans la cour du Lycée Saint-Joseph.
Quelques spectacles en langue arabe à ne pas manquer :
- Nour : Une nuit poétique célébrant la diversité de la langue arabe, le 15 juillet.
- Laaroussa Quartett : Une création tunisienne par Selma et Sofiane Ouissi, du 6 au 8 juillet.
- Yes Daddy : Une pièce du Palestinien Bashar Murkus, du 24 au 26 juillet.
Le Procès de Mazan : Un Hommage à Gisèle Pelicot
Un des temps forts de cette édition sera la nuit de lectures dédiée au procès des viols de Mazan, qui s’est tenu à Avignon entre septembre et décembre 2024. Ce procès, qui a bouleversé l’opinion publique mondiale, a mis en lumière le courage de Gisèle Pelicot, victime de violences inimaginables orchestrées par son ex-mari. La dramaturge Servane Dècle et le metteur en scène Milo Rau collaborent avec des avocats, des experts et des associations féministes pour proposer une mise en scène saisissante d’interrogatoires, de plaidoyers et de témoignages.
Prévue le 18 juillet au Cloître des Carmes, cette performance unique promet d’être un moment d’émotion intense. Lors de sa première présentation à Vienne, en Autriche, elle avait déjà profondément marqué les spectateurs. Cet hommage s’inscrit dans une volonté plus large du festival de donner la parole aux femmes et de dénoncer les violences patriarcales.
Son courage a bouleversé le monde entier et symbolise aujourd’hui le combat contre les violences faites aux femmes.
Tiago Rodrigues
Le festival propose également une adaptation théâtrale d’Inside Kaboul, inspirée des récits de Caroline Gillet, qui invite le public à s’immerger dans le quotidien d’une femme afghane. Ces spectacles, ancrés dans des réalités douloureuses, témoignent de l’engagement des artistes à faire écho aux luttes contemporaines.
Conflits au Moyen-Orient : Une Réflexion Artistique
Les conflits au Moyen-Orient, notamment la guerre entre Israël et le Hezbollah au Liban en 2024, trouvent un écho particulier dans la programmation. Le chorégraphe libanais Ali Chahrour présente une pièce créée sous les bombardements à Beyrouth, racontant le sort tragique des travailleuses migrantes abandonnées pendant le conflit. Intitulée When I Saw the Sea, cette œuvre illustre la capacité du théâtre à transformer la douleur en art.
En mettant en avant des créateurs issus de pays comme la Syrie, la Palestine ou le Liban, le festival donne une voix aux récits souvent marginalisés. Ces spectacles ne se contentent pas de décrire les crises : ils explorent les émotions, les espoirs et les résistances qui émergent dans des contextes de guerre. Cette démarche s’inscrit dans l’ADN du festival, qui a toujours cherché à confronter le public à des réalités complexes.
| Spectacle | Artiste | Thématique |
|---|---|---|
| When I Saw the Sea | Ali Chahrour | Conflits au Liban |
| Yes Daddy | Bashar Murkus | Identité palestinienne |
| Nour | Divers artistes | Poésie arabe |
Une Ouverture en Grande Pompe
Le festival s’ouvrira le 5 juillet dans la Cour d’honneur du Palais des Papes avec Nôt, une performance de la chorégraphe capverdienne Marlene Monteiro Freitas, inspirée des Mille et une nuits. Cette artiste, figure majeure de la danse contemporaine, promet un spectacle visuellement audacieux, mêlant mythes orientaux et esthétique moderne. Son rôle d’artiste complice de cette édition souligne l’importance accordée à la danse, qui représente un tiers de la programmation.
La Cour d’honneur accueillera également Le Soulier de satin de Paul Claudel, mis en scène par Éric Ruf avec la Comédie-Française. Cette œuvre monumentale, qui n’avait pas été jouée à Avignon depuis 38 ans, promet de marquer les esprits avec ses huit heures de représentation, ponctuées d’entractes. Ces spectacles phares incarnent l’ambition du festival de mêler tradition et innovation.
Un Hommage à Jacques Brel
La carrière de Boulbon, lieu emblématique du festival, sera le théâtre d’un hommage inédit à Jacques Brel, porté par la chorégraphe Anne Teresa De Keersmaeker et le danseur Solal Mariotte. Intitulée simplement Brel, cette création mêle danse contemporaine et breakdance pour réinterpréter les chansons de l’icône belge. Ce spectacle, qui se tiendra du 6 au 20 juillet, illustre la volonté du festival de croiser les disciplines artistiques.
Cette performance s’annonce comme un moment de grâce, où la puissance émotionnelle des textes de Brel rencontrera la physicalité de la danse. En parallèle, d’autres spectacles comme Le Canard sauvage d’Ibsen, mis en scène par Thomas Ostermeier, exploreront des thématiques universelles comme la vérité et la famille, renforçant l’éclectisme de la programmation.
Le Festival Off : Un Marché Vibrant
En parallèle du festival « In », le « Off » débutera également le 5 juillet, transformant Avignon en un véritable marché du spectacle vivant. Avec environ 1 700 spectacles, le Off est une vitrine de la création théâtrale indépendante, attirant aussi bien les professionnels que les curieux. Cette année, les deux festivals se déroulent simultanément, renforçant l’effervescence culturelle dans la Cité des Papes.
Malgré cet enthousiasme, le secteur du spectacle vivant traverse une période difficile, marquée par des coupes budgétaires et une crise de la diffusion. Huit syndicats, dont le Syndeac, appellent à un rassemblement le 5 juillet à 18h30 devant la mairie d’Avignon pour alerter sur ces défis. Ce cri d’alarme rappelle l’importance de soutenir la culture dans un contexte économique tendu.
Un Festival Engagé Contre les Violences
Le Festival d’Avignon 2025 ne se contente pas de proposer des spectacles : il s’engage activement contre les violences sexistes et sexuelles. Une cellule d’écoute dédiée au public, mise en place en collaboration avec le Off et la préfecture, est une nouveauté de cette édition. Depuis l’arrivée de Tiago Rodrigues en 2023, des mesures renforcées de prévention et d’accompagnement sont en place, incluant des formations pour les salariés et des référents spécialisés.
Cette initiative fait écho à une actualité troublante : le départ de l’ancien numéro 2 du festival, Pierre Gendronneau, visé par une enquête pour des allégations de harcèlement sexuel dans un poste précédent. Cet événement souligne l’engagement du festival à promouvoir un environnement sûr pour tous, artistes comme spectateurs.
Pourquoi le Festival d’Avignon 2025 est Incontournable
Le Festival d’Avignon 2025 s’annonce comme une édition mémorable, où l’art rencontre l’actualité avec une intensité rare. En célébrant la langue arabe, en rendant hommage à des figures comme Gisèle Pelicot et en explorant les crises du Moyen-Orient, il prouve que le théâtre peut être un espace de réflexion et de résistance. Avec des artistes de renom comme Marlene Monteiro Freitas, Thomas Ostermeier et Anne Teresa De Keersmaeker, le festival allie audace et excellence.
Pourquoi y aller ?
- Un programme riche avec 42 spectacles et 300 représentations.
- Une célébration unique de la langue arabe et de sa diversité.
- Des hommages poignants à des figures comme Gisèle Pelicot et Jacques Brel.
- Une réflexion sur les crises contemporaines à travers l’art.
Que vous soyez passionné de théâtre, de danse ou simplement curieux de découvrir des récits qui façonnent notre monde, le Festival d’Avignon 2025 est une expérience à ne pas manquer. Réservez vos places et laissez-vous emporter par la magie de la Cité des Papes.
