C’est une nouvelle qui a fait l’effet d’une bombe dans l’industrie automobile française. Mardi matin, le géant du pneumatique Michelin a annoncé la fermeture d’ici 2026 de deux de ses usines dans l’Hexagone, celles de Cholet et de Vannes, qui emploient au total 1254 salariés. Une décision justifiée par “l’effondrement” des ventes de pneus pour poids lourds et utilitaires face à la concurrence féroce venue d’Asie.
Des salariés “tristes” et “en colère” entrent en grève
La pilule a du mal à passer pour les employés des sites concernés. Dès l’annonce faite, les salariés de l’usine de Cholet, “tristes” et “en colère” selon les mots d’une déléguée syndicale, ont voté la grève et bloqué l’accès au site. La méthode est vivement critiquée.
Ils ont mis les 900 salariés dans une salle comme des vaches à l’abattoir et annoncé que c’était fini.
Morgane Royer, salariée et déléguée SUD
Même son de cloche à Vannes où l’annonce a été accueillie dans un “grand silence” par des employés sous le choc. Beaucoup redoutaient ce coup de tonnerre depuis plusieurs semaines, les négociations avec les syndicats ayant été suspendues. Pour eux, c’est un sacrifices sur l’autel de la rentabilité du groupe.
Aujourd’hui, on ferme deux sites et on met plus de 1.200 salariés au chômage pour que Michelin fasse plus de bénéfices et donne plus de dividendes à ses actionnaires.
Romain Baciak, délégué syndical central CGT
Un marché du pneu en berne
Si cette décision est brutale, elle intervient dans un contexte difficile pour Michelin. Comme l’ensemble du secteur, l’entreprise fait face à une baisse de la demande en pneus neufs liée au ralentissement du marché automobile. Surtout, le groupe de Clermont-Ferrand souffre d’une concurrence asiatique de plus en plus agressive sur le segment des pneus pour camions et utilitaires, cœur d’activité des usines de Cholet et Vannes.
C’est l’effondrement de l’activité qui a provoqué cette situation, et je veux dire à tous ces salariés que nous ne laisserons personne au bord du chemin.
Florent Menegaux, PDG de Michelin
Une stratégie de réduction des coûts
Pour le patron de Michelin, ces fermetures sont devenues “inéluctables”. Outre la pression concurrentielle, il pointe aussi du doigt une “dégradation lente de la compétitivité” de l’industrie européenne plombée par le coût de l’énergie qui empêche le groupe d’exporter. Une situation qui pousse Michelin à accélérer sa stratégie de réduction de sa présence industrielle dans les pays à coût de main d’œuvre élevés.
En vingt ans, ce sont ainsi pas moins de six usines qui auront été fermées en France, le premier pays du groupe. Et l’hémorragie risque de se poursuivre. Michelin a d’ores et déjà annoncé son intention de fermer deux autres sites en Allemagne d’ici 2025.
L’avenir en question pour plus d’un millier de salariés
Si la direction assure vouloir “accompagner chacun des salariés concernés avec des solutions sur mesure” via des reclassements en interne, des départs en préretraite ou un appui pour retrouver un emploi, l’inquiétude est grande chez les employés.
Le gouvernement est lui aussi monté au créneau, le ministre de l’Industrie réclamant “un plan d’accompagnement exemplaire des salariés et des territoires”. Michelin promet de “participer à la création d’au moins autant d’emplois que ceux supprimés” localement. Suffisant pour rassurer plus d’un millier de salariés jetés sur le carreau ? Rien n’est moins sûr. Cette fermetures repose en tout cas crûment la question de l’avenir de l’industrie en France dans un monde globalisé marqué par une compétition internationale féroce.